Après une première saison surprenante, The Bear se surpasse avec une succession d’épisodes quasiment parfaits.
C’est quoi, The Bear (saison 2) ? Carmy (Jeremy Allen White) a décidé de fermer le steakhouse que lui a laissé son frère à sa mort pour ouvrir à la place The Bear, un restaurant gastronomique. Encore faut-il de l’argent, et Carmy se tourne vers l’oncle Jimmy (Oliver Platt), mafieux notoire, qui accepte de lui prêter la somme nécessaire à une condition : il veut être remboursé d’ici 18 mois, faute de quoi il prendra possession du bâtiment pour le revendre. Le compte à rebours est lancé, il faut ouvrir et dégager des bénéfices au plus vite. Un challenge professionnel mais aussi personnel pour Syd (Ayo Edebiri), le cousin Richie (Ebon Moss-Bachrach), Marcus (Lionel Boyce), Tina (Liza Colon-Zayas) ou Carmy lui-même. Tous vont devoir repousser leurs limites et se remettre en question.
Lancée sur FX en 2022, The Bear a créé la surprise et n’a pas tardé à faire le buzz grâce au bouche à oreille, avant d’être récompensée par de nombreux prix et classée dans toutes les listes des meilleures séries de l’année. De quoi rendre encore plus délicat l’exercice de la deuxième saison, mais c’est un défi que son créateur Christopher Storer – avec désormais Joanna Calo comme co-showrunner – relève avec brio. Tellement, en fait, que ces huit nouveaux épisodes (à partir du 16 Août sur Disney+) frôlent la perfection.
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L’idée qui sous-tend cette deuxième saison est aussi simple qu’efficace : elle raconte les préparatifs de l’ouverture du restaurant The Bear à la manière d’un véritable thriller, rythmé par le leitmotiv « Chaque seconde compte », affiché sur le mur de la cuisine et répété à de multiples reprises. Chaque épisode s’ouvre par un compte à rebours décomptant les jours avant l’inauguration, où l’on suit l’équipe face à toutes les difficultés imaginables : travaux, financement, demande de licences, création de la carte, recrutement du personnel, inspections de sécurité… La tension constante est quasiment palpable, à mesure que surgissent des contretemps, déconvenues, disputes etc. Comme dans la saison précédente, on crie et on s’engueule beaucoup ; comme dans la saison précédente, on a droit à des dialogues enfiévrés, au stress permanent des protagonistes mais aussi à un humour inattendu, à une bande-son phénoménale (Brian Eno, les Pixies, REM, Wilco), et à des scènes de cuisine qui vous font prendre trois kilos rien qu’à les regarder.
Mais dans le même temps, la série se renouvelle de deux manières. D’abord, en sortant des cuisines où elles avait cantonnés ses personnages, créant ainsi une ambiance moins claustrophobe ; ensuite, en s’appuyant justement sur ces personnages, avec plus de douceur, d’empathie et de mélancolie. Chacun a droit à son petit moment de gloire, y compris et peut-être surtout les seconds rôles ; chacun ou presque est au centre d’une épisode, de sorte que The Bear devient une série chorale voire presque familiale.
Face au nouvel objectif, chacun doit s’adapter, apprendre de nouvelles compétences, se remettre en question et accepter de se reposer sur les autres. Pour la plupart d’entre eux, cela implique de sortir de sa zone de confort. Tina prend des cours de cuisine gastronomique ; Marcus quitte un temps sa mère malade pour aller à Copenhague afin d’élaborer la carte des desserts ; en plein divorce et en pleine crise existentielle, Richie effectue un stage dans un grand restaurant au cours d’un septième épisode magistral ; submergée par sa peur de l’échec, Sydney écume les restaurants de Chicago pour « réinitialiser » son palais… Et Carmy, qui se débat toujours avec les traumatismes familiaux, cherche un équilibre entre sa vie professionnelle et sa vie personnelle en particulier en renouant avec son ancien béguin de lycée, la jolie Claire.
Les traumatismes familiaux, justement, sont au cœur d’un épisode très particulier, le sixième, qui dure une heure (contre une trentaine de minutes pour les autres). Avec Fishes, The Bear ouvre une parenthèse en forme de flash-back : la famille Berzatto est réunie pour le repas de Noël organisé par la mère de Carmy (une Jamie Lee Curtis stellaire), qui va virer au cauchemar. Un épisode qui pourrait parfaitement se regarder comme un petit film, mais qui s’insère parfaitement dans la série . En plus d’une écriture maîtrisée, cet épisode est servi par une brochette de guest stars réjouissantes (on vous laisse le plaisir de les découvrir) et il explicite surtout la dynamique familiale dysfonctionnelle, l’accumulation de tensions, de ressentiments et de crises de nerfs qui nous aide à comprendre pourquoi Michael a mis fin à ses jours, pourquoi Richie semble toujours en colère et pourquoi Carmy est aussi fragile.
Si The Bear peut approfondir ses personnages et creuser leur caractère et leur psychologie, c’est aussi grâce à ses acteurs. Il y a déjà une alchimie épatante entre tous les comédiens, toutes les interactions sont puissantes et on se sent happé dans la dynamique qui s’est instaurée entre eux. Pris indépendamment, chacun chaque comédien parvient à incarner son personnage en embrassant les fragilités qui composent leur rôle sans tomber dans le pathos. On aurait envie de tous les citer, mais on retiendra surtout deux noms : Ebon Moss-Bachrach, qui mérite tous les éloges pour la finesse dont il s’empare du personnage complexe de Richie, et bien évidemment Jeremy Allen White, exceptionnel, qui vise tellement juste dans son interprétation de Carmy qu’on a l’impression de souffrir, d’angoisser, d’aimer, de se perdre avec lui. Jusqu’à une ultime scène dévastatrice – dont nous ne dirons évidemment rien.
Série 5 étoiles, The Bear est toujours aussi délicieuse. Sans dénaturer ses thèmes et son ambiance, elle plonge plus profondément dans les personnages à mesure qu’ils se débattent pour ouvrir leur restaurant… et pour trouver un équilibre personnel. Avec cette deuxième saison, la série respecte la recette de son succès tout en y ajoutant de nouveaux ingrédients : entre saveurs douces-amères, touche de sucré et parfois un goût plus épicé. On se régale et on demande du rab.
The Bear
Saison 2 – 8 épisodes de 35 à 60′
Le 16 Août sur Disney +.