Figure du reggaeton et natif de l’île, Bad Bunny a choisi de consacrer l’été 2025 à sa terre natale, Porto Rico. Sa résidence musicale « No Me Quiero Ir De Aqui » est bien plus qu’une série de concerts. C’est une déclaration d’amour, une leçon d’histoire et un puissant geste politique pour une île marquée par des décennies de colonisation et d’oubli.
Une lettre d’amour musicale à Porto Rico
Depuis début juillet, le Coliseo de San Juan vibre chaque soir au rythme des percussions afro-caribéennes, de sonorités électro et du reggaeton made in Bad Bunny. Pour sa résidence baptisée « No Me Quiero Ir De Aqui » ou » Je ne veux pas partir d’ici« , l’artiste le plus écouté du monde entre 2020 et 2022 a offert à son île un spectacle d’une rare intensité.
Le décor ? Une forêt tropicale luxuriante, des danseurs en habits traditionnels, des chapeaux de paille portoricains et un public vêtu aux couleurs du drapeau de Porto Rico. Tout, dans cette mise en scène célèbre l’identité culturelle portoricaine, entre tradition et modernité.
Ce retour aux sources est aussi musical. Son dernier album, « Nadie sabe lo que va a pasar mañana« , puis surtout « Debí tomar más fotos« , naviguent entre latin rap, reggaeton, plena et bomba. Des styles typiques de l’île. Des morceaux comme « La Romana » ou « Yo perreo sola » sont mêlés à des titres plus engagés, comme « Lo que pasó a Hawaii« , qui dénonce la gentrification et les ravages du tourisme de masse.
Un concert politique et populaire
Avant même de chanter, Bad Bunny donne le ton. Sur les écrans géants, des messages politiques sont projetés. On peut y lire, « Porto Rico est une colonie depuis que Christophe Colomb a découvert l’île lors de son deuxième voyage vers le Nouveau Monde en 1493 » ou encore « la tribu des Tainos habitait déjà l’île« .
Ce geste n’est pas anodin. Porto Rico, bien que rattaché aux États-Unis, n’a pas le statut d’État. Ses citoyens n’ont pas le droit de vote à l’élection présidentielle. Ils vivent sous des lois fédérales sans pleine représentation au Congrès et souffrent de coupures d’électricité chroniques ainsi que d’une gestion de crise négligée par Washington.
Pour Bad Bunny, la musique est un outil de vérité. Le public, conquis, applaudit à ces prises de position. Des milliers de spectateurs, présents lors du premier concert s’embrasent sur les titres « Tití Me Preguntó » ou « Nuevayol ». Les habitants de l’île admettent être honorés par sa présence et son implication, car c’est leur vérité qu’il raconte dans ses textes.
Une fierté collective portée par un « enfant du pays »
Avec 30 concerts programmées jusqu’en septembre, la résidence est un véritable hommage, mais également un évènement communautaire. Les neuf premiers concerts sont exclusivement réservés aux habitants de l’île, une attention particulière qui renforce le lien entre l’artiste et son public. Beaucoup assimilent Bad Bunny à une « célébration d’eux-mêmes » et de leur histoire car c’est tout un peuple qu’il représente.
Cette résidence, par sa portée artistique et symbolique, affirme la place majeure de Porto Rico dans l’histoire personnelle de Bad Bunny et dans celle du reggaeton. Il choisit de revenir au coeur de ses terres pour faire danser, réfléchir et revendiquer.
Avec sa voix et ses textes engagés, Bad Bunny transforme la scène du Coliseo en un espace de fête et de résistance. Un hommage rare, pour un territoire qui en a tant besoin.