Dans l’univers des supers héros, la comédie Powerless s’intéresse aux gens « normaux ». Mais pour l’instant, c’est pas super…
C’est quoi, Powerless ? Emily Locke (Vanessa Hudgens) vient d’être engagée par une compagnie un peu particulière : filiale de Wayne Enterprises, celle-ci traite les dommages collatéraux provoqués par les interventions spectaculaires mais souvent dévastatrices des superhéros tout droit sortis de l’univers DC Comics. A la tête d’une équipe d’ingénieurs, la jeune femme est chargée de la conception de produits technologiques censés protéger les citoyens lambda, dont la vie quotidienne est régulièrement affectée par les catastrophes provoquées par la lutte entre superhéros et supers méchants…
Devant les histoires de superhéros, nous sommes tous de grands enfants, passionnés par leurs aventures, fascinés par leurs supers pouvoirs, tremblant devant leurs ennemis, enthousiastes pour les combats spectaculaires… Il est rare que l’adulte que nous sommes, dans un éclair de lucidité, s’interroge sur les conséquences de ces luttes épiques qui plongent en général la ville dans le chaos. Parce que c’est bien joli de sauver les citoyens de Star City, Gotham ou New York, mais une fois le super méchant terrassé au milieu des décombres : qui va nettoyer tout ça ?! La question peut paraître idiote, mais elle est pourtant souvent présente en filigrane – par exemple dans Arrow, avec la réhabilitation des quartiers détruits par Malcolm Merlin, ou de façon encore plus réaliste quand Daredevil ou Luke Cage sont confrontés à des entreprises mafieuses qui profitent de la reconstruction pour faire main basses sur la ville. En somme, ce n’est pas le sujet principal, mais l’aspect pratique découlant des dommages provoqués par les superhéros affleure souvent par petites touches.
Voilà précisément le thème dont s’est emparée Powerless, la nouvelle comédie de NBC. Les héros sont des ingénieurs et des scientifiques dont le travail consiste à inventer des objets high-tech capables de protéger les pauvres petits humains que nous sommes des catastrophes successives involontairement provoquées par les superhéros. Par exemple, un détecteur avertissant de l’approche imminente d’un super méchant, qui permet de se mettre à l’abri. Le point de vue est celui de personnes « normales », pour qui les superhéros sont avant tout une source de désagrément : ils détruisent votre voiture, explosent les vitres des bâtiments, paralysent la circulation et vous empêchent de mener une petite vie banale et sans histoire.
On est donc dans une série de superhéros où les superhéros ne sont pas les héros. Et pourtant, c’est bien l’insertion de Powerless dans l’univers de DC Comics (d’où proviennent Flash, Arrow, Batman et compagnie) qui en fait tout l’intérêt. A priori, c’est un peu léger – d’autant que l’on voit bien peu de superhéros à l’écran, et en tous cas aucuns de ceux susmentionnés. Mais ce n’est finalement pas plus mal : les allusions et références constantes accentuent la force comique du contraste entre un monde fantastique familier du spectateur et le quotidien banal et trivial de protagonistes bêtement humains, dérangés par ces fichus superhéros qui leur sauvent la vie – mais qui bloquent la circulation et vous mettent en retard au boulot. Par exemple, Powerless prend pour cadre une filiale de Wayne Enterprises, dont le patron n’est autre qu’un lointain cousin de Bruce Wayne (dont tout le monde ignore évidemment la seconde identité…), un raté obnubilé par son célèbre cousin et jaloux de sa réussite.
L’idée est excellente, d’autant plus séduisante qu’elle est riche en possibilités et abordée de manière originale par le biais de la comédie. Mais pour l’instant, Powerless n’en tire pas tout le profit possible. Mis à part quelques allusions bien senties, on reste encore dans le registre de la comédie de bureau classique – les superhéros sont un simple prétexte et n’ajoutent pas grand-chose au contexte. En dehors des références, les blagues et réparties tombent souvent à plat et l’ensemble reste un peu sage et pas assez déluré. On a presque l’impression que les auteurs n’ont pas osé aller jusqu’au bout du concept et ont préféré effleurer cet univers très spécifique. Les allusions et les clins d’œil restent superficiels – au fond, Powerless aurait peut-être gagné à être diffusée sur une chaîne plus confidentielle que NBC, où les auteurs se seraient autorisés plus de liberté… Car au terme des deux premiers épisodes, force est de constater que le résultat est décevant.
Heureusement, il reste les acteurs. Bien qu’il soit encore trop tôt pour juger de leur prestation, ils semblent convaincants et on a surtout plaisir à retrouver certains d’entre eux. Portée par la jolie Vanessa Hudgens, très fraîche et qui joue à la perfection la nouvelle venue naïve mais enthousiaste, Powerless réunit aussi Danni Pudi (notre cher Abed de Community) et Alan Tudyk (vu dans la mythique Firefly) dans le rôle – pour le coup, assez drôle – du tristement-pas-célèbre cousin de Bruce Wayne. Pas sûr toutefois que cela suffise à susciter l’intérêt sur le long terme…
Malgré une idée de départ originale et séduisante, Powerless ne parvient pas à l’exploiter ; correcte mais loin d’être transcendante, la série déçoit : il y a quelque chose de frustrant à la voir gâcher les opportunités comiques offertes par l’univers des superhéros décliné dans le registre de la comédie. On espère que les auteurs rectifieront rapidement le tir pour donner à Powerless le style et le rythme qu’elle mérite… Que voulez-vous ? De grands pouvoirs impliquent de grandes responsabilités. Réservons notre jugement : après tout, nombreuses sont les sitcoms qui ont connu des débuts laborieux avant de trouver leur ton.
Powerless (NBC)
Episodes de 22’ environ