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Japan Expo : Zelda, la légende artistique

Japan Expo : Zelda, la légende artistique

Invité d’honneur de Japan Expo 2017, le réalisateur Eiji Aonuma a livré un retour d’expérience – et de nombreuses anecdotes – sur la direction artistique de la saga Legend of Zelda.

Désormais grande habituée de la scène Ichigo qui reçoit chaque année les invités d’honneur de Japan Expo, Nintendo a répondu une nouvelle fois présent en la personne d’Eiji Aonuma, producteur et directeur de la saga The Legend of Zelda depuis l’opus Majora’s Mask, sorti en 1999 sur Nintendo 64.

En compagnie de l’illustrateur Yusuke Nakano et du directeur artistique Satoru Takizawa, Eiji Aonuma s’est prêté au jeu des questions de Grégoire Hellot pour présenter le travail de longue haleine fourni par Nintendo sur l’une de ses licences fétiches. Une conférence de haute volée, riche en anecdotes et qui apporté son lot de révélations croustillantes – hélas ramassées dans une présentation de 45 minutes, là où la firme japonaise avait prévu suffisamment de contenu pour 2 heures.

Zelda : les boss de la série !

De gauche à droite : Grégoire Hellot, Yusuke Nakano, Eiji Aonuma, Satoru Kitazawa et le traducteur Florent Gorges

 

Ocarina of Time : de la mine au pixel

Épisode de toutes les révolutions, Ocarina of Time a été le premier à porter les aventures de Link en trois dimensions. Yusuke Nakano confie avoir largement travaillé sur la base de l’épisode A Link to the Past, respectant jusqu’aux rouflaquettes du héros blondinet.  De son côté, Satoru Takizawa s’est livré sur sa cadence de travail effrénée à l’époque : appelé sur le projet en tant que responsable du design des ennemis, il avait du rendre 12 boss en 6 mois.

Zelda : design boss

Quelques croquis des boss cultes d’Ocarina of Time

 

C’est à lui que l’on doit notamment le design de Ganondorf, antagoniste iconique de la série. Ce dernier aura notamment fait l’objet d’un re-design au moment de la promotion du jeu : à l’origine maigrichon et l’œil fuyant – tout roi des voleurs qu’il est – il s’est très vite étoffé sous le trait de Nakano. « À l’époque, j’avoue avoir eu du mal à accepter l’illustration finale de Nakano… Son Ganondorf est quand même sacrément musclé ! » Le roi des Gerudos n’est pas seul à avoir subi un lifting : le character design a subi de nombreuses évolutions au gré de la modélisation des personnages et des environnements. Et Nakano de compléter : « Les modèles 3D étant relativement simplistes compte tenu de la puissance des consoles de l’époque, il fallait que les illustrations apportent le supplément de détail qui permette aux joueurs de projeter leur imaginaire dans le jeu ».

Zelda : Ganondorf

Ganondorf a subi quelques liftings !

 

The Wind Waker : le retour au cellulo

Le premier tournant artistique vient avec sur GameCube avec la sortie de The Wind Waker. Alors que les deux volets N64 s’étaient déroulés sur la terre ferme, Aonuma a propulsé le joueur en pleine mer sous les traits d’un garçonnet : « Notre mot d’ordre était de produire un personnage agréable à contrôler et à regarder, d’où le slogan du jeu au Japon : un dessin animé contrôlable. » Prenant pour base le style cel-shading propulsé par Jet Set Radio, Nintendo s’est très vite mis à la tâche pour produire son style « toon-shading », moteur proche du dessin animé visant à rendre des personnages très expressifs. Les nombreux effets de flammes et de fumées, jouant sur les à-plats de couleurs en transparence, s’inscrivent dans la lignée de l’animation japonaise au celluloïd. « Je n’étais pas convaincu par les illustrations. Mais une fois que le personnage s’est animé, je l’ai trouvé craquant. »

Outre sa redéfinition technique, The Wind Waker a su marquer les mémoires dès ses toutes premières secondes, avec le récit xylographique d’une légende érodée par le temps, trop lourde à porter pour être transmise. Une introduction qui aura demandé beaucoup de temps à Nakano : « Plutôt que de recourir à des effets numériques, j’ai travaillé l’effet d’usure à l’aide notamment d’une vieille photocopieuse, de bandes adhésives et de plusieurs scans consécutifs. »

Twilight Princess : le retour au réalisme

Bien qu’Aonuma ait prévu une suite à The Wind Waker, il opérera un nouveau virage à 180° pour Twilight Princess : ni une ni deux, le prochain Link sera réaliste. Une décision compréhensible : si la direction cartoon avait reçu un accueil unanime de la part du public japonais, il avait reçu un accueil très polarisé du public occidental pourtant acquis à la licence. De plus, une meilleure maîtrise des performances de la GameCube et de la Wii permettait un rendu plus détaillé. « J’aurais voulu donner une suite à Wind Waker, mais je voulais aussi raconter une histoire plus sombre et sérieuse. » Takizawa, promu directeur artistique, renchérit : « On avait besoin de montrer Link chevauchant frénétiquement, mais en cartoon ça ne marchait pas. On aurait dit un gosse sur un manège ! »

Zelda : un Link trentenaire ?

Twilight Princess avait prévu un Link trentenaire !

 

Tandis que Takizawa est promu directeur artistique, Nakano est donc mobilisé en amont du processus de design : « J’ai en grande partie puisé mon inspiration dans un quotidien éloigné des tropes du jeu vidéo (…) Pour Midona, nous avons eu recours à un concours interne et de nombreuses idées ont été rejetées. À l’inverse, le personnage de Xanto a été accepté dès le premier jet. Idem pour Baba, que j’avais dessiné sur un coin de feuille en réunion ! » Respect des aspérités du croquis, palette de couleurs limitée, rendu final proche de la peinture à l’huile : The Legend of Zelda: Twilight Princess tient sa direction artistique.

Zelda : Twilight Princess

Breath of the Wild : un travail d’archéologue ?

Pour Breath of the Wild, épisode de tous les succès ayant propulsé la Switch en orbite dès sa sortie, la direction artistique a repris la voie du passé. Le jeu se voulant plus intimiste et personnel, l’équipe a en effet puisé dans le patrimoine historique du Japon pour fournir au monde un univers dépaysant. Les nombreuses ruines et carcasses de géants rencontrées aux quatres coins d’Hyrule reprennent ainsi les gravures caractéristiques de la céramique de l’époque Joumon. « On ne s’y attendait pas vraiment, mais les recherches concernant l’ère Joumon ont explosé suite à la sortie du jeu. J’imagine qu’on a bien fait notre travail ! » s’amuse Takizawa.

Zelda : L'influence Joumon

Le jeu des 7 différences (solution en bas de page)

 

Il poursuit : « L’objet de ce Zelda étant la nature, je tenais à ce que l’on ressente les odeurs et l’humidité, ce que j’appelle la matière atmosphérique. On aperçoit souvent à l’horizon au Japon dans les premiers jours de l’été, au moment où l’air est le plus palpable et odorant. » Un trait artistique qui permet de limiter la distance d’affichage tout en proposant un ressenti original au joueur. Nakano confie avoir également rempilé pour les illustrations antiques : si le résultat est in fine proche de son travail sur Wind Waker, Nakano avait proposé à Aonuma de travailler sur des illustrations en batique. Aonuma confie qu’il existe même un message caché en hylien en bas de l’une d’entre elles !

One more thing…

On s’en doutait, Nintendo n’est pas venu les mains vides, et nous en a dit un peu plus sur le prochain DLC de Breath of the Wild. Le scénario inédit « L’Ode aux Prodiges », prévu pour la fin de l’année, concentre en effet toutes les attentes et commence à se préciser. Dans un très court extrait d’une petite quinzaine de secondes, on a pu apercevoir la princesse en pleine ascension de la montagne de Lanelle, escortée par les quatre Prodiges. Un second plan la montrait dans la salle du trône des Gerudo. Si Zelda semble plus que jamais au centre de l’intrigue, Aonuma a néanmoins tempéré les ardeurs de la foule : elle ne sera – hélas – pas jouable !

Petit bonus de fin, Link bénéficiera de nouveaux costumes : dont le premier n’est autre que le t-shirt bleu que Link arborait dans… The Wind Waker !

Visuels : Nintendo

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Animateur de HyperLink et Rédacteur-en-chef Pop Culture, spécialiste en univers virtuels et jukebox itinérant.
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