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CINEMA : Stoker de Park Chan-Wook – Quand l’horreur a du goût

Premier film américain du réalisateur sud-coréen, Stoker est sorti le 1er mai 2013 sur nos écrans. Se présentant comme un hommage assumé au «film noir», il rejoint la filmographie déjà confirmée de Park Chan-Wook. Ce dernier s’est spécialisé dans la mise en scène du thriller psychologique comme l’avait impulsé Old Boy, le film qui, dix ans auparavant fit sa notoriété.

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L’affiche de Stoker, sorti le 1er mai 2013

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L’oncle Charlie est tout de même un brin flippant

Les Stoker vivait paisiblement avant qu’un étrange accident de voiture n’emporte Robert, mari et père d’une famille aristocratique des années 60. Il laisse derrière lui une femme désemparée et naïve incarnée à merveille par Nicole Kidman, qui semble résolue à passer à autre chose. Avec un certain empressement qui plus est. Quoi de mieux que Charlie, le frère de son mari. Jeune, riche, beau et maniant les mots avec une volupté exemplaire, il représente le séducteur en mal d’affection, trop occupé durant des années de besognes intensives, à parcourir le monde sur son voilier. Rôle que Matthew Goode endosse avec brio. Désormais, Charlie souhaite se poser au sein d’une famille et comme il le dit si bien, ne veut qu’une seule chose : « Être ton ami ».

« Qui dit malsain, dit malin. »

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Mia Wasikowska, décidément très troublante

Mia Wasikowska, que l’on avait découvert en 2010 dans le Alice in Wonderlands de Tim Burton est sans doute la révélation de ce film. Elle y tient le rôle principal d’India Stoker, orpheline de 18 ans, qui se cherche encore. Sa force de caractère hors du commun et un attrait pour la chasse font d’elle un personnage déroutant. Calculatrice, espiègle et quelque peu asociale, elle saura charmer le spectateur par sa curiosité et sa vivacité d’esprit vis-à-vis des adultes auxquels elle est confrontée.

Grand Prix du Jury de Cannes en 2004 présidé par Quentin Tarantino, le réalisateur nous a habitué à des personnages torturés par leur condition et animés par la vengeance, un thème décidément cher aux deux réalisateurs. Chan-Wook avait d’ailleurs déclaré que ce qui l’avait poussé à arrêter la philosophie à l’université était l’absence de son étude au sein du cursus.

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L’Ombre d’un doute, d’Alfred Hitchcock sorti en 1943

Mais içi, il ne s’agit pas de son histoire. En effet, Wentworth Miller, surtout connu pour son rôle dans Prison Break s’est personnellement adonné à l’écriture du scénario, sous le pseudonyme de Tel Foulke. Il dira s’être d’ailleurs inspiré de L’Ombre d’un doute pour ficeler l’intrigue et les décors. Doute que n’a pas eu Hollywood devant le scénario de l’ex-Michael Scofield, rejoignant rapidement la très fermée Black list hollywoodienne. Rappelons que chaque année, cette dernière regroupe les dix scénarios les plus prometteurs en vue de leur production.

Park Chan-Wook, victime d’autocensure ?

Bram Stoker

Bram Stoker, auteur de Dracula (1897)

Bien que le réalisateur sud-coréen ne réitère pas avec ce à quoi il nous a habitué, Stoker pourrait néanmoins marquer un tournant dans sa carrière de metteur en scène. Le film ne respire pas l’originalité, mais conditionne ce qui ce fait de mieux dans son domaine. Comme si ce dernier, en bon élève, voulait représenter avec un souci d’esthétique proprement asiatique, ce qu’il aurait retenu du genre. La force de cet hommage se légitime clairement par son regard étranger sur ce type de film, propre à l’Occident. Le titre n’est lui non plus pas anodin. Stoker étant une référence directe à Bram Stoker, à qui l’on doit le célèbre roman fantastique Dracula de 1897.

Tarantino l’avait osé avec Kill Bill. Au tour de Chan-Wook.

Défini à la fois comme un thriller psychologique, un drame familiale et un film d’horreur, le quatorzième long-métrage de Park Chan-Wook se veut aussi intriguant que ses personnages, tous autant caricaturaux que complexes. Impossible de ne pas ressentir un léger déjà-vu lorsque l’on aperçoit ‘‘l’oncle Charlie’’ pour la première fois. Une fois encore, personnage hommage destiné à Hitchcock, son regard glaçant de psychopathe, masqué à des allures de gentleman avéré, pousse le spectateur à s’immiscer dans le rôle d’India Stoker. Cette dernière étant torturée par des sentiments contraires à son égard, cette relation s’intensifie et se solde par une conclusion mémorable, sans morale. Stoker délivre un véritable orgasme visuel sur fond de violence et d’humour noir, rythmé qui plus est par une ambiance sonore enivrante.

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La bande-son de Clint Mansell, le génie à l’origine de celle de Requiem for a Dream, ne laissera personne indifférent.

Pourtant, loin des fondamentaux du genre, Stoker se révèle pour tous (ou presque), car filmé avec la plus grande pudeur. Pour un film d’horreur, il est en effet incroyable de ne jamais se sentir mal à l’aise ou dégouté devant un tel condensé de sang et de tristesse. Stoker est un film unique, d’une beauté photographique rare et malgré un scénario surfait, il réussit là où on ne l’attendait pas. A voir, définitivement.

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