Présents pendant neuf jours pour faire vivre le Salon de l’Agriculture, plusieurs éleveurs et producteurs ont accepté de répondre à nos questions et nous en apprendre un peu plus sur leurs activités…
Au cours de notre visite du salon, nous avons pu croiser la route d’hommes et de femmes issus de différentes régions de France, tous passionnés par leur métier et fiers de nous faire découvrir l’aboutissement de leur investissement au quotidien. Nous leur avons demandé leur avis sur la place des jeunes dans le milieu agricole et sur l’intérêt que porte cette part de la population envers l’agriculture. Comment les motiver à s’intéresser à ces corps de métier ? Et quel message faut-il leur passer ?
La plupart des éleveurs interrogés ne se voilent pas la face. Leur profession est loin d’être attrayante, surtout aux yeux de la jeunesse. Instabilité financière, mesures gouvernementales illusoires, conditions de travail éprouvantes… Autant de raisons qui peuvent calmer les ardeurs de nombreux jeunes – même les plus motivés – qui souhaitent se lancer dans l’agriculture. « Aujourd’hui, avec la conjoncture qu’il y a, un jeune ne peut pas démarrer de rien ! Il faut une structure en place parce que, vu les revenus qu’on peut en tirer, ça ne peut pas fonctionner. » constate Ludovic, éleveur de vaches Gasconne. C’est pour ça que selon lui, « les jeunes les plus intéressés, ce sont les fils d’agriculteurs« , qui baignent dedans depuis tout petit et n’ont qu’à reprendre l’affaire familiale au moment opportun. La majorité des agriculteurs en activité ont d’ailleurs suivi les traces de leurs parents.
De belles histoires de famille
C’est aussi souvent le cas de nombreux producteurs qui mettent un point d’honneur à faire perdurer le savoir-faire de leur famille. Dans les Vosges, la charcuterie Pierrat est un des exemples les plus représentatifs de ce passage de relais parental. Depuis quatre générations, les descendants du clan Pierrat se succèdent à la tête de l’entreprise. Aujourd’hui, la PDG s’appelle Stéphanie. Il s’agit de l’arrière-petite-fille du fondateur de cette charcuterie implantée depuis quelques années au Tholy. Cela fait plus de 120 ans que la tradition du fumage à la sciure de sapin est perpétuée et permet à la charcuterie Pierrat de se démarquer de ses concurrentes vosgiennes et nationales.
Non loin de là, à Plainfaing, la Confiserie des Hautes Vosges suit ce modèle – certes depuis moins longtemps que la famille Pierrat – mais avec autant de succès que celle-ci. « En 1986, nous avons avons ouvert nos portes, pour maintenant devenir l’entreprise [agroalimentaire] la plus visitée de France » nous explique Pascal, responsable de la fabrication des bonbons des Vosges. Depuis 33 ans, ces bonbons sont travaillés avec l’huile essentielle de sapin de la région, tout comme les autres ingrédients présents dans la recette certifiés Grand Est, tels que le sucre Ernstein et le glucose de Marckolsheim. « Les jeunes retrouvent un peu les bonbons que leurs grands-parents leur donnaient à l’époque » nous répond Pascal, interrogé sur l’intérêt porté par cette partie de la clientèle pour sa confiserie. Cette nostalgie semble donc porter ses fruits et devient même un argument de vente puisque les bonbons à l’ancienne seraient en train de revenir à la mode.
« J’ai fait le choix de démissionner de Paris et de développer l’entreprise familiale [dans le Vaucluse] pour promouvoir l’esprit traditionnel« . Laurent est un jeune producteur qui a décidé de consacrer tout son temps à la Confiserie Laurmar, qu’il gère avec sa sœur et ses parents. « On produit toute l’année du nougat d’artisan à base de miel de lavande, d’amandes et de pistaches. C’est un produit assez qualitatif » nous précise-t-il. Bien que plongé depuis son enfance dans ce milieu artisanal, Laurent a opté pour des études de commerce. Il a ensuite décroché un petit job dans la capitale, avant de retourner finalement auprès des siens en Provence.
Un jeune confiseur qui pense comme un jeune consommateur
Néanmoins, grâce à cette période parisienne de sa vie, le jeune homme sait bien qu’il est souvent difficile pour les jeunes de consommer local et artisanal : « il y a une certaine tranche d’âge où on va aller chercher le moins cher et le plus quantitatif. C’est normal, j’ai été dans cette situation-là. Mais en grandissant un peu plus, on aime bien se faire plaisir, s’intéresser au produit […] et au final acheter peut-être un peu moins ou un peu plus cher mais surtout viser la qualité et avoir une relation privilégiée avec son producteur […], ce qu’on ne va pas retrouver au supermarché ou en grande surface ». La sensibilisation des jeunes « aux bons produits du terroir » est essentielle selon Laurent. Il faut notamment penser sur le long terme. Le confiseur pousse les consommateurs à venir goûter à toutes ces créations artisanales. « Même s’ils n’ont pas forcément tout de suite le budget d’acheter, ça va faire ce travail-là et dès qu’ils auront les moyens, ils reviendront naturellement sur des produits de qualité » conclut-il.
En se baladant au milieu des divers stands, micro et stylo en main, nous avons pu recueillir d’autres témoignages d’agriculteurs qui dressaient souvent le même constat : il faut que les Français ouvrent l’œil sur les conditions souvent mauvaises dans lesquelles sont élevés la plupart des animaux industrialisés et qui se retrouvent ensuite dans nos rayons de supermarché en barquettes, avant de finir dans nos assiettes. Nous avons rencontré Damien, un représentant de petits producteurs de Gascogne et du Pays Basque, qui a remporté la médaille d’or au concours général agricole, récompensant la qualité de son jambon de Bayonne IGP/AOP. En mettant en avant ses bêtes, il a résumé cela en une déclaration : « Des cochons qui courent , qui connaissent la couleur de l’herbe et qui ne sont pas piqués dans le cul comme des coureurs cyclistes« . Une jolie figure de style.