Ce sera l’un des événements de ce mois de décembre : l’adaptation en un unitaire du roman de Flaubert, baptisé sobrement pour l’occasion Emma Bovary.
C’est quoi Emma Bovary ? 1857. Tribunal. L’accusation et la défense sont prêts à s’affronter. Au milieu, Flaubert. C’est son procès. Madame Bovary est jugée coupable pour outrage à la morale publique et religieuse. La plaidoirie débute, puis le roman prend vie. L’histoire d’Emma se déploie sous nos yeux. Le procès nous ramène à la réalité par interstice et anime le débat sur la condition des femmes à cette époque. Quelle sentence pour Flaubert ? Quelle sentence pour elles, pour toutes les Emma ?
« C’est nous qui avons tué Emma Bovary. Nous tous messieurs ! »
A l’occasion du bicentenaire de la naissance de Gustave Flaubert, France 2 propose le 13 décembre prochain de revenir sur un épisode de sa vie que sans doute on connaît un peu moins à savoir le procès qui lui fut attenté pour avoir écrit le roman Madame Bovary, jugé pour outrage à la morale publique et religieuse. Une époque où l’on juge les œuvres d’art et où on essaye de les faire interdire pour ce qu’elles disent nous parle forcément, tant on a parfois l’impression que l’Histoire se répète.
« La postérité vous jugera Monsieur Flaubert » assène le procureur à l’issue du procès qu’il perd contre l’auteur. Et il a en quelque sorte raison car la postérité a fait de ce roman l’un des plus grands de toute la littérature française. Au travers de ce qui est reproché à l’écrivain, c’est aussi l’occasion d’adapter le roman et de raconter l’histoire de cette femme qui mourut d’avoir trop voulu vivre sa vie de femme, de ne pas être seulement ce qu’on voulait qu’elle soit. C’est aussi l’occasion de faire le procès d’une société patriarcale dirait-on aujourd’hui mais qui en tout cas permet aux hommes de tout faire et l’interdit aux femmes qui voudraient faire la même chose.
Dans son écriture et sa mise en scène (autrices : Natalie Carter et Eve de Castro / réalisateur : Didier Bivel), le procès de Flaubert est d’une modernité incontestable et chaque mot pourrait être transposé de nos jours. L’adaptation de Madame Bovary a quant à elle su conserver l’aspect romantique de son histoire comme le rappelle les productrices de ce sublime film, Marie Dupuy d’Angeac et Laurence Bachman : « Nous avons imaginé un film romantique, au sens originel du mouvement littéraire du XIXe siècle, qui se nourrissait d’histoires humaines, à la fois belles et tragiques. Le personnage d’Emma incarne au mieux ce mouvement, animé du désir de vivre une autre vie que celle qui lui est assignée« .
Et l’on redécouvre (pour certains sans doute « on découvre ») la puissance du roman de Flaubert se battant ainsi contre son temps et pour toutes les femmes, pour toutes les « Emma Bovary ». Portée par la sublime musique de Nicolas Errera, cette adaptation n’a rien du côté ampoulée de beaucoup de fictions en costumes et soutient à chaque instant la puissance émotionnelle du roman de Flaubert. Cette héroïne tragique est si magnifiquement bien incarnée par la remarquable Camille Metayer qui donne à ce personnage toute la candeur et la force dont elle a besoin. A ses côtés, Thierry Godard confirme sa stature de très grand en offrant toute la rondeur et la chaleur nécessaire à cet émouvant Charles Bovary, le seul qui aima sincèrement Emma. A leurs côtés, on notera aussi la très juste partition de Gregory Fitoussi qui campe un Rodolphe usant et abusant de sa position envers Emma.
Emma Bovary est une magnifique fiction qui adapte de la plus moderne des manières qui soit l’un des plus grands romans français. Une vraie réussite !