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Des migrants traversent la Mer Égée à la nage

S’il est déjà périlleux de traverser la mer Égée à bord de miséreuses embarcations, le faire à la nage relève de l’impossible. Pourtant, certains en ont réchappé. Il y a huit mois, Amir Mehtr et ses sept compères s’élançaient dans les flots agités avec pour seul attirail gants palmés et lunettes d’eau.

Des côtes turques à celles de l’île grecque Samos, le commando marin s’est envoyé sept milles mètres en alternant crawl et dos, essuyant les remous des vagues, l’appel du courant et l’ardeur du vent. Tout cela sous une pluie battante. Harnaché autour d’eux, un sac transportait le strict nécessaire : quelques habits, un peu d’eau et de nourriture. Amir avait entouré son poignet droit de dattes à l’aide d’un film plastique, au cas où la faim s’inviterait dans l’aventure.

Répartis en équipes de deux, les téméraires n’ont pas tardé à contracter l’angoisse et à saisir les risques de l’épreuve. La crainte d’être interceptés par les autorités ou d’avaler par les cubes d’eau. Impossible de voir plus loin que le bout de leurs doigts ou de rester groupés comme leur plan le prévoyait. Les valeureux nageurs s’en sont donc remis à leur instinct. Ils ont bravé l’immense masse liquide sans repos, en priant qu’aucun garde-côte ne croise leur trajectoire. Les navires de surveillances les auraient ensevelis sans même les voir tant les conditions météorologiques étaient vilaines.

mer egee

Une préparation de longue haleine

Après sept heures de souffrances extrêmes, ils sont enfin parvenus à rejoindre les rives grecques. Lessivés, souffles coupés, membres paralysés, au bord du trépas mais enfin libre.s L’exploit n’aurait été envisageable sans préparation. Rien n’arrive jamais sans labeur. Amir s’est infligé un entrainement digne des professionnels de natation. À Damas, il se rendait tous les jours à la piscine olympique pour nager jusqu’à l’épuisement total. Malgré la dangerosité des affrontements, le bassin est toujours resté accessible et épargné par les bombes. Sa casbah n’a pas eu la même chance. Sans toit, le jeune syrien de 21 ans n’a pas eu d’autre choix que de migrer vers le Liban, plus exactement à Beyrouth, où son frère lui propose de l’accueillir. Aussitôt qu’Amir débauchait du travail, il filait quotidiennement au large de la ville nager au moins deux ou trois heures pour parfaire sa préparation. Après huit mois d’exercices intensifs, il se sent opérationnel. Prêt à affronter à la force des bras la mer que tous traversent à moteur. Il s’en serait bien passé de ce cuisant apprentissage, de ces heures interminables la tronche dans le clore ou dans l’eau salée, mais son maigre pécule ne lui permettait pas de rémunérer un passeur clandestin. 

Aucun n’aurait misé sur la réussite des vaillants jeunes hommes tant les conditions étaient rudes. Et bien ils l’ont fait ! Sept mille mètres de douleur sans bouée ni gilet de sauvetage. Les bras et les cannes en guise de rames ! Essayez donc de vous enfiler 140 longueurs dans un bassin calme exempté de courants sournois, vous mesurerez l’infinie détermination qu’exige un périple de cet acabit. Amir Mehtr loge désormais en Suède, loin de ses origines et de la misère. Il coule des jours heureux en contrées nordiques sans jamais se séparer de son porte-bonheur : ses lunettes de bain. 

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