Depuis cinq ans, le réalisateur chilien Pablo Larrain parcourt les festivals à la recherche de la lumière, de la reconnaissance du milieu et il la touche enfin du bout du doigt. De retour avec un quatrième film plein d’espoirs, Larrain est semble t’il arrivé à satisfaire tous les espoirs placés en lui. Reconnu par ses pairs, No est la merveille de ce début d’année, le genre de rencontre cinématographique qui change un réalisateur et le cours de sa vie. Nommé dans la catégorie meilleur film étranger aux Oscars, plébiscité l’année dernière au festival de Cannes, la quatrième production de Pablo Larrain met fin à sa trilogie entamée en 2008 avec Tony Monero et poursuivit par Santiago 73, Post Mortem (2010). A chaque film, le même refrain revient sans cesse. Le Chili, son pays, et plus précisément son autopsie détaillée en partant de la dictature. De la description pure de la dictature chilienne sous la présidence du général Augusto Pinochet dans Tony Monero en revenant aux origines du système dans Santiago 73, Post Mortem, No marque le sommet de la révolte populaire face à la politique du pays.
Chili, 1988, pour planter le décors. No a lieu en pleine période de référendum de Augusto Pinochet sur sa présidence. Acculé par les pressions internationales, le dictateur en poste depuis quinze ans propose alors à son peuple de se prononcer. C’est le moment choisit par l’opposition pour faire grandir sa révolte. René Saavedra (Gael Garcia Bernal), un jeune et brillant publicitaire est choisi pour mettre en place une campagne publicitaire du « non ». Il met alors en place un plan pour libérer le pays de l’oppression, restant sous la surveillance des hommes de Pinochet. L’histoire est forte, et le sujet tout autant marquant dans l’histoire contemporaine. Le récit de l’abandon de Augusto Pinochet après le rejet de son peuple dans un référendum démocratique restera à tout jamais un point de non retour pour le passé peu glorieux du Chili. L’authenticité du film est conservé par l’attachement de Larrin au détail. Cette passion est perçue dans le cocktail entre images d’archives et tournage à l’aide de quatre caméras datant des années 1980. Un rejet du HD, pour coller au plus près de la force du récit. Le talent de Pablo Larrain se retrouve également dans ses insertions de détails d’époque comme des jingles, des spots publicitaires authentiques de 1988.
La carrière de Larrain a toujours été motivée par l’amour de son pays et un éternel retour à la politique, présente dans les gênes du chilien. Son père était un sénateur, fervent opposant à Pinochet et figure emblématique de a droite chilienne, tandis que sa mère est une ancienne ministre. C’est pour dire que l’échiquier politique connait Pablo Larrain. En mêlant humour et intensité de bout en bout, No nous offre une leçon d’histoire en symbole de maturité pour le jeune réalisateur. Inspiré de la pièce de Antonio Skarmeta, « Referendum« , ce film est tout simplement une claque sèche. Le Monde rajoutait même cette semaine que « Pablo Lorrain est au cinéma ce que René Saavedra, le héros, est à la communication politique. Un artiste en pleine possession de ses moyens« .