« Soyez châtiés, mortels, en cette sombre période de rabais sur laquelle le fléau, ce chien économique, charognard de la société, s’abat. Ses griffes acérées et ses crocs plantés sur vous comme pour faire de l’Homme sa chose qu’il manipule à sa guise ». C’est en tout cas la pensée qu’aurait eu l’ours brun tout de rouge vêtu dans les années 50 pour décrire la période dans laquelle la France s’est embarquée hier.
Des chiffres d’affaires en baisse, des ventes qui chutent, des citoyens frileux pris à parti dans un contexte économique rude, le contexte de la crise est posé depuis un certain temps en France maintenant.
Hier, c’était le début des soldes. Nous vous entendons tous d’ici déjà : les cris d’hystérie collective, les arrachages de fringues à tout va, les engueulades générales « je l’ai vu en premier, c’est le mien, à moi, à moi, à moi ». Pourtant, cette année, malgré l’ouverture des soldes à 8 heures par Sylvia Pinel, ministre du commerce, il n’y avait pas foule et on ne pouvait pas admirer une meute de chiens enragés se tirer dans les pattes pour déterminer qui sera premier à atteindre le Graal tant convoité.
C’est en fin de matinée, à partir du moment où le temps est devenu clément avec la population accablée par une météo plus que douteuse pour une fin de mois de juin, que les instincts primaires se sont éveillés. Il est 11 heures et les choses s’accélèrent, opportunistes que nous sommes. Objectif : ne rien laisser sur son passage telle une tornade de bipèdes lobotomisés. Ambiance pour toutes les victimes de cette catastrophe que sont les vendeurs, à plaindre bien évidemment.
Crise économique : les français préfèrent se serrer la ceinture mais continuent de s’en mettre aux pieds. Les gardes manger, comme les grands magasins sur les boulevards ont su attirer la curiosité et même l’engouement de monsieur et madame Machin en enregistrant une hausse de 8% de son chiffre d’affaire le jour de lancement. Chiffre qui n’égale pas celui de l’an dernier mais dont les commerçants sont satisfaits dans un climat de crise et avec les soldes flottants, il n’est pas aisé de mettre la couvée en confiance, mieux la bichonner pour finalement lui extorquer ce qu’elle n’a pas. Et sur ce point, les acheteurs ont bien raison de faire banqueroute.
Il est connu pour être le roi des emmerdeurs, laissez-moi vous présenter le français dans toute sa splendeur. Au détour d’un rayon on peut tendre l’oreille et percevoir le son d’une voix aigrie par le temps qui s’exclame sans retenue, aucune : « Comment ? Seulement 50% sur cette veste ? C’est un scandale ! Appelez-moi le directeur ». C’est un sondage IFOP parut juste avant la période de soldes qui mettait en évidence que plus de 55% des français, les râleurs du monde occidental (pour ne pas dire du monde, tout court) attendait des soldes de plus de 50% dès le premier jour. Si vraiment cela ne vous convient pas et que vous préférez vous mettre à vous marcher les uns sur les autres, attendez la dernière démarque pour être bien certain de ne pas en sortir indemne.
Pour la suite, préparez vous psychologiquement à avoir à faire à une humanité du fond des abysses, dans laquelle règne le chaos social, la débandade et la précipitation. Mais dites-vous bien que cela ne durera pas et que c’est un point fort de l’économie de notre cher et tendre pays.