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Burundi: une énième mascarade électorale ?

Mardi 22 juillet, c’était journée d’élection pour les habitants du Burundi. Alors que le scrutin avait été plusieurs fois reporté, le troisième mandat du président Pierre Nkurunziza reste toujours contesté, trois mois après la tentative de coup d’état.

A première vue, les élections se sont passées dans le calme. Mais les dés semblent être jetés en faveur d’un troisième mandat controversé du président Pierre Nkurunziza. Alors que trois des quatre candidats de l’opposition ont appelé au boycott du scrutin, il n’y avait pas foule dans les bureaux de vote de la capitale Bujumbura.

Récit d’une journée sans passion dans la capitale

Le peuple semblait unanime dans de très nombreux bureaux de vote de la ville. L’affluence était des plus faibles. Même dans les quartiers considérés comme les fiefs du parti au pouvoir, il était difficile d’échapper à ce constat. Les citoyens, en petit nombre, sont arrivés au compte-goutte dans les bureaux de vote. Bref, les agents électoraux ont passé le plus clair de leur temps à jouer aux cartes ou à faire des siestes !

REUTERS/Mike Hutchings

REUTERS/Mike Hutchings

Alors que Willy Nyamitwe, conseiller en communication du président Nkurunziza, fait un « bilan positif » de cette journée d’élection, qui, selon lui, s’est passée dans un « climat apaisé, libre et transparent », le parti au pouvoir a dû faire faire face dans la capitale à l’appel au boycott de la part de l’opposition. Ce vide électoral a surtout fait parler dans plusieurs quartiers contestataires de Bujumbura, où les forces de l’opposition n’ont pas hésité à intimider les populations qui voulaient aller voter. Cependant, ce faible engouement électoral ne serait pas représentatif de l’ensemble du pays selon le gouvernement.

Un scrutin crédible ?

A en croire ce qu’affirme Jean Minani, ancien président de l’Assemblée Nationale et un des trois candidats à l’élection présidentielle qui a appelé au boycott du 21 juillet, le parti au pouvoir n’a jamais changé de politique en l’espace de trois mandats présidentiel ; cela ne risquerait pas d’évoluer aujourd’hui.

Ce dernier accuse également le fait que le parti au pouvoir a tendance à adopter une version incorrecte de cette dernière journée d’élection : « ‘Election paisible, élection correcte’, je ne pense pas ». Il dénonce le forcing exercé par la police et la milice habillée en police afin de forcer les populations à aller voter.

crédit: bbc.com

crédit: bbc.com

A l’annonce officielle d’un taux de participation « élevé », l’étonnement est un sentiment partagé par nombre d’habitants de la capitale, qui ont préféré vaquer à leurs occupations en cette journée d’élection. D’autres, terrifiés par les coups de feu tirés par des insurgés près de la mairie de Bujumbura, pendant toute la nuit qui a suivi les élections, sont restés terrés chez eux. A priori, le taux de participation dans la capitale serait en deçà de 50%. Selon Willy Nyanitwe, la participation dans d’autres communes pouvait dépasser les 90%. En faisant la moyenne nationale, il estime que la participation globale devrait pouvoir varier autour des 80%. On préférera attendre les résultats officiels pour faire le bilan.

Une mascarade électorale ?

Selon Jean Minani, ce genre de situation ne permet pas d’apprécier réellement la valeur du scrutin. D’autant plus que, même si les incidents et les coups de force contre les institutions n’ont eu lieu qu’en grande majorité dans la capitale, ce climat électoral n’est que le reflet de ce qui se passe dans l’ensemble du pays, et de son processus électoral.

En effet, les opposants critiquent une élection sans réelle compétition, sans débat libre, et sans liberté de la presse privée. Pour eux, la politique liberticide exercée par le gouvernement dure depuis maintenant cinq ans, il est donc temps d’en finir avec cette « infâmie ».

Les élections terminées, il est désormais l’heure de remettre sur le tapis les problèmes graves qui touchent tout le pays, et qui attendent une solution. Depuis le punch avorté de mai dernier, le Burundi est confronté à une vraie crise politique, et serait au bord d’une guerre selon certains opposants, qui clament d’ « arrêter de faire semblant que tout va bien ».

Après les élections, l’heure des négociation a sonné

Alors que le Burundi reste un des pays les plus pauvres au monde, la question est la suivante : « qu’est-ce que les populations peuvent-elles encore craindre ? ». La fin du Burundi ? C’est en tout cas ce que refusent de voir les patriotes qui s’insurgent afin que leur pays ne tombe pas dans l’abîme. Alors que la communauté internationale a vivement réagi face à cette situation, les négociations ont été lancées la semaine dernière entre le parti au pouvoir et les membres de l’opposition, sous médiation ougandaise. Alors que celles-ci ont été reportées à dimanche, la seule solution possible pour le moment restait celle du peuple.

crédit: Agence BUJUMBURA News

Le président Pierre Nkurunziza crédit: Agence BUJUMBURA News

En effet, le troisième mandat du président Pierre Nkurunziza peut déterminer le destin de la population du pays. Il est donc nécessaire de trouver un climat propice à des élections crédibles, mais aussi à une sécurité nationale. En effet, il n’est pas rare que la milice sous la direction du gouvernement tue des militants de l’opposition, seulement parce que ces derniers avaient osé donner leur opinion.

Une guerre qui s’installe ?

Ce qui est sûr, c’est que depuis le coup d’état de mai dernier, le pays est face à une prolifération d’armes. Suite à des manifestations de l’opposition, la milice aurait tiré sur plusieurs manifestants, provoquant ainsi l’insurrection armée d’une partie de la population. Le parti au pouvoir semble être seul contre tous, étant donné que la communauté internationale demeure à la solde de l’opposition.

Depuis plusieurs années, un processus de destruction des médias indépendants est en marche dans le pays. Le gouvernement avait aussi en tête de mettre en place une loi limitant les libertés de la presse. Cette dernière n’est cependant pas passée. Suite aux manifestations qui ont précédé le punch de mais, les radios privées ont été coupées du pays afin d’empêcher d’autres voix de se faire entendre.

Qu’en sera-t-il des prochains mois ?

crédit image de couverture: REUTERS/BUJUMBURA

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