À la uneSéries Tv

On débriefe pour vous … The Fall, Gillian Anderson à la poursuite d’un tueur en série

En attendant la version française bientôt diffusée sur TF1, retour sur The Fall. Une série remarquable, aussi palpitante qu’éprouvante.

C’est quoi, The Fall ? Spécialisée dans les sciences du comportement, l’inspectrice Stella Gibson (Gillian Anderson) est dépêchée à Belfast pour enquêter sur une série de meurtres apparemment sans lien entre eux. Elle comprend cependant que derrière tous ces assassinats se cache un seul et même tueur. En l’occurrence, nous connaissons son identité : il s’agit de Paul Spector (Jamie Dornan), un père de famille au-dessus de tout soupçon qui s’introduit chez des jeunes femmes, qu’il viole avant de les étrangler. Stella s’engage alors dans la traque du tueur.

Avec Emmanuelle Seigner et Melville Poupaud dans les rôles principaux, c’est sous le titre Insoupçonnable que TF1 s’apprête à lancer son remake de The Fall, excellente série britannique créée par Allan Cubitt. Si l’histoire – la traque d’un tueur en série – semble basique, c’est dans sa mise en œuvre et dans tout ce qu’elle raconte en arrière-plan que The Fall se démarque. Pour commencer, l’enjeu ne réside pas dans l’identité du coupable (connue dès le départ), mais dans la manière dont l’héroïne va mener l’enquête et remonter jusqu’au tueur. Extrêmement bien construite, remarquablement réalisée et interprétée, cette série a surtout quelque chose de fascinant, mais aussi de profondément perturbant.


A écouter aussi : La mante avec Carole Bouquet et Fred Testot | La loi des séries #131


Emmanuelle Seigner reprend le rôle de Gillian Anderson

 

Diffusée de 2013 à 2016, The Fall comporte 3 saisons. Les deux premières se focalisent sur la traque de l’assassin, en suivant en parallèle les deux personnages principaux, qui se croisent à peine. Stella Gibson mène l’enquête en analysant minutieusement chaque détail, chaque élément des scènes de crimes pour élaborer un profil du tueur, comprendre son mode de fonctionnement, ses motivations et sa personnalité afin de l’arrêter. Ambitieuse, indépendante et sexuellement libérée (elle n’hésite pas à emmener dans sa chambre d’hôtel un jeune policier rencontré le matin même), elle s’impose dans un monde d’hommes, sans se soucier du qu’en-dira-t-on.

Stella Gibson, formidable Gillian Anderson

 

Dans le même temps, Paul Spector nous apparaît d’emblée dans toute sa dualité. Insoupçonnable (comme quoi, le titre choisi par TF1 est bien trouvé…), cet homme séduisant et avenant mène en apparence une vie tranquille de père modèle et de travailleur social. En réalité, il est l’étrangleur de Belfast. Dans un effroyable crescendo,il s’introduit au domicile de jeunes femmes, s’insinue dans leur intimité, vole d’abord des sous-vêtements avant de revenir pour violer, étrangler ses victimes et mettre leurs cadavres en scène.

Au fil des épisodes, l’étau se resserre : de petites avancées en percées décisives, Gibson finit par découvrir l’identité du tueur ; la chasse à l’homme qui en résulte se conclut sur un coup de théâtre, final de la saison 2. A partir de ce rebondissement, la saison 3 bascule dans autre chose, en explorant davantage la psychologie et les traumatismes de l’assassin mais aussi le personnage de Stella, mise en cause par les événements des deux saisons précédentes.

Paul Spector (Jamie Dornan), tueur insoupçonnable

 

L’affrontement à distance entre l’enquêtrice et le tueur sont le cœur de la série, et il est d’autant plus réussi que les deux interprètes sont époustouflants. Flamboyante, tour à tour froide et passionnée, Gillian Anderson tient avec le personnage de Stella l’un de ses meilleurs rôles ; face à elle, Jamie Dornan joue de ses airs de beau ténébreux pour camper ce tueur en série sordide caché derrière une apparente normalité. Les seconds rôles  (citons Bronagh Waugh, Aisling Franciosi, John Lynch ou  encore la géniale Archie Penjabi de The Good Wife) ne déméritent pas, bien qu’ils soient évidemment en retrait et permettent surtout d’appréhender la personnalité des deux héros dans toute leur complexité.

On a qualifié The Fall de perturbante, et pour cause. D’abord, elle possède une ambiance oppressante, dans la lignée de The Killing, avec pour cadre les banlieues grises et tristes d’une ville de Belfast sombre et froide, au ciel plombé par l’humidité et le brouillard.  Ensuite, il y a la violence de certaines scènes : violence physique lorsqu’on s’attarde sur les viols et les meurtres commis par Spector ; violence psychologique car ces séquences sont filmées dans une intimité qui fait du spectateur un voyeur consentant. D’autant que le montage établit par moments un lien sexuel particulièrement malsain entre Stella et Spector – notamment dans une scène où  Stella a  une aventure d’un soir tandis qu’en parallèle, Spector manipule le cadavre d’une de ses victimes.

Spector / Gibson : une relation perverse et dérangeante

 

Si la traque de l’assassin est le moteur de The Fall, son intérêt réside autant dans l’enquête criminelle (indéniablement réussie) que dans la relation qui s’instaure à distance entre les deux personnages principaux. Et à bien y regarder, la série prend alors une autre dimension. A travers son héroïne (indépendante et stigmatisée en raison d’un comportement qu’elle assume), et son tueur (dont les victimes sont des femmes puissantes ayant réussi socialement et professionnellement) se dessine une société intrinsèquement misogyne. En un sens, Spector n’est finalement que la manifestation paroxysmique de tout un ensemble de commentaires, de réflexions et d’attitudes qui conditionne le machisme et les violences commises à l’encontre des femmes. C’est ce qui fait que The Fall est plus qu’un excellent thriller : c’est aussi une série qui montre une vérité perturbante, dont on a pas forcément conscience ou qu’on aimerait souvent occulter.

Magistralement menée, The Fall est un thriller psychologique haletant – ce qui justifierait déjà son succès, amplement mérité. Charge lucide sur toute la violence latente ou ostensible que peuvent subir les femmes, ce polar noir n’en est que plus percutant. L’analyse et la dénonciation étaient déjà remarquables au moment de la diffusion;  après les scandales et révélations ayant suivi  l’affaire Weinstein, elles n’en sont que plus nécessaires. Nous verrons d’ici peu si l’adaptation de TF1 parvient à aborder le sujet en se nourrissant du contexte actuel… En attendant, il faut (re)découvrir The Fall, pour l’histoire passionnante qu’elle raconte et pour tout ce qu’elle dit en arrière-plan.

The Fall (RTE – BBC 2)
3 saisons.
Disponible en Blu-Ray et DVD.
Insoupçonnable – prochainement sur TF1.

About author

Traductrice et chroniqueuse, fille spirituelle de Tony Soprano et de Gemma Teller, Fanny Lombard Allegra a développé une addiction quasi-pathologique aux séries. Maîtrisant le maniement du glaive (grâce à Rome), capable de diagnostiquer un lupus (merci Dr House) et de combattre toutes les créatures surnaturelles (vive les frères Winchester), elle n'a toujours rien compris à la fin de Lost et souffre d'un syndrome de stress post-Breaking Bad
Related posts
À la uneMédiasPeoplePolitique

Pourquoi Thomas Guenolé a été mis à pied de TPMP ?

La Loi des Séries 📺Séries Tv

Cat's Eyes : "Sœurs et solidaires, sur terre ou en l'air, relevant tous les défis" | La loi des séries #794

À la uneSéries Tv

"Montmartre" : TF1 réunit un casting impressionnant pour sa nouvelle mini série

À la uneEconomie

Quel est le prix du permis de conduire en 2024 ?

Retrouvez VL. sur les réseaux sociaux