Après le football et l’athlétisme, c’est au tour du tennis d’être secoué par une affaire mêlant sport et argent. D’après une enquête de la BBC et de Buzzfeed, un nombre important de matches sont soupçonnés d’avoir été truqués.
16 joueurs du Top 50 visés
Cette enquête publiée la veille de l’Open d’Australie, le premier tournoi du Grand Chelem de la saison, va faire parler. Les deux médias annoncent détenir des preuves de l’existence d’un système de triche autour des paris sportifs dans le tennis, organisé avec la complicité de certains joueurs. Une note confidentielle et l’analyse de 26 000 matches appuieraient leur argumentaire.
Après un recoupement des informations, 16 joueurs ayant évolué dans le top 50 sont particulièrement visés. Cependant, aucun nom n’a été publié par les journalistes. Ces derniers précisent ne pas pouvoir assurer l’implication personnelle de ces joueurs « sans accès à leur téléphone, leur compte bancaire ou leur ordinateur ». Parmi ces 16 tennismen, la moitié figurerait dans le tableau final de l’Open d’Australie.
Cette pratique est souvent dénoncée mais se limitait aux tournois dits mineurs et aux joueurs classés au-delà de la 100ème place. La présence de joueurs figurant dans le haut du classement est une surprise. Les nouvelles accusations concerneraient même des vainqueurs de tournois de Grand Chelem, en simple ou en double, ainsi que des rencontres disputées à Roland-Garros et à Wimbledon, les compétitions les plus prestigieuses du circuit.
Djokovic approché
L’autre information importante est le rôle joué par les instances, et notamment celui de l’ATP (l’association of tennis professionals), accusée d’être au courant et de posséder les documents obtenus par la BBC et Buzzfeed. Pourtant, l’assocation n’a rien fait pour enrayer ce phénomène. Aucune enquête, encore moins de sanctions. Chris Kermode, le président de l’ATP, s’est empressé de démentir ces informations : « Notre approche, c’est la tolérance zéro envers toute forme de corruption. Nous ne sommes pas complaisants, nous sommes vigilants. »
Dans les vestiaires, l’enquête fait aussi parler d’elle et plusieurs joueurs du circuit ont réagi depuis l’Australie. Le français Julien Benneteau a ainsi demandé à en savoir plus avant de juger, mais a pointé du doigt le fait de pouvoir parier sur un sport individuel, ce qui serait « plus dangereux pour le tennis que le dopage ». Un avis partagé par son compatriote Nicolas Mahut. Gilles Simon, le numéro 15 mondial, dénonce le moment choisi par les journalistes « C’est surtout pour faire le buzz« , précisant que lui-même n’avait jamais été approché.
Le numéro 1 mondial Novak Djokovic a reconnu que son entourage avait été approché en 2007 pour qu’il perde l’un de ses matchs, mais lui aussi se montre dubitatif devant l’ampleur des informations révélées. « Tant que cela reste comme ça, ce ne sont que des spéculations » a déclaré le serbe.
Des précédents dans le tennis
Des rencontres de tennis truquées, l’idée en elle-même n’est pas nouvelle. Dès 2008, la Fédération Internationale a crée la Tennis Integrity Unit (TIU) afin de surveiller les agissements des joueurs dans le monde professionnel face à la corruption et aux paris en ligne. Récemment, deux tennismen italiens Daniele Bracciali et Potito Starace ont été reconnus coupables d’avoir misé de l’argent sur leurs propres défaites et par conséquent, suspendus à vie. D’autres joueurs, majoritairement dans les bas-fonds du classement ATP, ont connu ce même type de sanction.
L’exemple le plus connu est celui de Nikolay Davydenko, accusé d’avoir volontairement perdu un match en 2008 contre l’Argentin Martin Vassalo Arguello. Le tennisman russe gagna le premier set mais contre toute attente, sa côte sur les sites de paris en ligne était montée. Ces variations étranges avaient poussé les bookmakers à clôturer les paris autour de ce match. Davydenko perdit le second set avant d’abandonner.
Une enquête menée par l’ATP avait innocenté Nikolay Davydenko, laissant planer le doute d’une certaine impunité pour les joueurs les plus connus. La suite de l’affaire pourrait bien renforcer cette idée.