Facebook, Twitter et sites de rencontres… Les réseaux sociaux imposent de nouveaux critères de beauté pour gagner en popularité. Certains font une drôle de moue, le “duckface”. Simple effet de mode ou nouvelle lubie photographique ?
EN MODE « DUCKFACE »
C’est un vrai combat de coqs, ou plutôt de canards, qui agite les réseaux sociaux. Bouche en cul-de-poule, pommettes creusées et yeux de biche : les internautes prennent la pose du “duckface”, à comprendre comme “tronche de canard” en français. L’analogie étant faite pour des lèvres excessivement accentuées, qui se rapprochent de la forme du bec des volatiles. Plus simple qu’une retouche sur Photoshop, la tendance est de se lifter le visage en adoptant cette drôle de pose.
Filles ou garçons, tout le monde y passe. Pourquoi s’afficher comme ça plutôt qu’au naturel ? Pour Julia, 23 ans, étudiante en communication visuelle, ce serait pour plaire :
Les lèvres sont pulpeuses, le visage devient lisse et le regard est intense. […] Je l’ai déjà fait plus jeune, avec des arrière-pensées séductrices.
Il faut dire que l’attitude n’a rien d’anodin. Elle correspond à des codes de séduction véhiculés par l’archétype de la femme persuasive, largement utilisé dans la société de consommation. Publicités, cinéma et même art contemporain, la bouche pulpeuse a depuis longtemps cette connotation sexy, voire sexuelle, qui la rend si désirable.
DES COUACS À GOGO
Dans une société où la recherche de l’hyper-sexualisation est permanente, la jeunesse s’expose constamment au regard des autres : les moins de 25 ans sont 62% à utiliser les réseaux sociaux pour publier des photos (étude TNS, 2012). Quasiment devenu une norme, le « duckface » tire plus souvent vers la grimace que l’arme parfaite de séduction. Et flirte parfois même avec la caricature de soi. Alors que certains frôlent le ridicule pour augmenter leur popularité virtuelle, d’autres se moquent et expriment leurs regrets sur les réseaux sociaux. Des groupes communautaires ou des blogs comme antiduckface.com se trouvent à profusion sur la toile.
Autre couac de la pose canard, et pas des moindres. L’évidence de l’artifice photographique dévoile une faille dans la représentation de l’individu sur le web ; l’autoportrait, largement utilisé dans les photos de profil sur les réseaux sociaux, permet au photographe de modeler sa propre image. Une sorte d’identité virtuelle exagérée, qui s’efforce de correspondre aux critères d’une beauté 2.0, au lieu de s’exposer au naturel.
Maxime Gasnier