Les Britanniques ne pourront plus se rincer l’œil à la page 3 du célèbre tabloïd The Sun, à laquelle figuraient traditionnellement des clichés de femmes seins nus. Des campagnes de protestations contre le sexisme ainsi qu’une pétition ont obtenu gain de cause.
Une tradition vieille de 45 ans.
Les photos mythiques de la « Page 3 » ne sont désormais plus. Le tabloïd le plus vendu du pays a perdu une partie essentielle : les clichés des jeunes femmes seins nus. Ces clichés avaient été introduits au début des années 1970, peu après le rachat du Sun par Rupert Murdoch, alors que ce journal était en crise. Les tirages avaient alors été propulsés de 800 000 à 4 millions en l’espace de dix ans, ce qui fit du Sun le journal le plus vendu de Grande-Bretagne.
La fin de la Page 3 : entre victoire contre le sexisme et approbation de Rupert Murdoch.
Depuis plusieurs années déjà, les détracteurs du Sun avaient eux-même qualifié cette page de « sexiste », d’après le Times. La fin de la Page 3 signifie-t-elle une évolution des moeurs? Rupert Murdoch a déclaré l’an dernier que celle-ci était « surannée », toujours d’après le Times. Voulait-il faire évoluer l’image du journal? approuver les détracteurs? céder à la pression des campagnes anti-sexisme, lui qui a maintenant plus de 80 ans?
En effet, des campagnes anti-sexisme ont été menées en vu d’arrêter la diffusion des photos des jeunes femmes dénudées dans le Sun, soutenues par des personnalités politiques, des syndicats, des universités, amplifiées par les réseaux sociaux. Finalement, une pétition visant à demander au Sun d’arrêter de diffuser la fameuse Page 3 a recueilli 217 000 signatures.
Cela a été applaudi par l’opinion publique. Stella Creasy, membre du parti Labour à la Chambre basse du Parlement britannique a ainsi déclaré : « Sexualiser, faire ainsi des femmes des objets n’était qu’une manière de nous dire à tous que ce qui importait, franchement, était notre poitrine et pas notre pensée. » (citation dans UK Reuters)
Sur l’édition du Sun d’aujourd’hui, mercredi 21 janvier 2015, c’est une photo de plats prêts à être dégustés qui figure à la page 3.
Et maintenant?
La suppression de la page 3 ne devrait pas faire baisser les ventes du Sun. En août 2013 déjà, la version irlandaise du journal avait retiré cette page polémique, ce qui, visiblement, n’a pas entraîné de conséquences en termes de ventes, d’après UK Reuters. Néanmoins, dans ce climat de crise de la presse, le Sun a connu son pic le plus bas de ventes, à 2 millions de ventes en octobre dernier – la première fois depuis 1971, toujours selon la même source.
Quant aux clichés provocateurs de la Page 3… ils sont toujours disponibles sur la page Internet du Sun. La fameuse page 3 a même son propre compte twitter, @officialpage3, dont la bannière montre treize jeunes femmes en petite culotte. Les abonnés du Sun peuvent aussi avoir accès aux archives du Sun et de ces photos.
Pas de panique donc pour les aficionados du Sun, puisque le mythe de la page 3 ne périra pas sur la toile. Un porte-parole du tabloïd a d’ailleurs indiqué nonchalamment : « La page 3 du Sun est là où elle a toujours été, entre les pages 2 et 4 », avant de renchérir : « et vous pouvez trouver Lucy de Warwick [une des jeunes femmes posant seins nus] sur Page3.com ». En tout cas, si la « Page 3 » perdure sur le net, cela constitue une avancée contre le sexisme dans la presse écrite.