Il est midi et demi devant la bibliothèque Landowski à Boulogne-Billancourt. Près de l’entrée trône un piano droit en bois clair, décoré d’« hommes en blanc ». Une jeune fille brune, assise au clavier, y laisse courir ses doigts. Elle a l’air d’une délicate poupée mais chante avec une voix forte et posée, à la fois douce et affirmée. Peu à peu, la foule se rassemble autour d’elle, comme hypnotisée. Des employés profitant de leur pause déjeuner en musique, dégustant, leur sandwich au son de reprises de Kavinsky, Peter Peter ou encore Foster the People ; une mère de famille et ses deux fillettes revenant de la boulangerie, s’arrêtant un instant, subjuguées ; un jeune, casquette à l’envers, moins familier de ce style musical mais qui pourtant retire son casque… Même un bureaucrate en costume-cravate, sacoche à la main et téléphone pendu à l’oreille qui passait par là, suspend son appel pour écouter la mélomane demoiselle. Réunir divers horizons, plusieurs visages et différents âges autour d’un piano. C’est ça la magie de Play Me, I’m Yours…
Un succès qui dure et assure
Ce projet, initié en 2008 par le plasticien anglais Luke Jerram, prend aujourd’hui vie dans presque une quarantaine de pays. Paris, mais aussi Londres, New York, Barcelone, Genève et Sydney… au-delà des frontières, cette expérience originale met la musique et l’art au cœur de la ville, terrain bitumé où la poésie fleurit parfois. Débutée le 25 juin dernier et durant jusqu’au 10 juillet, que le temps soit pluvieux ou ensoleillé, la troisième édition française de cette opération musicale se tient sur les sites les plus touristiques, les places les plus mythiques et populaires, ainsi que dans les plus beaux parcs et jardins de la capitale. Attendue par un public de fidèles acquis année après année, Play me I’m yours « est clairement devenu un rendez-vous estival », s’enthousiasme Mathilda, de l’agence Community chargée de la communication et de la coordination du projet.
Disséminés aux quatre coins de la planète, les « pianos street » de Play me I’m yours invitent, comme l’explicite le slogan, les passants à faire partager leur émotions musicales.
Play me I’m yours : dénicheur de talents
Durant ces deux semaines, musiciens amateurs et professionnels ont donc le loisir de jouer sur des pianos –fournis par le Centre Chopin, l’un des partenaires de Play me I’m yours– customisés par des artistes de renom. Parmi eux, Jérôme Mesnager, qui a personnalisé avec ses silhouettes blanches, mi-spectres mi-squelettes, le piano sur lequel jouait Clarisse lors de son micro-concert devant la bibliothèque Landowski. Cet artiste est réputé dans son milieu pour avoir été l’un des premiers peintres urbains, précurseur du « street art ». Et pour avoir participé à des projets connexes tels que des pochettes d’album pour La Rue Kétanou. Mais sa vraie signature, sa patte esthétique, ce sont indéniablement ces « corps blancs », « symboles de lumière, de force et de paix » inventés en 1983, et qui se retrouvent à présent dans le monde entier, des quartiers de Paris à la Grande Muraille de Chine.
Play Me I’m Yours est donc l’occasion de découvrir des virtuoses peu connus hors de leur sphère artistiques mais qui pourtant gagneraient à l’être. Comme c’est le cas de Clarisse, la jeune musicienne qui enchantait le public devant la bibliothèque Landowski.
Clarisse, génie à ses prémices
Après un concert d’une demi-heure, Clarisse, la gagnante du concours Play Me I’m Yours se confie, souriante. Elle révèle qu’elle a choisi elle-même la playlist qu’elle vient d’interpréter, à laquelle elle a intégré deux de ses compositions : Fous Moi la Paix et In Your Arms (à écouter ci-contre et à retrouver sur sa page Facebook https://www.facebook.com/ClarisseMusicOfficial?fref=ts). Une artiste complète donc, qui vit sa passion du piano depuis l’âge de six ans : la sonorité de celui-ci, sa chaleur, reste selon elle, l’instrument qui accompagne le mieux sa voix. Preuve de sa grande maturité artistique, elle a également fait le conservatoire de Versailles et y a même reçu le prix piano en 2010. Elle a ensuite parfait son éducation musicale avec trois ans de violon et des cours de chant il y a quelques mois seulement. Un amour inconditionnel pour la musique que Clarisse voit comme un moyen de s’évader. De tout lâcher. « Je suis plutôt quelqu’un de réservée dans la vie, et là, c’est vraiment un moyen de m’exprimer et de faire partager des émotions avec un public. Le principal c’est quand on sort d’un concert et qu’on me dit « j’ai presque eu envie de pleurer en t’écoutant. Cela me fait tellement plaisir de procurer des émotions et de communiquer avec un public, c’est vraiment ça qui me tient le plus à cœur », reconnaît la jeune musicienne.
Caroussel – reprise de Peter Peter par Clarisse
Fous-moi la paix – composition originale de Clarisse
In your arms – composition originale de Clarisse
Forte de toutes ces nouvelles aptitudes, Clarisse a donc tenté le concours Play Me I’m Yours organisé, entre autre, par le Crédit Mutuel, sur sa plateforme musicale « Refix ». Il suffisait d’envoyer une vidéo de soi jouant au piano et c’est là que Clarisse, en un simple clique, a été remarquée puis sélectionnée. Notamment pour prendre part à l’important concert de la fête de la musique, le 21 juin, faisant ainsi la première d’un concert organisé au jardin du théâtre Marigny vers les Champs Elysée. Et auquel participaient aussi de grands groupes tels que Griefjoy, ALB et Jeanne Cherhal, que Clarisse a pu admirer avec plaisir à la suite de sa préstation. Aujourd’hui, le dernier concert de Play Me I’m Yours clôturera le projet aux Vedettes de Paris, vers le Pont de Suffren, notamment avec la participation d’Al.Hy de The Voice et Valentina Lisitsa, pianiste qui soutient tous les ans l’évènement.
Cette année encore, Play me I’m yours n’a fait aucune fausse note et reviendra donc l’été prochain. En attendant, rendez-vous sur leur site : http://www.streetpianos.com/ ou https://www.facebook.com/playmeparis?fref=ts
Manon Labat et Clotilde Gaillard