17 soldats indiens ont été tués dans le Cachemire dimanche. La région au nord de l’Inde connait une recrudescence des violences depuis cet été. En sous-main, c’est une guerre de 70 ans que se livrent l’Inde et le Pakistan.
Dimanche matin, 17 soldats indiens ont été tués à Uri, une ville de garnison située à une centaine de kilomètres de Srinagar (la capitale de Jammu-et-Cachemire, administré par l’Inde).
Les quatre assaillants, des fidayeen, (des commandos prêts à mourir), auraient tous été tués dans l’attaque, qui a duré plusieurs heures.
Les tensions au Cachemire, jamais vraiment éteintes, ont connu une forte résurgence depuis deux mois.
Des troubles qui ont commencé en juillet avec la mort de Burhan Wani, le commandant du groupe séparatiste Hizbul Mujaheedin, basé au Pakistan. La police s’était félicitée de cette intervention. En réponse, la foule avait attaqué des postes de police et des bâtiments officiels. Des couvre-feux ont été mis en place par l’administration locale.
Depuis, environ 85 personnes auraient trouvé la mort en deux mois dans le conflit qui oppose les manifestants et la police, tandis qu’environ un millier de personnes auraient été blessés, surtout des civils.
« Le Pakistan est un Etat terroriste »
L’attaque de dimanche matin est une des pires depuis des décennies.
L’Inde a rapidement accusé le Pakistan de se trouver derrière l’attaque.
« Nous condamnons fortement la lâche attaque terroriste à Uri. J’assure à la nation que ceux derrière cette attaque méprisable ne resterons pas impunis. »
Rajnath Singh, le ministre de l’intérieur indien, est allé plus loin en déclarant :
« Le Pakistan est un Etat terroriste et, tel quel, devrait être identifié et isolé. »
Le Pakistan a rejeté ces allégations, en déclarant par le biais du ministère des affaires étrangères : « L’Inde accuse immédiatement le Pakistan sans mener la moindre enquête. »
Un conflit enraciné dans des décennies de tensions et de propagande
Depuis l’indépendance de l’Empire britannique, la région de Jammu-et-Kashmir, ancien état princier, est revendiqué par l’Inde et le Pakistan.
Lors de la partition des Indes en 1947 — qui s’est faite essentiellement sur des questions de majorité religieuse — le Cachemire, à majorité musulman, choisit de rejoindre l’Union Indienne, à majorité hindoue.
Immédiatement une guerre indo-pakistanaise éclate en se conclut en 1948 par un cessez-le-feu. L’ONU nouvellement créé contribue à réguler la situation. Une nouvelle guerre éclate en 1965.
Depuis, les heurts entre les deux voisins n’ont jamais cessé le long de la Line of Control (LoC), qui n’est pas une frontière internationale mais une zone de démarcation militarisée entre les deux Etats.
Les accrochages sont très fréquents et font du conflit au Cachemire une sorte de guérilla prolongée. L’attaque d’Uri s’est passée non loin de la LoC.
Aujourd’hui la région est de facto occupée par le Pakistan au nord-ouest (Azad-Cachemire et Gilgit-Baltistan), la Chine au nord-est (Aksai Chin et Vallée de Shaksgam) et par l’Inde, dans ce qui est aujourd’hui l’Etat du Jammu-et-Cachemire.
C’est ce territoire seul que le Pakistan revendique, tandis que l’Inde continue de revendiquer l’intégralité de la région.
L’Inde en pleine ascension géopolitique
L’attaque d’Uri et la résurgence des tensions au Cachemire interviennent dans un contexte géopolitique plus large.
Certains indices, comme le soutien récent du président Modi aux séparatistes du Balouchistan, région pakistanaise riche en ressources, iraient dans le sens d’une stratégie de tension de la part de l’Inde.
Depuis le début de l’année, des liens ont été créés ou resserrés entre l’Inde et l’Afghanistan, avec la bienveillance des Etats-Unis, ce qui contribue à l’isolement du Pakistan dans la région.
Le Pakistan continue d’être critiqué pour son soutien aux groupes terroristes ou son manque d’action contre ces groupes sur son territoire.
L’Inde de son côté est pointée du doigt par des ONG pour sa réponse aux troubles et pour les violences policières.
Rappelons que les deux pays sont des puissances nucléaires, et qu’ils se situent à la rencontre de plusieurs thématiques géopolitiques régionales : le Moyen-Orient, le terrorisme, l’islam politique, la route de la Soie, la rivalité entre la Chine et l’Inde…
L’attaque de dimanche devrait être un des sujets centraux dans l’enceinte du Siège des Nations Unies, où débutera mardi la session annuelle de l’Assemblée générale.