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NORD : « Montrer les failles, c’est ce qui m’intéresse »

INTERVIEW. Après dix ans à jouer en groupe, NORD s’est lancé en solo et ça lui a réussi ! Il nous présentait récemment « Elle voudrait », le premier single d’un premier album « Le Grand Turnover » à paraître à la rentrée. Rencontre avec un artiste touchant et mélancolique qui malgré les épreuves s’est toujours accroché à son rêve.

Qu’est-ce qui t’a poussé à arrêter ton groupe pour te lancer dans un projet solo ?

Les groupes dans lesquels je jouais ont fini par se casser un peu la gueule, on a commencé à vieillir et à vouloir prendre des chemins différents. J’avais envie de faire un truc solo et de continuer à faire de la musique avec mes propres chansons que je faisais déjà tout seul chez moi sur le logiciel FL mais que je ne jouais pas.

La transition n’a pas été trop dure ?

Quand je me suis trouvé tout seul chez moi, je me suis dit qu’il fallait trouver des solutions. Travailler seul m’a permis d’aller plus vite et de découvrir de nouvelles sonorités, ça m’a permis de mettre un pied dans l’électro, chose que je n’avais jamais vraiment fait jusqu’alors. Avant, je faisais plutôt du rock et de la folk et puis j’écoutais pas mal de chansons françaises. Balancer des samples plutôt que de commencer par un riff de guitare ou une mélodie, c’était pour moi un champ des possibles qui s’ouvraient. Après je suis un bidouilleur, pas un gros technicien, hein ! Ce qui m’intéresse c’est de faire des bidouillages, de chercher des associations auxquelles je n’aurais jamais pensé.

En solo, tu as atteint un succès jamais atteint par tes autres groupes…

Je commence à toucher mon rêve du bout des doigts, oui. Avec mes groupes, on était dans un truc plus indé, on faisait la promo nous-mêmes avec des potes, mais il n’y avait pas eu ce déclic de faire écouter nos musiques dans une maison de disque. Quand je me suis retrouvée solo, c’est là que j’ai eu envie de rencontrer un éditeur, de faire connaître mes chansons, c’est comme ça que je suis allée à Paris faire mes premières maquettes chez un pote qui avait un studio à Bastille. Il m’a dit « si t’as envie de faire écouter tes chansons, on va le faire » !

Tu perces à l’âge de 35 ans, on peut dire que t’as vraiment persévéré pour atteindre ton rêve !

Ouai, je m’accroche, je gravis les échelons. J’apprends au fur et à mesure, il y a des choses que je ne savais pas faire avant.

Pendant une période, tu as enchaîné les petits boulots comme gardien d’église, comment tu as été amené à faire ça ?

À l’époque, j’ai eu une période assez compliqué, du coup je faisais de la musique mais je n’avais pas de revenus et j’ai donc fait plein de petits boulots à la con. Et un jour à Rouen, qui est quand même la ville aux cent clochers, la mairie a décidé d’ouvrir les sites pour les touristes. Il fallait des gardiens pour les accueillir. Je me suis retrouvé à garder des églises pendant cinq ans. Parfois, je me retrouvais des jours entiers au fin fond d’une église à écrire. Par exemple « Temps mort » je l’ai écrite là-bas et pour le clip, on a décidé de tourner dans une église à Rouen. Ça a été des années assez cheloues de solitude mais à la fois de création. En étant gardien d’église, je trouvais un boulot qui me permettait de lire beaucoup et d’écrire, je faisais aussi des dessins et je préparais des expos avec mon collectif dans les églises.

Comment tu t’es sorti de la galère ?

Un pote ingé son avec qui j’avais toujours gardé contact m’avait dit « si un jour tu as du temps tu viens dans mon studio à Bastille », c’était y a 5 ans de cela. Moi je venais de province, je ne connaissais personne et je n’avais pas la prétention d’aller voir des gens. Il m’a dit qu’il en connaissait et qu’il pouvait en ramener en studio. Pendant 6 mois on a travaillé, on n’a rien lâché. Et puis j’ai bien été accompagné en région aussi, j’ai pu avoir accès notamment à des studios gratuitement.

Pour en revenir à ton univers, tu dis dans une interview que tu as tendance à voir les choses de manière négative. Quand tu écris, est-ce que tu refrènes ce côté-là ?

Parfois, je me censure un peu oui. J’aime bien ce côté mélancolique. Montrer les failles, c’est ce qui m’intéresse.

Ce sont tes failles ou aussi celles des autres que tu aimes mettre en musique ?

Je suis parti de moi, du « je », mais maintenant j’essaie de changer de pronom ou de point de vue. Je peux parler de choses que j’ai pu entendre aussi.

Dans le contexte politique actuel, est-ce que c’est important pour toi en tant qu’artiste de parler de certains sujets ?

Oui en ce moment, il y a cette cassure que je suis en train de mettre en forme mais c’est hyper dur. Pourquoi on en est arrivés là ? C’est ça que je n’arrive pas à comprendre encore… Peut-être qu’on va être tous atteints d’une manière ou d’une autre, on l’est déjà d’ailleurs… La vie est différente aujourd’hui je pense. Je trouve ça un peu trop frais. J’aime bien avoir un laps de temps quand j’écris une chanson pour savoir si ça tient la route. C’est difficile d’aborder certains thèmes. Je préfère encore proposer une autre porte de sortie pour se dégager de la réalité. Je me situe pas dans quelque chose de trop engagé parce que j’ai peur de dire des conneries. Je ne suis pas assez politisée pour avoir cette vision-là. Je préfère construire mon univers et faire des références plus implicites dans mes textes. Je n’aime pas faire la morale.

À travers tes chansons, on sent une forme d’engagement, idem quand tu chantes sur scène. En concert, tu te transcendes totalement !

Sur scène, il faut donner sa musique le plus honnêtement possible, même si c’est dur parfois d’oser lâcher prise. Mais je pense qu’il faut prendre le risque !

Si je te dis Louise Attaque et Noir Désir, ce sont des références qui te parlent ?

Oui bien sûr ! Noir Désir c’est un des premiers albums que j’ai acheté. En ce qui concerne Louise Attaque je me suis retrouvé à faire leur première partie cette année. Ils m’ont super bien accueillis, c’était incroyable !

Tu fais d’ailleurs un peu le lien entre cette scène rock française et une scène plus électro.

En ce moment je me prends la tête sur des vieux sons de synthé, j’essaie de récupérer ces sons pour les traiter différemment pour voir comment ça match avec un son de table que j’aurais mixé ou autre. J’essaie plein de trucs, je ne m’interdis rien. C’est une question d’habillage. J’aime bien essayer de trouver quelque chose d’hybride, c’est ce qui m’excite en fait.

Tu as une formation de musicien ?

Non je suis totalement autodidacte. C’est pour ça que Nirvana a été une révélation, ils ont montré qu’on pouvait faire de la musique sans vraiment connaître les accords. Avec eux, y’avait cette notion de « faire ». Dans ma famille, à part ma sœur, on n’écoutait pas de musique. Ma sœur écoutait les Beatles, The Doors, Brassens, Brel… C’est grâce à elle que ma culture musicale a commencé à se faire. J’ai écouté beaucoup Nino Ferrer aussi. Ce qui m’a fait apprendre la musique, c’est de jouer avec d’autres gens. En ce qui concerne le chant, au début, je chantais super mal mais j’avais envie de chanter.

« Elle voudrait », c’est le single de l’album, en quoi est-il annonciateur du « Grand Turnover » ?

 « Elle voudrait », c’est une belle porte d’entrée. J’ai des chansons très pop colorées un peu naïves comme celle-ci mais j’ai aussi des choses plus dark bien qu’un peu dansantes. J’aime ce mélange. J’ai pas envie de plomber l’ambiance et je trouvais qu’ « Elle voudrait », c’était un moyen plus accessible de rentrer dans l’univers de l’album.

Quels sont les thèmes que tu vas aborder ?

L’album parle à la fois d’émancipation, de recherche, de ce sentiment d’être coincé quelque part, de tristesse mais aussi de fausses joies, d’amour qui part et qui revient et de résistance.

Dans une interview récente, Fishbach nous disait qu’à travers ses chansons, elle s’était réconciliée avec certaines choses de son passé. Est-ce que ça a été le cas pour toi aussi ?

Oui peut-être… C’est plutôt un moyen de lâcher prise comme tu le fais sur scène. Tu écris des chansons parfois pour décrire quelque chose d’incompréhensible que tu n’arrives pas à cerner. Pas mal de chansons partent juste d’une émotion ou d’un constat… Je me dis que peut-être que si j’ai ressenti certains choses, tu as pu les ressentir toi aussi.

NORD jouera en concert le 14 juin aux Etoiles, alors dépêchez-vous de prendre vos places !

Page Facebook de NORD.

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