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Les aventures du jeune Indiana Jones : vous pouvez l’appeler Junior !

Bien avant de devenir le célébrissime « aventurier de l’arche perdue », le Professeur (à mi-temps) Henry Jones Jr. (Indiana Jones) a traversé les périodes les plus captivantes de notre Histoire au cours de trois inoubliables saisons signées George Lucas.

Originellement produite pour ABC avant d’être diffusée en France de façon totalement aléatoire et incomplète (sur TF1) entre septembre 1994 et juillet 1995, The Young Indiana Jones Chronicles (rebaptisée par la suite The Adventures of Young Indiana Jones) reste, encore à ce jour et en dépit du succès rencontré par la franchise cinématographique mettant en vedette Harrison Ford, l’un des ovnis télévisuels les plus incompris (et finalement méconnu) de ces dernières décennies… De même que, certainement, l’un des projets les plus insensés de son créateur. Budget hors norme pour l’époque (1,5 millions de dollars par épisode), durée de tournage trois fois plus longue que pour les séries « classiques », décors presque exclusivement naturels négociés aux quatre coins du globe et toujours merveilleusement mis en lumière sur pellicule 16mm… L’entreprise est aussi colossale que courageuse. De l’aveu même de George Lucas, la série était d’ailleurs un véritable gouffre financier, tout simplement impossible à rentabiliser… Mais qu’importe, le père fondateur de l’univers Star Wars était bien décidé à voir aboutir sa vision d’un programme à la fois exaltant, divertissant et éducatif ; ne sombrant néanmoins jamais dans l’exclusivité d’une « étiquette jeunesse » de par trop réductrice.

De la malédiction d’une mystérieuse momie découverte en compagnie du futur Lawrence d’Arabie en 1908 à la figuration qu’il entreprend dans un western tourné par John Ford en 1920, en passant par ses années de guerre et d’espionnage dans l’Europe de 1916, le encore jeune Indiana Jones parcourt le Monde en façonnant, pas à pas, sa personnalité de demain…

Les cinq visages du Docteur Jones

Tandis qu’ils s’attèlent à l’écriture du troisième volet de la saga, Indiana Jones et la dernière croisade (1989), George Lucas et Steven Spielberg envisagent ce qui devait, à l’époque, s’imposer comme l’ultime chapitre de leur trilogie en proposant une aventure initiatique père/fils ; introduisant pour l’occasion l’inénarrable personnage du Professeur Henry Jones Senior, si parfaitement campé par un Sean Connery plus en forme que jamais. La séquence d’introduction (se déroulant en 1912) invite donc le spectateur à découvrir à quoi pouvait bien ressembler le futur héros au fouet et à la cicatrice quand il n’était encore qu’un adolescent fougueux et à la limite de l’inconscient, vivant seul avec un père strict et autoritaire depuis la disparition prématurée de sa mère. A cette occasion, le regretté River Phoenix devient le premier comédien à prêter son visage à l’archéologue après Harrison Ford… Et, si George Lucas n’était pas si connu pour sa fascination à explorer le passé et les origines de ses personnages, l’histoire aurait très probablement pu en rester là. Fort heureusement, quelques trois ans et un sacré grain de folie plus tard, l’Indiana Jones du grand écran devient Young Indy sur le petit et le producteur/créateur nous régale d’une œuvre radicalement différente de tout ce qu’il avait pu proposer jusque-là… Pourtant, le double principe des Aventures du jeune Indiana Jones est, somme doute, relativement simple : une moitié de la série est focalisée sur le tour de Monde entrepris par la famille Jones – et la tutrice du jeune garçon, Miss Ellen Seymour, interprétée par l’irremplaçable Margaret Tyzack (2001 : l’odyssée de l’espace, Orange mécanique, Match Point) – entre 1908 et 1910 (avec le tout jeune Corey Carrier dans la peau d’Indy à 8 ans) tandis que la seconde suit les pérégrinations du futur héros tandis qu’il décide de prendre part à la Première Guerre Mondiale à compter de 1916 (avec Sean Patrick Flanery en Indy de 16 ans à 20 ans). Chaque épisode, introduit et conclu par un « Old Indy » de 93 ans incarné par George Hall, entraîne ainsi le téléspectateur dans un nouveau pays, où aventures, découvertes et explorations de chaque culture côtoient les figures historiques les plus illustres : de Lawrence d’Arabie à Sigmund Freud, en passant par Mata Hari, Giacomo Puccini, Leo Tolstoï, John Ford ou bien même Charles de Gaulle ! En toute simplicité, et hormis le pilote intitulé Young Indiana Jones and the Curse of the Jackal et quelques autres épisodes-doubles, chaque aventure est nommée par le nom de la ville et l’année où se déroule l’action et, bien qu’il n’en signe pas les scénarii définitifs, la quasi intégralité des intrigues reste issue de l’imagination de George Lucas lui-même.
Outre un impressionnant casting comptant autant de futurs stars (Daniel Craig, Catherine Zeta-Jones, Elizabeth Hurley, Anne Heche, Elsa Zylberstein…) que de personnalités déjà confirmées (Christopher Lee, Vanessa Redgrave, Max von Sydow…), l’équipe de production confiée aux soins de Rick McCallum ne manque pas de faire appel aux talents (autant techniques qu’artistiques) de chaque contrée visitée. Ainsi retrouve-t-on au générique des réalisateurs tels que Mike Newell (4 mariages et 1 enterrement, Harry Potter et la coupe de feu) et René Manzor (Le passage, Dédales), de même que des comédiens français ou européens comme Ronny Coutteure (dans le rôle de Remy, le meilleur ami d’Indy), Jean-Pierre Castaldi, Jean Rougerie ou encore Francis Lalanne. Ces derniers étant réunis dans le particulièrement poignant Verdun, September 1916 ; quatrième épisode de la première saison.

Visa(s) pour l’aventure !

A l’image des remaniements à répétition des films Star Wars via leurs multiples éditions spéciales, il existe plusieurs versions différentes de la série consacrée à la jeunesse d’Indy… Ce qui explique d’ailleurs en partie la difficulté à la revoir ou, pire encore, d’avoir l’opportunité de la découvrir aujourd’hui. Originellement, les deux premières saisons de The Young Indiana Jones Chronicles étaient constituées de 6 épisodes de 45 minutes, dont le pilote de double durée (diffusés sur ABC entre mars et avril 1992), puis de 22 autres aventures (entre septembre 1993 et juillet 1993), majoritairement du même format et exception faite de trois téléfilms : Young Indiana Jones and the Phantom Train of Doom, Young Indiana Jones and the Scandal of 1920 et l’extraordinaire Indiana Jones and the Mystery of the Blues, dont le récit était initié par Harrison Ford en personne (et en costume !) au cours d’un segment se déroulant dans le Wyoming en 1950 (soit seulement 7 ans avant les événements dévoilés dans le quatrième long-métrage, Indiana Jones et le royaume du crane de cristal) et, pour le coup, réalisé par George Lucas. Malheureusement, le grand public n’est pas fidèle à la série et les audiences chutent progressivement de 26 millions de téléspectateurs pour le pilote jusqu’à seulement 4,6 millions pour Paris, May 1919 : ultime épisode diffusé sur ABC le 24 juillet 1993… Face à une telle réalité, la série est logiquement annulée et les quatre épisodes restant de cette seconde saison ne sont même pas programmés. Déçu mais pas encore totalement désarçonné, George Lucas parvient néanmoins à négocier une troisième saison pour la filiale d’ABC : The Family Channel (Freeform). Il s’émancipe alors de sa propre formule en supprimant la narration, jusqu’alors habituelle, du vieil Indy (George Hall) et rentre directement dans le vif de l’action à travers quatre derniers téléfilms (trois avec Sean Patrick Flanery et un seul avec Corey Carrier), proposés avec parcimonie entre octobre 1994 et juin 1996. De ces montages originaux, il ne reste aujourd’hui pour le marché français que quelques cassettes VHS (très loin d’en proposer l’intégralité) et autres rediffusions sur Jimmy puis, plus récemment, sur France 4. Aucun coffrets DVD… Encore moins de bluray… Néanmoins, posséder la collection complète reste de l’ordre du possible ; mais pour les seuls anglophones.

En 1999, et initialement pour le marché de la vente en cassettes VHS, la série change officiellement de nom et devient The Adventures of Young Indiana Jones. L’ensemble de l’œuvre est alors drastiquement repensé… Les séquences d’introduction et de conclusions tournées avec George « Old Indy » Hall sont tout bonnement supprimées et les épisodes sont à présent réunis deux par deux, ainsi remontés en 22 téléfilms (proposés cette fois dans un ordre chronologique, de Egypt 1908 à Hollywood 1920), incluant de tous nouveaux segments de transitions tournés en 1996 avec le cast principal. A noter que certaines de ces scènes (avec un Corey Carrier à présent âge de 16 ans !) peuvent parfois choquer par ce manque aussi flagrant que naturel de continuité… En toute logique, ces nouvelles versions dites « définitives » et jamais doublées pour la France, sont celles qui ont été proposées entre octobre 2007 et avril 2008 en trois splendides coffrets DVD (en import US uniquement, en zone 1 et au format NTSC, sans aucun sous-titres français) : The Early Years, The War Years et enfin The Years of Change. Fidèle à sa motivation première, à savoir concevoir un programme à la fois familial, intelligent et éducatif, George Lucas commande pour l’occasion la réalisation de dizaines de documentaires extrêmement complets, clairs et parfaitement documentés pour accompagner chacune des aventures de Young Indy… Contextes historiques, biographies, analyses… De disques en disques, ce tour du Monde du début des années 1900 devient un véritable voyage dans le temps et une authentique mine d’informations. Une édition Paramount incontournable (et visuellement superbe), tout simplement.

Ne vous y trompez pas : malgré un manque certain de popularité et en dépit d’une approche certes peu conventionnelle d’un « produit dérivé » inspiré par l’un des plus grands héros d’action de tous les temps, The Young Indiana Jones Chronicles mérite bien son statut de série culte. Sous une forme ou sous une autre, elle a su s’illustrer par son grand sens de la transmission, de l’authenticité, du romantisme et de l’intensité. En se focalisant ainsi sur des années charnières, si sombres, fortes et à l’aube de notre civilisation contemporaine, George Lucas a ici signé son œuvre la plus courageuse et peut-être même la plus viscérale de toute sa carrière ; dont pas moins de 17 nouvelles aventures étaient déjà prêtes à entrer en production avant l’annonce de l’annulation de la série (!)… Qui resterait insensible aux reflets de la lune sur un parc de Londres en 1916 tandis que les zeppelins bombardent la ville ? Qui ne serait pas ému jusqu’aux larmes face aux massacres de Verdun et de la Somme, au cœur de la tourmente provoquée par la Grande Guerre ? Qui ne rêverait pas de fuguer à travers la Russie avec Leo Tolstoï pour seule compagnie, de succomber au charme de Mata Hari, de jouer du saxophone dans un club de Chicago avec Sidney Bechet, ou encore de refaire le Monde à travers les yeux de Pablo Picasso dans un bistrot de Paris en 1908 ?… Une chose est sûre, même s’il ne supporte toujours pas qu’on ose l’appeler « Junior », Indiana Jones peut en revanche être véritablement fier qu’on se souvienne également (et à jamais) de lui sous le nom de… Young Indy.

Crédit: ABC

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Journaliste spécialiste des musiques de films et de séries sur VL
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