Alors que la 53ème édition du Salon internationale de l’agriculture vient de fermer ses portes, nous avons rencontré un jeune éleveur de 21 ans pour nous parler de sa situation et des difficultés actuelles du monde agricole.
A côté des bêtes et du folklore habituel de salon de l’agriculture, un stand interpelle. La bâche « Je suis éleveur, je meurs » de la même couleur que les vaches laitières qui ruminent paisiblement en-dessous, attire l’oeil. Les visiteurs n’hésitent pas à s’arrêter et témoigner de leur soutien à ces agriculteurs en colère.
1 200€ pour 3
Parmi eux, se trouve Valentin , 21 ans. Après avoir arrêté l’école il y a 2 ans, il est employé à temps plein dans la ferme familiale. Située dans le Nord, « entre Calais et Boulogne », il travaille avec son père et son frère, sous le statut d’aide familiale. C’est un habitué du Salon qu’il fréquente depuis son plus jeune âge. A ses yeux, celui-ci est plus important que les autres. Les crises se multiplient et s’intensifient, tout comme leur colère.
Les jeunes sont parmi les plus mobilisés depuis le début de la crise agricole. « Ce sont eux qui vont le plus vers l’avant. Ils se battent pour leur avenir » nous explique-t-il. Lui n’a pas pu se rendre aux rassemblements organisés dernièrement. Il devait impérativement rester à la ferme, pendant que son père et son frère allaient manifester.
Pour Valentin et sa famille, le principal problème est le prix du lait. Aujourd’hui le litre s’achète à 0,27 centimes, contre 0,35 centimes espérés par les éleveurs. Ce qui revient à « beaucoup de travail pour peu de rémunération, à la fin du mois, on a 1 200€ à se diviser par 3, ça fait peu » nous avoue Valentin. D’après lui, les principaux responsables sont la grande distribution et les coopératives « qui n’ont de ça que le nom ». Elles font pression à la baisse sur les prix et bloquent les négociations.
Les politiques sont « à côté de la plaque »
Dès que l’on parle des personnalités politiques, le visage se ferme, les propos sont engagés : « ils sont à côté de la plaque, qu’ils se réveillent! ». L’exemple le plus marquant de la défiance à l’égard du pouvoir fut la visite du Président de la République. François Hollande était situé tout près de son stand lorsqu’il a été pris à parti par les agriculteurs. Il tend à minimiser l’incident : « Il a été chahuté mais sans plus. Les visiteurs disent qu’on aurait dû être plus virulent, qu’on aurait dû lui jeter de la bouse » mais il condamne la violence « qui ne résout rien« . Les annonces faites juste avant le salon de l’agriculture n’ont pas suffi à calmer les éleveurs, « des mesurettes » pour Valentin.
Ne lui parlez pas non plus de Marine Le Pen, en visite ce jour-là. Pourtant, la présidente du Front National a le vent en poupe chez les agriculteurs, mais pas dans la ferme de Valentin qui ne croit pas à ses solutions. De plus, elle a désigné le coupable idéal : l’Europe. Pendant qu’elle réclame la tête de Phil Hogan, le commissaire européen de l’agriculture, quelques stands plus loin, notre jeune éleveur pense tout le contraire : « Le problème est européen, la solution sera européenne »
Il se laisse encore quelques années et malgré la passion indéniable qu’il conserve pour ce métier, Valentin ne se sent pas tenir à ce rythme et surtout pour si peu. « Je veux continuer mais je ne vais pas passer toute ma vie à me crever pour rien ».
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