Les Unes des journaux anglais du mardi 4 aout étaient plutôt explicites. Un ancien Premier ministre – aujourd’hui décédé – impliqué dans des scandales de pédophilie, des dossiers disparus et un meurtre d’enfant… L’enquête publique lancée par David Cameron, en juillet dernier, semble susciter les confessions tardives et plonge la classe politique anglaise dans la tourmente.
En juillet, le ministère de l’Intérieur britannique a reconnu la disparition de 114 dossiers qui inculpaient des figures de la sphère politique anglaise dans des réseaux pédophiles, dans les années 80 et 90. Il n’en aura pas fallu plus pour que l’on soupçonne la police de l’époque de couvrir ces hauts fonctionnaires. Edward Heath était Premier Ministre entre 1970 et 1974, puis député à Westminster, la chambre de Londres. Décédé en 2005, il est aujourd’hui au cœur du scandale. De son vivant, son nom avait déjà été associé à des plaintes ou à des témoignages dans des affaires de proxénétisme mais rien ne l’avait mis en danger. Aujourd’hui, 10 ans après sa mort, la situation est différente. Les anglais veulent connaitre la vérité et le Premier ministre la leur a promis.
Edward Heath
Crédit photo: blogs.telegraph.co.uk
L’affaire Edward Heath:
En 1961, un garçon de 12 ans vient se plaindre à la police du fait qu’il aurait été violé par le député. On le traite d’affabulateur, c’est en reconnaissant l’homme politique sur des affiches de campagnes qu’il comprendra par la suite pourquoi. La plainte n’aura pas de suite. De même, il est associé à une aubergiste condamné pour proxénétisme. Il aurait profité de l’établissement tenu par cette femme, Mme Ling-Ling Forde, pour avoir des relations sexuelles avec des mineures. Là, encore, son nom disparait du dossier lorsque Forde passe en jugement. L’enquête en cours a révélé au grand jour ces accusations alors que le Royaume-Uni s’enlise dans des scandales pédophiles. En 2012, une star du petit écran avait été jugée après sa mort pour de nombreuses agressions. Depuis, beaucoup de célébrités semblent être impliquées.
Jimmy Savile en 2007, star anglaise du petit écran, coupable de pédophilie.
Crédit photo: thirdforcenews.org.uk
Une enquête de grande ampleur:
L’enquête a donc été ouverte début juillet comme promis par le gouvernement. Et elle risque de durer plusieurs années tant les chiffres sont astronomiques. La juge en charge de ce travail de titan, Lowell Goddard, estime « qu’un enfant sur 20 en Angleterre et au Pays de Galles a été agressé sexuellement ». Et ce sont seulement les estimations. Mais la pédophilie n’est pas tout le dossier, Edward Heath et d’autres hommes politiques connus sont soupçonnés d’avoir été liés aux meurtres de 3 enfants de 7 à 16 ans. David Cameron a assuré son soutien à la police: « Je suis absolument déterminé à ce que l’on fasse toute la lumière sur ces accusations et nous allons explorer toutes les pistes pour découvrir la vérité sur ce qui s’est passé, c’est essentiel ». Il veut être sûr que les enquêteurs ne seront pas gênés dans leur travail …
I’m determined to establish the truth behind child abuse allegations & learn lessons from recent cases. Home Sec statement this afternoon.
— David Cameron (@David_Cameron) 7 Juillet 2014
Pédophilie, le mal d’une époque ?
Il n’y a pas qu’au Royaume-Uni que les années 70 à 90 ont été marquées par la pédophilie de figures politiques ou intellectuelles. En France également, plusieurs hommes politiques de l’époque assumaient cette déviance en toute impunité. Daniel Cohn-Bendit parle de son penchant pour les enfants dans son ouvrage Le Grand Bazar, publié en 1975. D’autres politiques français étaient connus pour cela: Frédéric Mitterand, Gabriel Matzneff un écrivain ou encore Michel Polak, un architecte… Jack Lang, Simone de Beauvoir et de nombreux autres avait pris publiquement le parti des pédophiles contre celui de la justice. Le fruit d’une révolution sexuelle, qui a secoué les années 60 et 70, poussée à l’extrême.
Photo de couverture: le député anglais Geoffrey Dickens. Crédit photo: france24.com