La shnek désigne le sexe féminin en argot alsacien, image provenant du mot allemand « Der Schneck », qui signifie escargot. Cette ragoutante métaphore vous plonge déjà dans l’univers poétique urbain, où les aèdes de rue à la libido émoustillée viennent se frotter à la gent féminine.
Hé madmoiselle, t’es charmante, ça t’dirait une glace à la menthe ?, disait le poète contemporain Fatal Bazooka. Au tour de Paye ta shnek de réunir les « tentatives de séduction en milieu urbain ». Ce tumblr au logo rigolo et géométriquement explicite devient aujourd’hui un livre. On y lit les trouvailles, à l’inventivité quasi-cyranesque, de l’homme de la rue-métro-bar qui, dans un élan « lyrique », parfois romantique, souvent érotique, tente (et cela reste de l’ordre de la tentative, on s’en doute) de charmer trivialement ces demoiselles.
Ce livre est fait :
– pour vous, les mâles, qui voulez pécho mais qui n’y arrivez pas. Vous trouverez dans ce livre des exemples… à ne pas suivre. Mais avouons-le, certains traits sont si saugrenus que sur un malentendu, et si votre cible a de l’humour, ça peut marcher. Dans une démarche plus sérieuse, prenez-le comme un livre d’éducation anti-macho.
– pour vous, les filles : vous vous reconnaitrez car c’est une expérience universellement féminine. Vous rirez, et vous vous offenserez. Vous trouverez ça drôle, romanesque, farfelu, courageux, maladroit, relou, dégueulasse, pervers, inadmissible.
Inadmissible ? L’été dernier, le documentaire de Sofie Peeters, intitulé « Femme de la rue », a provoqué un vrai débat de société sur ces phrases plus ou moins fines balancées quotidiennement aux femmes. Le livre dont nous parlons lui fait écho, et bien qu’amusant, il contient certains propos à la limite du harcèlement sexuel et entend lutter, simplement, contre leur banalisation. Car c’est bien la question que pose la préface du livre, rédigée par deux avocates : quelle est la frontière, si poreuse, entre dragouille et sexisme ? Entre compliment et harcèlement, juridiquement condamnable (six mois d’emprisonnement et 22 500 euros d’amende) ? Les citations sont exposées sans autre ornement qu’entourées d’un carré rose, brutes, sans commentaire, sans jugement, et leur vulgarité n’en est que plus flagrante.
Faites-vous votre propre opinion de ces quelques perles :
– « Il me semble qu’on n’a jamais fait l’amour ensemble ? »
– « Mains en l’air, contrôle de culotte ! »
– « Hey mademoiselle, vous êtes belle à un point qu’y a même plus besoin d’virgule. »
– « Je voulais rester derrière vous, mais là vous marchez beaucoup trop lentement. »
– « Hey mademoiselle, tu as les yeux verts couleur bus RATP ! »
– « Sauras-tu être sensible à la dimension vaginale de la lettre “o” chez Shakespeare ? »
– « Alors toi t’as pas une bouche à sucer que des glaçons ! »
– « Hey mad’moiselle si ça te dit j’ai des préservatifs goût Whiskas… Pour les jeunes chattes exigeantes ! »
– « Je dois vous dire que votre beauté n’égale que mon taux d’alcoolémie ».
– « Vas-y fais pas ta pute, donne-moi ton arobase ! »
– « Salutérus, ça vagin ? »
– « Ma parole mademoiselle vous êtes tellement caliente que même le piment d’Espelette il paraît fade à côté de vous. »
– « Excusez-moi, vous ne trouvez pas que ce mouchoir sent le chloroforme ? »
– « J’adore tes dents, j’en ferais bien un collier pour ma bite. »
(A l’inverse, un autre blog existe aussi, pour les filles qui veulent « draguer un coup », et renverser la tendance. : « Hé mademoiseau ! »)