Amnistie internationale (ONG Canada francophone) affirme que les femmes et les filles de la minorité yézidie en Irak ont été persécutées, violées ou encore vendues par l’Etat islamique. Le sort réservé aux femmes yézidis enlevées en août reste trop inconnu de la communauté internationale.
Les yézidis, un groupe ethnique kurde ayant des croyances religieuses vieilles de plus de six mille ans, connaissent ces derniers mois la plus grande catastrophe de leur histoire. Le 4 août 2014, la ville de Sinjâr tombe aux mains des djihadistes de l’Etat islamique. Des dizaines de milliers de yézidis fuient la ville pour se réfugier au sein du Kurdistan irakien. Lors de cette migration, environ six cents personnes sont massacrées et des centaines de femmes sont enlevées. Le sort réservé à ces femmes reste longtemps inconnu, et leur disparition semble laisser la communauté internationale de marbre.
Le discours implorant de la députée yézidie du Parlement irakien
Vian Dakhil s’est rendue au Parlement de Bagdad pour supplier, en pleurs, que l’on vienne en aide aux yézidis. La vidéo de ce discours fait rapidement le tour du monde, et le sort de ce peuple kurde éveille l’intérêt, puis l’indignation. Quel sort est réservé à ces femmes enlevées ? A quoi peuvent bien servir tant de prisonnières à l’Etat islamique ?
La journaliste Annick Cojean, grand reporter au journal Le Monde, a mené une enquête remarquable pour comprendre ce qui était arrivé à ces femmes. Elle détaille les appels déchirants que reçoit Vian Dakhil sur son téléphone portable, à l’aube du 3 août, dans sa résidence d’un quartier d’Erbil, la capitale du Kurdistan irakien. Des femmes l’appellent pour l’informer de la situation : les villages de la région du Sinjar, au nord-est de l’Irak, étaient pris d’assaut par le Daech. A travers le combiné, Vian Dakhil pu percevoir des hurlements, des coups de feu, des sanglots, des menaces… les hommes, exécutés pour la plupart, eurent leur sort affiché dans la presse quelques jours après. Des centaines de femmes enlevées, de tout âge, restent introuvables.
« Demandez à l’armée de bombarder le site ! Nous préférons mourir ! »
Un appel venant de Mossoul, la deuxième ville d’Irak sous le contrôle des islamistes depuis le mois de juin, laisse enfin entendre ce qu’il est advenu des femmes yézidis. Une jeune fille explique à la députée qu’elle se trouve au milieu de centaines de femmes et d’enfants, dans une prison, où elles sont privées d’eau et de nourriture. Vian Dakhil reçoit de plus en plus d’appels venant d’endroits et d’autres des milieux occupés par les djihadistes, retenant toutes ces femmes. « Les hommes du Daech viennent se servir ! Ils choisissent les filles qui leur plaisent et les prennent de force. Ils les tabassent si elles résistent, ils les traînent par les cheveux ! »
L’enfer que vivent ces femmes est inimaginable. A tel point que Vian Dakhil rapporte des propos saisissants : « J’ai reçu alors de la prison une demande inouïe émanant de plusieurs femmes : « Demandez à l’armée de bombarder le site ! Nous préférons mourir ! » Comme je les comprenais ! Alors en tant que parlementaire, j’en ai fait la demande officielle, soutenue par de nombreuses familles. C’était fou, irréalisable. Mais j’assume. Mieux valait des martyrs au ciel plutôt que des esclaves. »
Des femmes violées, puis vendues comme du bétail
Quatre mille femmes. Ce sont les estimations faites quant au nombre de femmes enlevées par le Daesh. Le viol constant de ces détenues n’est pas le seul but de ce kidnapping à grande échelle. La vente, l’esclavagisme, est l’intérêt premier pour l’Etat islamique. Une jeune femme ayant réussi à s’échapper de l’un de ces camps explique qu’après leur enlèvement, elles ont été triées selon leur âge. Les jeunes et les vieilles. Les vierges ou non. Après ce tri, les femmes étaient achetées par lots. Ces « consommateurs » sont des hommes de tout âge, et de différents pays, Irakiens, Saoudiens, Syriens, Turcs, Egyptiens… Ils achètent ces femmes d’abord pour eux, mais avec l’intention des les revendre. Ce drame absolue pour la communauté yézidie reste trop inconnu du monde occidental.