A 95 ans, le parrain de Radio VL, Stéphane Hessel, est décédé ce matin dans son sommeil comme l’a confirmé son épouse, Christiane Hessel-Chabry. Homme de droit, engagé, et connu pour le succès mondial de son pamphlet « Indignez-vous », il nous laissera à tous un souvenir impérissable.
Au cours de sa longue vie, Stéphane Hessel a été un globe-trotter aguerri né en Allemagne en octobre 1917 à Berlin, naturalisé français et parlant couramment anglais, allemand et donc, français. Comme il aimait le rappeler, Hessel est né « l’année de la révolution soviétique » de parents juifs convertis au luthéranisme. Arrivé en France en 1925, naturalisé en 1937, cet intellectuel européen a étudié à Normale Sup à partir de 1939 avant d’être mobilisé pour la seconde guerre mondiale. Fait prisonnier, il réussit à s’évader et rejoint le général De Gaulle à Londres. Stephane Hessel fut ensuite renvoyé en France en 1944 avant d’être de nouveau arrêté puis déporté à Buchenwald, un camp de concentration nazi près de Weimar. Cet amoureux de Sartre réussit une nouvelle fois à s’évader jusqu’à rejoindre les troupes américaines et arriver à la Gare du Nord en mai 1945 à l’heure de la Libération.
Libre, Hessel rejoint le secrétariat général de l’ONU et participe aux réunions de la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l’homme aux côtés de René Cassin, devenant un diplomate français reconnu. A son accession au pouvoir en 1981, François Mitterand n’hésite donc pas à le choisir comme ambassadeur. Il devient alors un chevalier sans faille des déracinés du pays, des sans-papiers comme lors de l’occupation de l’église Saint-Bernard de Paris de quelques 200 africains privés de droits de séjour où il interviendra en tant que médiateur. Toute sa vie, son combat contre l’injustice, l’oppression et les inégalités sociales seront sa soif de vivre.
Combattant international, Stéphane Hessel prendra également position pour les Palestiniens dans le conflit avec Israël provoquant les foudres des associations juives. Nommé grand officier de la Légion d’Honneur en 2006, Hessel marqué le monde par son caractère de gentleman indigné face au monde. Ecrivain-poête, il publie en 2006 O ma mémoire : la poésie, ma nécessité où il citera avec à propos Baudelaire ou encore Verlaine. Mais cet amoureux de la poésie a également appris beaucoup de ses expériences politiques. Après avoir suivi Pierre-Mendés France, il soutiendra Rocard en 1985 avant de revenir sur le devant de la scène en 2012, apportant son soutien au candidat Hollande. Après s’être présenté comme inéligible sous la ligne Europe-Ecologie, Stéphane Hessel s’est penché, a écrit, s’est confié. Et Indignez-vous apparu. Publié en octobre 2010, ce manifeste est devenu un modèle de protestations, comme en Grèce ou en Espagne où des protestants n’hésite pas à lever l’ouvrage pour appuyer leurs revendications. Ecoulé à plus de deux millions d’exemplaires depuis sa sortie, Indignez-vous a été diffusé dans pas moins de 32 pays, en 34 versions.
Stéphane Hessel aura mené son combat jusqu’au bout. En septembre dernier, il donnait des conférences en Espagne (Madrid, Barcelone) pour expliquer sa thèse, avant de commémorer les attentats du 11 septembre en Slovénie auprès de son ami, Milan Kucan ancien chef d’état. Hessel s’est ensuite rendu à l’ONU pour soutenir l’adhésion de la Palestine. Depuis d’autres ouvrages sont sortis comme Engagez-vous, une suite à son premier pamphlet, Un chemin d’espérance sorte de dialogue avec Edgar Morin où il entendait développer « une voie politique du salut public« . Une biographie de Stéphane Hessel est sortie en octobre dernier, Tous comptes faits.. ou presque déjà vendue à plus de 100 000 exemplaires.
Ces dernières volontés dictées dans Indignez-vous raisonnent encore dans chacune de nos têtes : « Il nous appartient de veiller tous ensemble à ce que notre société reste une société dont nous soyons fiers : pas cette société des sans-papiers, des expulsions, des soupçons à l’égard des immigrés, pas cette société où l’on remet en cause les retraites, les acquis de la Sécurité sociale, pas cette société où les médias sont entre les mains des nantis, toutes choses que nous aurions refusé de cautionner, si nous avions été les véritables héritiers du Conseil National de la Résistance« .