Benoît Hamon, le ministre de l’éducation, entend réformer le système de notation en lançant mardi 24 juin une « conférence nationale sur l’évaluation des élèves ». Il espère ainsi trouver une alternative plus « stimulante » pour les élèves.
Alors qu’une polémique sur les sujets de maths du bac 2014, jugés trop difficiles, a conduit l’éducation nationale a demandé aux correcteurs d’être indulgents dans leur notation avec les candidats de série S, Benoît Hamon tient aujourd’hui une conférence sur le système d’appréciation des écoliers. Son but : parvenir d’ici la fin de l’année à un « consensus » sur l’adoption d’une annotation plus bienveillante. Après la réforme des rythmes scolaires, il se pourrait que cette volonté du ministre de l’éducation suscite une nouvelle levée de boucliers contre elle. En effet, en France, l’évaluation notée c’est sacrée !
Supprimer les notes pour ne plus décourager les élèves
De l’école élémentaire jusqu’au terme des études supérieures, la notation est une pratique persistante et généralisée dans le système éducatif français. Mais « aujourd’hui, notre système d’évaluation souligne les lacunes et les échecs des élèves, ce qui peut être très décourageant pour certains », se justifie Benoît Hamon dans une interview accordée au Parisien. S’appuyant sur la dernière étude Pisa de l’OCDE (en décembre 2013) ce dernier affirme également que « les jeunes Français sont ceux qui redoutent le plus l’erreur et dont les taux de non-réponse aux questions posées sont les plus élevés, par peur de faire une faute ». Le ministre propose donc une réflexion pour qu’une nouvelle évaluation favorisant le progrès des élèves soit mise au service de l’apprentissage. Il faut « sortir de la logique « acquis » ou « non acquis », car il y a différents degrés d’acquisition », ajoute-il. Pour lui, « la note doit donc être utilisée à bon escient puisqu’elle est utile. Mais, quand elle paralyse, on doit lui substituer d’autres formes d’évaluation ».
Des solutions afin d’éviter la stigmatisation par les notes qui devront être trouvées au cours de cette conférence nationale sur l’évaluation des élèves. Celle-ci se tiendra de juillet à décembre et rassemblera rue de Grenelle la communauté éducative et la société civile, sous l’égide d’un comité d’organisation présidé par le recteur de l’Académie de Rennes, Michel Queré. Benoît Hamon recevra également les conclusions d’un jury composé de professionnels et d’usagers du système éducatif, présidé par le physicien Etienne Klein et dont les conclusions devront être étayées par des connaissances scientifiques et des pratiques de terrain, nationales et internationales, pour plus de crédibilité.
Touche pas à ma note !
Mais les défenseurs de la note ne sont pas d’accord et voient dans cette mesure une énième preuve de laxisme de la part du gouvernement. Ainsi, selon un sondage OpinionWay de mai 2012, 69% des parents d’élèves étaient contre la suppression de cette institution. Tout comme 80% des Français dans leur globalité, d’après une étude Ifop réalisée pour le journal Métro la même année. En 2010, Luc Chatel –ministre de l’éducation nationale sous le mandat de Nicolas Sarkozy– certifiait d’ailleurs : « La note n’est pas synonyme d’échec, de rejet ou de sanction. C’est l’évaluation d’un travail et ça peut être un objectif pour l’élève, un objet de progression ». En somme, « la note est utile pour avoir des repères et pour mesurer les résultats des élèves ». Un avis partagé par Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l’Ifop qui a mené l’enquête ci-dessus : « les notes sont, pour les parents, une façon de garder le contrôle sur leur enfant […] C’est donc un système qui les rassure [puisque] les notes leur permettent ainsi d’anticiper, d’une certaine façon, les difficultés à venir des enfants ». Il faut dire que, dans un contexte de crise où le chômage des jeunes explose (presque 25% pour les moins de 25 ans), les parents sont inquiets pour l’avenir de leurs enfants et leur mettent donc la pression avec les notes. En effet, celles-ci permettent, en classant les étudiants de façon comptable –et, avouons-le, aléatoire car bien souvent reflet de l’humeur de l’examinateur–, d’opérer une sélection et d’instaurer généralement un climat de compétition entre eux. Qui, pour beaucoup, les préparent à la dure loi du marché de l’emploi.
Bref, à peine trois mois après son arrivée dans le gouvernement Hollande, Benoît Hamon s’attaque à un premier chantier qui risque de lui donner du fil à retordre. Et l’opinion publique ne manquera pas de l’évaluer sur la tenue de ce dossier. A voir si le ministre sera plus proche du zéro ou du 20/20.