Étrange relecture de la maternité de la Vierge, rythmée sans être punk, plus décalée que déjantée. Qui a dit que les Mormons étaient moroses ?
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Au fur et à mesure que nos yeux s’adaptent à la petite salle où est confinée Rachel pour sa confession, un fond sonore de mer déchaînée, quasi-assourdissant, prend le dessus sur ce qui devrait être une scène en pleine campagne. Juste avant le premier dialogue, le personnage principal à l’origine de cet effet spécial se fait taire : un lecteur de cassettes audio.
Rachel (Julia Garner) vit avec ses parents au fin fond de l’Utah, loin des perversions du monde et plus près du culte de Dieu. Curieuse de nature, elle explore une nuit la cave de son frère Mr. Will (Liam Aiken), qui regorge d’appareils électroniques. Après avoir écouté seule un tube rock au magnétophone, elle prétend être enceinte…
Comment réagirait-on aujourd’hui, si une jeune femme portait un enfant sans avoir eu aucun rapport au préalable ? On appellerait sûrement Dr. House. Admettons-le, nous ne sommes plus aptes à croire à l’irréel. Notre éducation a fait en sorte que toutes nos superstitions aient une explication rationnelle. Qu’en est-il d’une fille comme Rachel, conditionnée dans un fantasme de vie simple, et donc déconnecté des enjeux de notre société contemporaine ?
Partie d’un postulat assez simple, Rebecca Thomas explore pour son premier long métrage les méandres de la Foi, sans jamais l’expliciter, laissant son film avoir des airs de Martha Marcy May Marlene, voire de teen movie facile entre Mormons et jeunesse dépravée. De nombreux détails viennent apaiser ce jugement facile.
Lorsque Rachel se met en tête de trouver peut-être celui qui l’a engrossé en chantant à travers les enceintes du magnétophone, elle tombe sur un groupe de musiciens dans un Las Vegas déserté. L’un d’eux a les cheveux bruns et la barbe longue, comme un certain Joseph. Qui plus est, sur son tee-shirt est dessinée… une cassette audio. Un signe du destin ?
Entre candeur dérangeante et précocité sexuée, Electrick Children garde la tête froide, tient les clichés du genre à proximité sans jamais les railler, et tout au long de ce road-movie de fortune, garde notre attention focalisée sur ‘Hanging on the Telephone’, le tube vintage d’un groupe des années 1970, The Nerves. Et si Julia Garner imite peut-être un peu trop Elizabeth Olsen, son jeu minimaliste mais efficace annonce quelques bons passages pour la suite de Sin City.
Crédits photos : BAC Films