Par nature, le septième art possède le don de pouvoir illustrer ce qui est laissé à l’imaginaire sur le papier. La thèse est un de ses genres les plus ambitieux, tentant de proposer une explication métaphysique aux constantes de notre espèce. Dans l’histoire du cinéma, il est souvent synonyme de succès retentissant ou d’échec cuisant, tant bien qu’il est devenu relativement rare.
EVOLUTION
Le modèle du genre reste sans contexte 2001, L’Odyssée de l’Espace de Stanley Kubrick, monument du cinéma d’anticipation inspiré des nouvelles d’Arthur C. Clarke. Le film est découpé en quatre parties plus ou moins longues qui retracent les différents étapes de l’évolution. L’élément central du film est un mystérieux monolithe qui confère aux singes, puis aux hommes, la capacité de dépasser leur condition en leur transmettant la connaissance. D’abord, c’est la découverte de l’outil qui permet aux primates de se distinguer de la condition animale : en se plaçant sur deux pattes, ils deviennent ainsi des hommes. Le film bascule 2001, et on retrouve l’Homme qui, guidé aveuglement par le monolithe, s’avère maitriser sa planète et aspire à découvrir l’espace.
« J’ai essayé de créer une expérience visuelle, qui contourne l’entendement et ses constructions verbales, pour pénétrer directement l’inconscient avec son contenu émotionnel et philosophique. » S. Kubrick
Prometheus répond aux diverses interrogations suscitées par la quadrilogie Alien. Ce préquel donne ainsi une explication logique à la mytique saga de science-fiction, tour à tour repris par Ridley Scott, James Cameron et David Fincher. La trame scénaristique est solide puisque Prometheus livre une explication totale sur les rouages de l’histoire.
DOUTE
Matrix répond à un autre genre de thèse. Cette dystopie en 3 volets, surtout reconnue pour son premier, est emplie de philosophie héritée de Descartes — et notamment le fameux « Je pense donc je suis ». L’oeuvre des frêres Wachowski dépeint une société en tout point conforme à la notre, où les individus pensent vivre, penser et acter librement alors que cela n’est en fait qu’une illusion. La matrice est le programme qui régit ce monde déshumanisé, répondant au principe de causalité « action, réaction » et à la logique impartiale du binaire. L’efficacité de ce film tient dans sa capacité à présenter une société en tout point imparfaite, possédant des points communs à la notre — ou l‘anticipant — dans une mesure où le spectateur est capable de remettre en question la réalité dans laquelle il évolue.
La remise en question est un thème repris dans le thriller de science-fiction écrit et réalisé par Christopher Nollan, Inception. Balancés entre rêve et technologie — un lien peu mis en avant — les protagonistes s’essayent à «voler» une idée contenu dans un esprit humain. Au delà d’une histoire réglée de bout en bout et dont la logique peut parfois étonner — car rappellons qu’il s’agit de rêves—, Christopher Nollan approche l’idée que notre réalité pourrait être totalement illusoire.
TEMPS
Pour réaliser Enter The Void, Gaspard Noé a reconnu s’être fortement inspiré de Stanley Kubrick, qu’il considère comme le plus grand cinéaste de tous les temps. Cette fresque psychédélique de haute volée, est une thèse assumée sur la mort qui s’empare du spectateur aussi vite qu’elle le libère. Qualifiée d’expérience visuelle et sensorielle, Noé livre içi un véritable exercice de style tant qu’il sera souvent difficile d’avoir un avis définitif sur ce film. Si ce dernier est présenté içi, c’est qu’il tente de donner à la réincarnation une explication formelle.
The Tree of Life est LE film ambitieux par excellence. Terrence Malick, livre une fresque photographique impeccable et s’attaque au mystère qu’est la vie en remontant aux origines de celle-ci.
« Il y a deux voies dans la vie, celle de la nature et celle de la grâce. »
A peine commencé, le réalisateur impose l’immensité de son sujet. 2h30 de pur spectacle, parfois incompréhensible mais jamais inutile. Le film est emplie de symbolique à la 2001 comme la scène du Big Bang, qui n’est pas sans déplaire.
GUERISON
Equilibrium est une oeuvre méconnue réalisée par Kurt Wimmer, qui par ses allures de film d’action rend compte d’une réalité intéressante, et pas si éloignée de l’état actuel des choses. Dans un futur proche, les sociétés sont aguerries d’une gouvernance mondiale suite à une troisième guerre mondiale qui oblige l’humanité à se calmer pour de bon. Afin d’éviter à tout prix un nouveau conflit, les émotions sont effacées par la prise d’un traitement — le prozium — et une milice d’élite est chargée d’éliminer quiconque d’oppose à la volontée du Père, l’homme à l’origine de cette solution. Rapidement, les choses s’enveniment et un de ses soldats — incarné par Christian Bale — retrouvant peut à peu goût aux émotions décide de mettre fin à ce régime tyrannique.