Disponible en intégralité sur Netflix, Lost est une série-culte qui a marqué son époque – et changé la manière de regarder la télévision.
C’est quoi, Lost ? L’avion 815 de la compagnie Oceanic Airlines, qui voyageait de Sydney à Los Angeles, s’écrase sur une île isolée et apparemment déserte du Pacifique Sud. Les survivants, un groupe très hétérogène, doivent s’organiser pour survivre sur l’île en attendant les secours. Mais aucune aide ne vient, et ils découvrent que l’île recèle de multiples secrets et de nombreux dangers. Jack (Matthew Fox), Kate (Evangeline Lilly), Sawyer (Josh Holloway), Sayid (Naveen Andrews), John (Terry O’Quinn) et leurs camarades d’infortune vont affronter les mystères, les périls et les ennemis cachés dans l’île – mais aussi leur passé et leurs traumas.
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Il y a des séries-cultes, et il y a des séries-cultes qui ont marqué l’histoire de la télévision. Lost appartient à la seconde catégorie : il y a eu un avant et un après Lost. Elle a eu une énorme influence en termes d’écriture et de concept avec des fictions prenant pour point de départ une situation mystérieuse voire surréaliste en distillant les révélations (Under the dome, The leftovers, La Brea, From…) en espérant devenir le « nouveau Lost », mais c’est aussi la première série qui, grâce à l’expansion des réseaux sociaux, est devenue une véritable obsession hebdomadaire pour des milliers de spectateurs à travers le monde, à un niveau jamais vu jusqu’à lors.
La mise en ligne de Lost sur Netflix depuis la fin Août est l’occasion de revenir sur la série – mais de manière générale afin d’éviter au maximum les spoilers et de ménager la surprise pour ceux et celles d’entre vous qui n’auraient pas encore eu le plaisir de la découvrir.
Aux origines de Lost
Lorsque la chaîne ABC a l’idée d’une sorte de crossover entre le film Les naufragés de l’île aux pirates et l’émission de télé-réalité Survivors, le scénariste Jeffrey Lieber est chargé de développer le projet. Il écrit et réécrit plusieurs versions du script, sans parvenir à convaincre ABC et il demande alors l’aide de JJ Abrams (Alias). Avec le scénariste Damon Lindelof (Nash Bridges puis plus tard The Leftovers), c’est Abrams qui a l’idée de rajouter des éléments fantastiques.
La chaîne donne le feu vert pour un double épisode pilote, tourné à Hawaï, qui est alors le plus cher de l’histoire avec un budget de 10 millions de dollars. Le succès immédiat de la série prend tout le monde de court, personne ou presque ne s’attendant à ce que le public plébiscite une fiction aussi sérialisée, qui plus est tendant vers le fantastique, alors que les procedural comme Les experts dominent les audiences. Les spectateurs sont pourtant au rendez-vous et Lost remporte même le Emmy award de la meilleure série dramatique en 2005, pour sa première saison.
Plusieurs lignes narratives
Lost se distingue notamment par sa structure, avec deux axes intrinsèquement liés. D’abord un récit choral avec le séjour sur l’île, à partir du spectaculaire crash aérien, l’espoir des survivants qui attendent d’être secourus, leur résignation, leur adaptation à leur nouvel environnement, la manière dont ils s’organisent puis la découverte progressive des secrets de l’île. Ici, c’est la dynamique de groupe qui domine, avec l’émergence de leaders, d’outsiders et d’antagonistes, puis d’un ennemi commun à tous lorsqu’on découvre la présence des « Autres ». Entre amitiés, rivalités, intrigues amoureuses, coalitions et trahisons, nos héros ne cessent de découvrir des mystères qu’ils tentent de percer avec plus ou moins de succès – une révélation posant généralement plus de questions qu’elle n’apporte de réponses.
D’autre part, chaque épisode est dédié à un protagoniste que l’on suit indépendamment des autres, dans des flash-back montrant sa vie avant le crash,. C’est ce qui leur permet de gagner en épaisseur et nous aide à comprendre leur mentalité et leur réaction, nous faisant sympathiser d’une manière ou d’une autre avec chacun d’entre eux. Ce schéma est resté stable au cours des premières saisons, jusqu’à ce que Lost change les règles de jeu pour montrer les événements sous d’autres angles, avec des flash-forwards et même des réalités parallèles, rendant l’ensemble encore plus complexe.
Une galerie de personnages emblématiques
Si Lost est remplie d’éléments appartenant au registre du fantastique / paranormal, c’est aussi une série dramatique à part entière, le récit d’une aventure humaine avec une multitude de personnages complexes, emblématiques et souvent fascinants, en outre interprétés par d’excellents acteurs. Parmi les protagonistes principaux, citons Jack Shephard, chirurgien qui soigne les blessés juste après l’accident et devient malgré lui le leader du groupe ; Kate aux prises avec un passé de criminelle ; Sawyer, un escroc texan qui tente de racketter les autres survivants en contrôlant les rares ressources dont ils disposent et en profitant de n’importe quelle situation pour en tirer bénéfice ; John Locke en fauteuil roulant avant son arrivée sur l’île mais qui a retrouvé l’usage de ses jambes et qui est persuadé d’avoir une mission à accomplir sur l’île…
A ce qu’on peut considérer comme le quatuor principal s’ajoutent Hurley (Jorge Garcia) dont la vie a été bouleversée par une série de chiffres qu’il retrouve partout sur l’île ; Charlie (Dominic Monaghan), une rock star britannique has been accro à la drogue et qui prend sous sa protection Claire (Emily de Ravin), une jeune fille enceinte ; Michael (Harold Perrineau) et son jeune fils Walt ; Sayid (Naveen Andrews), tourmenté par son passé en Irak ; le couple coréen formé par Jin et Sun (Daniel Dae Kim et Yunjin Kim), qui parlent à peine anglais… D’autres acteurs (Titus Welliver, Henry Ian Cusick, Mark Pellegrino) apparaîtront plus tard, dans des rôles dont nous ne dirons rien pour éviter toute révélation intempestive. Mentionnons aussi le grand Michael Emerson dans le rôle de Benjamin Linus, un personnage particulièrement trouble et inquiétant.
Dans Lost, tous les protagonistes trimballent des bagages – des bagages émotionnels et métaphoriques, puisque la plupart des vraies valises ont disparu dans le crash. Perdus au milieu de nulle part, ils ont une occasion de se réinventer, de changer, d’oublier qui il était, de mieux faire les choses… et surtout d’échapper aux problèmes de la vie réelle. Cette dynamique ouvre la voie à une série de questions plus profondes et même existentielles (Qui suis-je ? Ou vais-je ? D’où viens-je?), de thèmes philosophiques comme l’amour, la mort, la vie, les structures politiques… Et ce n’est pas un hasard si bon nombres de personnages empruntent leurs noms à des philosophes comme Locke, Hume, Rousseau ou Carlyle.
Un dénouement contesté
L’introduction d’éléments fantastiques dans les premiers épisodes de Lost a déconcerté et intrigué. Sans trop en dévoiler, mentionnons un ours polaire en pleine jungle tropicale, une fumée capable d’attaquer les gens, la fameuse suite numérique ou un compte à rebours obscur. Des éléments qui ont contribué à déclencher et ont nourri l’obsession des fans qui ont commencé à scruter, commenter et sur-analyser le moindre détail pour proposer leurs théories. Expérience sociologique ? Monde parallèle ? Rêves des différents protagonistes ? Purgatoire ? Les mystères s’accumulent, sans que rien ne soit éclairci et sans que rien n’ait vraiment d’explication.
Ce phénomène ne fut pas sans risque pour la série, l’obsession et les conjectures des spectateurs augmentant au même rythme que leurs attentes quant au dénouement. À ce stade, il est important d’indiquer que les showrunners et scénaristes n’avaient qu’une idée générale de la bible de la série, et qu’ils ont créé et improvisé une bonne partie des intrigues, saison après saison. Ce qui explique certaines failles et incohérences impitoyablement pointées par les fans, mais qui rend aussi remarquable la densité et la cohérence de l’histoire, avec une quantité phénoménale de détails qui finissent par se recouper et faire sens. Et Lost est toujours restée intrigante et addictive, même si les dernières saisons étaient globalement un peu inférieures aux précédentes.
Reste que les réactions sur la fin de Lost ont été extrêmement polarisées. Certains ont été satisfaits par la conclusion quand d’autres avaient d’autres attentes et ont fustigé ce dénouement, s’estimant presque dupés par les scénaristes et leur reprochant presque d’avoir perdu six ans de leur vie à se plonger dans un mystère à la résolution décevante (« Tout ça pour ça ? »).
Si vous regardez (ou re-regardez) Lost, un conseil : essayez de ne pas vous laisser influencer et de ne pas vous focaliser uniquement sur la fin, profitez de l’histoire et des émotions qu’elle suscite. Vous connaissez l’adage : « l‘important, ce n’est pas la destination, c’est le voyage ». Oui, même s’il commence par un crash aérien.
Intelligente et addictive, pleine de rebondissements et de personnages charismatiques, Lost fait partie des séries-cultes à voir au moins une fois dans sa vie. Malgré des incohérences et un des dénouements les plus discutés de l’histoire des séries, elle reste passionnante de bout en bout et elle ne cesse de surprendre et de se réinventer. On ne saurait trop vous conseiller d’embarquer à bord du vol 815 de la Pacific Airlines, pour un voyage de 121 épisodes qu’on vous promet inoubliable.
Lost
6 saisons – 121 épisodes de 45′ environ.
Disponible sur Netflix.