Il suffisait de peu pour qu’une œuvre cinématographique exclusivement réservée aux tablettes et smartphones voie le jour. Une boîte de production Hollywoodienne a osé franchir le pas. Essai réussi ?
[divide]
UN FILM CONNECTÉ
«Ce n’est ni un film, ni une série, c’est vraiment quelque chose de différent.» Neal Edelstein, fondateur de Hooked Digital Media à l’origine du projet, cheveux courts grisonnants et chemise à carreaux, affirme au présentateur de Bloomberg que c’est exceptionnel, du jamais-vu, une véritable innovation. Sur la page dédiée à sa présentation, l’accent est mis sur sa collaboration avec le cinéaste et musicien expérimental David Lynch. Son goût pour les productions de films d’horreur est légèrement en retrait, même si elle est plus d’actualité. Il s’agit donc d’une application Apple entièrement cinématographique, partiellement gratuite pour iPad et iPhone. Il ne m’en fallait pas tant pour me décider à la télécharger.
Le tout premier écran propose une liste de 11 images, sans explications, un léger son accompagnant l’ambiance. Les 11 clips de la première série sont déjà disponibles à la vente, le premier est gratuit, le second sous réserve de partage sur Facebook. La présentation générale rappelle certaines œuvres de littérature électronique, à mi-chemin entre art et jeu d’enquête. Et Neal d’ajouter qu’«il s’agit pas seulement d’une histoire linéaire, mais d’une histoire vivante.» Une histoire basée sur qui ?
UN FANTÔME PASSE…
Le premier clip installe une ambiance très reconnaissable des films d’épouvante du type The Ring, qu’Edelstein a produit ou plus récemment Paranormal Activities. Il utilise la fonction principale de la tablette, à savoir les conversations vidéos. Tour à tour témoin et destinataire des vidéos, le premier clip ne présente pas vraiment d’interaction tactile pendant la lecture. Le principe de vue subjective est quant à lui pas totalement inconnu du genre : il est le principe du Projet Blairwitch, pour n’en citer qu’un.
Les quelques éléments de mauvaise qualité, probablement enregistrés avec les mêmes appareils que ceux sur lesquels ils sont visionnés, suivent donc Melissa, délaissée dans une grande maison envahie probablement par le fantôme de sa mère. À moins que sa mort récente fasse travailler son imagination. Son sang-froid est mis à l’épreuve lors d’un étrange événement : son ordinateur l’aurait enregistrée pendant qu’elle dormait…
SÉRIE À LA CARTE
Comme l’a dit Edelstein, «Avec l’application, c’est comme si nous avions installé un chaîne sur les appareils de nos clients, que nous pouvons contrôler.» Constat assez étrange, le film vendu serait incomplet, au prix de 70 cents de dollar le clip, 15$ la première saison en HD ou 7 en SD, l’équivalent d’une séance de cinéma en 3D avec pop-corn. Sauf que le produit n’est pas fini. La compagnie se défend de pouvoir modifier à loisir les clips existants, d’en créer d’autres selon les exigences des spectateurs… Un work in progress ?
Pas de grosse nouveauté dans le format, pas de trame exceptionnellement originale, volontairement sans montage, Haunting Melissa a pour lui la possibilité d’interagir avec l’histoire. Et encore, cette fonction était plus stimulante dans la série des livres ‘dont vous êtes le héros’. Certes, notre jugement est basé sur un dixième du film, il n’en reste pas moins frustré. Si Haunting Melissa n’a pas de de version française disponible, il pourra peut-être inspirer certains cinéastes francophones sans le sou. Mais par pitié, n’oubliez pas d’être originaux.
Crédits photos : Hooked Digital Media