Nous apprenions fin janvier que Netflix avait signé un accord de production avec les studios BONES et Production IG, deux fleurons de l’animation japonaise avec lesquelles ils créeraient main dans la main. Vite révélé, vite sorti, B: The Beginning est le premier d’une longue liste. Que vaut donc cette série originale signée Kazuto Nakazawa ?
L’aventure commence alors qu’une femme poursuivie par deux psychopathes en pleine forêt se fait sauver in extremis par un tueur en série appelé B. Le bougre cavale depuis déjà longtemps et la police désespère de l’attraper. Pour mettre toutes les chances de son côté, la brigade du RIS ressort du placard Keith Flick, un ancien camarade qui s’était fourré dans la section des archives de la police après un violent coup dur. Réussiront-ils à arrêter B ? Que veux donc dire la marque que le tueur laisse derrière lui à chacune de ses apparitions ? Et quelle est donc cette mystérieuse organisation qui semble étroitement liée à lui ?
Opération Corned-Beef
B: The Beginning plonge immédiatement son spectateur dans un univers mi-atypique mi-familier. On suit une enquête policière somme toute classique mais quelque chose cloche. On finit vite par saisir la source du problème : B: The Beginning est empêtré dans trop de trames à la fois ! L’île fictive de Cremona est le théâtre de beaucoup trop de choses extraordinaires. Un tueur en série passe encore, mais quand on commence à toucher à du transhumanisme et à des sociétés secrètes grimées en clown la crédibilité du titre commence à prendre la tangente. Car oui en vérité et c’est révélé dès l’épisode 1, le vrai méchant n’est pas celui qu’on croit et B est un tueur bien loin du charisme de Scar dans FMA. Il n’a pas du tout l’image d’un tueur, c’est plutôt un héros de shounen qui s’est perdu dans une série policière.
Si policier il y a, nous sommes ici plus proche de l’ambiance de Psycho-Pass que de Ghost in the Shell. La dynamique de l’équipe bien qu’intéressante ne s’articule pas réellement de façon harmonieuse, les personnages ne sont pas tous développés de manière égale. La caractérisation des membres de la RIS est très faible pour ne pas dire inexistante. B: The Beginning pioche donc dans les stéréotypes majoritaires, de l’inspectrice flic à la hackeuse blonde en passant par le vieux briscard ou le chef de service cachant son intelligence derrière ses lunettes.
Le Flick était presque parfait
Si vous ne connaissez pas Nakazawa par son nom, vous le connaissez sans doute pour son style. Le monsieur s’est entre autre occupé du chara-design de Samurai Champloo et Terror in Resonance, deux célèbres productions de Shinichiro Watanabe, le créateur de Cowboy Bebop. Ici Nakazawa est non seulement chara-designer mais il est également réalisateur, directeur de l’animation et créateur original de la série. De multiples casquettes qui expliqueraient par ailleurs pourquoi la série est aussi peu équilibrée, notamment dans sa première moitié. Il partage néanmoins les commandes avec Yoshiki Yamakawa, réalisateur de Hatsukoi Limited, Kill Me Baby et Little Busters!. Les deux bonhommes se connaissent de longue date puisqu’ils ont ensemble travaillé sur les Chroniques De La Guerre De Lodoss : La Légende Du Chevalier Héroïque. Pourtant ici on ne peut que se demander si le stress ou le manque de temps leur aurait empêché de raconter correctement leur histoire.
Car le scénario, aussi alléchant qu’il puisse être sur le papier, est bien plus poussif et confus dans l’exécution à l’écran. L’histoire se perd épisode après épisode dans des méandres toujours plus obscurs et il faut attendre la moitié de la série pour apprécier ce qu’on regarde sans discontinuer. La partie enquête policière et révélations est vraiment très accrocheuse avec des épisodes haletants, mais quel chemin pour en arriver là ! Une fois au bout du sentier nous sommes même en droit de nous demander pourquoi le début est aussi alambiqué pour ne déboucher sur, pour ainsi dire, rien ?
C’est là qu’il convient de remarquer que le titre a un « The Beginning » fort saillant en son sein, confirmé par une scène post-générique indiquant clairement que ça n’est pas fini, que ça n’était bel et bien que le début. B: The Beginning pourrait bien être la première série d’animation japonaise conçue pour Netflix avec les mêmes ambitions que ses consœurs live de posséder plusieurs saisons et d’être suivie année après année. Voilà qui explique donc ce début fort poussif, laissant se développer un background plein de mystère qui sera sans doute pleinement dévoilé dans la future saison.
Au final que penser de B: The Beginning ? Il y a une dizaine d’année encore, Production IG pouvait se targuer d’être un des meilleurs studios de l’archipel, fort d’avoir signé l’intégralité des productions Ghost In The Shell. Il faut hélas reconnaître qu’ils ont légèrement perdu de leur superbe : sans rien sacrifier au niveau de production qui a fait la renommée du studio, la série accuse de sérieux problèmes d’écriture.
Malgré un début très poussif qui ne sait pas sur quel pied danser, B: The Beginning sait poser une ambiance et un univers intrigant ainsi qu’un scénario efficace. Si vous appréciez votre polar avec un soupçon de surnaturel plutôt que noir et sans sucre, vous ne pourrez qu’être pleinement satisfait de cette série qui jongle maladroitement entre les deux genres et qui, on l’espère, saura redresser le tir lors de sa prochaine saison.