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On débriefe pour vous … Le président foudroyé, une tragédie américaine oubliée

Dans Le président foudroyé, les destins d’un homme politique idéaliste et d’un fanatique obsessionnel se croisent, jusqu’à la tragédie. 

C’est quoi, Le président foudroyé ?  Au début des années 1880, James Garfield (Michael Shannon) est un modeste sénateur de l’Ohio, idéaliste mais sans réelle ambition personnelle. À la surprise générale, ses pairs le choisissent pour représenter le parti républicain lors de l’élection présidentielle. Bien que réticent, Garfield accepte, avec un projet : éradiquer la corruption au sein du gouvernement et redonner ses lettres de noblesse à la fonction publique, au grand dam d’un parti divisé et d’hommes politiques profitant du système de favoritisme qu’il cherche à démanteler.
Dans le même temps, Charles Guiteau (Matthew Macfadyen) est un petit arnaqueur aspirant journaliste, rongé par des rêves de grandeur. Persuadé que le destin l’a choisi pour servir le président, il voit sa soif de reconnaissance se muer en frustration, puis en haine. Jusqu’à commettre l’irréparable. 

Créée par David Benioff et D.B. Weiss (Game of Thrones), d’après le roman de Candice Millard, la mini-série Le président foudroyé éclaire, en quatre épisodes intenses, une page sombre de l’histoire américaine : l’assassinat du vingtième président des États-Unis, James A. Garfield. Comme l’annonce l’introduction : « Voici l’histoire vraie de deux hommes que le monde a oubliés. L’un était le vingtième président des États-Unis. L’autre l’a abattu. » 

Entre récit historique, chronique politique et drame psychologique, la série met en lumière les ressorts intimes de l’assassin et de sa victime mais aussi l’instabilité d’un système démocratique à ses balbutiements. 

Les destins croisés de Garfield et Guiteau

Au cœur du récit, deux hommes destinés à se rencontrer, l’un guidé par son intégrité, l’autre par son obsession, jusqu’à la conclusion tragique connue dès le début.

James Garfield (excellent Michael Shannon) est un homme qui n’a pas recherché le pouvoir, mais qui l’a accepté lorsqu’il y a été poussé. Vétéran de l’Union, professeur et sénateur de l’Ohio, indépendant de toute faction, Garfield est dépeint comme une figure réservée, sans ambition personnelle mais dotée d’un sens moral et politique qui le pousse à prendre les rênes d’une nation en crise d’identité. La série le suit durant les quelques mois qui séparent sa candidature présidentielle inattendue de son assassinat.

Face à lui, Charles Guiteau (Matthew Macfadyen, vu dans Succession, exceptionnel), à la fois tragi-comique et inquiétant, oscille entre délires de grandeur, mythomanie, soif de reconnaissance et fanatisme. Évangéliste raté, repris de justice, journaliste médiocre et narcissique persuadé d’être chargé d’une mission divine, Guiteau n’est pas qu’un meurtrier : il est le produit d’une Amérique obsédée par la réussite individuelle. Sa relation avec Garfield, bien que ténue dans les faits, repose sur une tension idéologique et spirituelle qui explose dans le dénouement.

Le président James Garfield…

Au-delà de la politique : obsession, foi et destin 

La série dépeint un système politique cynique, corrompu et divisé, incarné par le vice-président Chester Arthur (qui succédera à Garfield) et le sénateur Roscoe Conkling : deux visages d’un Parti républicain  en proie à des luttes intestines et d’un contexte politique divisé où s’affrontent idéalisme et favoritisme, et où même le président le plus intègre doit composer avec les compromis, les tensions et les trahisons. 

Mais Le président foudroyé ne se contente pas de relater un événement historique. Elle explore deux thèmes intimement liés : la foi et l’obsession. Garfield incarne une conception laïque de la mission politique, un progressisme lent mais constant qui vise à réorienter l’intérêt public, de la division vers le progrès. Guiteau, quant à lui, incarne l’individu qui se sent abandonné par l’Histoire et tente de s’y réinsérer de force, par un acte violent, convaincu que Dieu lui-même le lui a ordonné. Dans cette série, la foi n’est jamais neutre : elle est à la fois moteur, outil et alibi. Mais elle est aussi le miroir d’une société où la frontière entre croyance en un destin et ambition personnelle s’estompe. 

Une tragédie américaine refoulée.

Le  nom de Garfield apparaît rarement dans les manuels scolaires ou les débats publics, si ce n’est en note de bas de page. Le président foudroyé restitue non seulement son rôle, mais aussi la complexité de son époque. 

… et son assassin, Charles Guiteau

Son assassinat n’était pas seulement l’acte d’un fou ; c’était aussi et peut-être surtout la conséquence d’un système fragile et instable, d’une idéologie devenue folle, d’une société en plein chaos. Son histoire est un avertissement sur le prix de l’ambiguïté démocratique, sur l’incapacité des institutions à protéger ceux qu’elle sert en raison du favoritisme partisan et des intérêts personnels, sur la frontière ténue entre héros et martyr, patriote et fanatique. 

En mettant en scène une histoire du XIXe siècle, la série résonne aussi avec le présent. Elle le fait avec un style tendu mais humaniste, démontrant que le pouvoir n’est jamais une simple question de postes : c’est un champ de bataille entre visions du monde, entre ceux qui croient au changement démocratique et ceux qui cherchent à imposer leur propre intérêt. 

Garfield et Guiteau, de manières opposées, sont deux reflets déformés d’un même rêve américain. À une époque où la politique est de plus en plus un spectacle et de moins en moins un projet, Le président foudroyé offre une réflexion sans fard sur le véritable coût du pouvoir et la folie qui peut naître de convictions excessives ou illusoires.  Cette double tragédie – humaine et institutionnelle – révèle un pays pris au piège entre progrès et ignorance, entre raison et folie. 

En redonnant chair à James Garfield et à Charles Guiteau, Le président foudroyé fait plus qu’exhumer un drame oublié : elle interroge la part d’irrationnel et de croyance qui persiste au cœur du pouvoir. À travers le face-à-face entre l’idéaliste et le fanatique, la série dévoile une Amérique qui se cherche encore, tiraillée entre foi et raison, entre ambition collective et culte de l’individu. Et c’est peut-être là que réside sa force : nous rappeler que les foudres de l’Histoire frappent toujours deux fois — d’abord les hommes, puis les idées qu’ils incarnent. 

Le président foudroyé
4 X 50′ environ
Sur Netflix.

About author

Traductrice et chroniqueuse, fille spirituelle de Tony Soprano et de Gemma Teller, Fanny Lombard Allegra a développé une addiction quasi-pathologique aux séries. Maîtrisant le maniement du glaive (grâce à Rome), capable de diagnostiquer un lupus (merci Dr House) et de combattre toutes les créatures surnaturelles (vive les frères Winchester), elle n'a toujours rien compris à la fin de Lost et souffre d'un syndrome de stress post-Breaking Bad
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