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Comment sont nés les Power Rangers ?

C’était en 1993, il y a 30 ans cette année, que sont nés les Power Rangers. Devenue incontournable dans la pop culture, comment est née cette série dont personne ne voulait ?

C’est l’histoire d’une série qui existe depuis 30 ans, qui compte pas loin de 1000 épisodes de 26 minutes … et dont pourtant personne ne voulait au départ. Les Power Rangers ont bien failli ne jamais voir le jour. Le genre auquel elle appartient, le sentaï, aura pu rester au Japon sans la détermination sans faille de celui qui a tout fait pour l’importer aux Etats-Unis : son producteur Haïm Saban.

C’est donc dans les années 70 que tout démarre. Saban est alors manager d’artistes en Israël, comme le groupe de rock The Lions of Juda puis il s’installe en France où il devient producteur de musique. Il s’occupe notamment de Mike Brant. Associé avec un ancien client devenu ami, le musicien et chanteur, Shuki Levy, il va produire de nombreuses bandes originales de dessins animés pour la jeunesse. C’est à lui que l’on doit le carton de Noam sur Goldorak mais aussi les versions françaises de génériques comme Starsky et Hutch, L’amour du risque et tant d’autres.
En 1983, il part s’installer à Los Angeles avec son partenaire Shuki Levy et va fonder Saban Entertainment et il produira les musiques de séries comme Jayce, L’inspecteur Gadget, Les maîtres de l’univers ou encore Mask. Mais c’est lors d’un voyage au Japon qu’une série va attirer l’attention son alors qu’il est dans sa chambre d’hôtel, un super sentaï, genre qui a démarré dans les années 70, et cette série qui va la fasciner c’est Bioman.

Dans cette 8ème série sentaï produite par la Toei, on suit le destin de 5 héros qui s’unissent autour du géant Bioman pour combattre le Dr Mad. Ces jeunes humains revêtent des tenues de combat de toutes les couleurs et sont pourvus d’armes redoutables. En découvrant cette série, Saban est fasciné et n’a qu’une idée en tête : la ramener aux Etats-Unis non pas sous la forme de remake mais de “semi remake”. L’idée ne serait pas de tout retourner mais d’utiliser les images des séries japonaises (quand ils sont en costumes et masqués) couplées à des images retournées pour l’occasion avec des acteurs américains (quand ils sont en « civil »).

Le gros avantage des sentai c’est que lorsque les héros ont leur tenue, leur visage est intégralement couvert. Il pourrait donc s’agir de n’importe qui en dessous. Le concept est donc simple : utiliser tout ce qu’on peut de la série japonaise puis retourner tout ce dont ils auraient besoin ou qui ne serait pas adapté au marché américain. Cheryl Saban, l’épouse du producteur se souvient de la première fois où il lui en parlé (dans le livre « Power Rangers: The Ultimate Visual History« ) : “J’ai trouvé que c’est une idée à la fois brillante et complètement dingue. Certes ces séries cartonnent au Japon depuis les années 70 mais les faire venir venir aux Etats-Unis, tenant compte de la présence de ces monstres et ces scènes d’action très particulières, représentait une entreprise sacrément audacieuse.”

Pour tenter de convaincre des partenaires ou des chaînes, Saban ramène des images de Bioman qu’il va incorporer dans un petit court métrage baptisé pilote qu’il va fabriquer pour l’occasion. Il va tenter de le présenter à différentes chaînes mais personne ne semblait apporter la moindre considération à ce qu’il avait à proposer. En 2010, dans une interview au New Yorker, Shuki Levy expliquait qu’à chaque fois que Saban présentait son projet à quelqu’un, on lui répondait que c’était la pire chose qu’ils avaient jamais vu. Mais Saban a bâti sa carrière sur la réputation de ne jamais lâcher un projet jusqu’à ce qu’il ait abouti. Et c’est ce qu’il va faire avec celui ci aussi, convaincu de tenir quelques chose de spécial. Et c’est de nouveau au Japon que son idée va prendre un tournant décisif. 

En 1991, Saban part au Japon rencontrer le Président de la Toei mais aussi Takeyuki Suzuki qui était le producteur exécutif des séries sentai depuis 15 ans. Ils se sont retrouvés autour d’un dîner et Suzuki se souvient de cette discussion : “Au début, nous n’arrivions pas à saisir ce que voulait Saban, tout simplement car c’est quelque chose qui n’avait jamais été fait ni même envisagé. Et pour un artiste, c’était même impensable de voir son travail réutilisé dans une oeuvre différente et nouvelle.” 
Pour tenter de convaincre ses hôtes de son réel intérêt, Saban décide de se mettre à chanter la chanson de la série en cours de diffusion au Japon, Jetman. Enfin pas LA chanson mais toutes le chansons que comportent la série. Il ne les a pas simplement fredonné, il les connaissait tout simplement par coeur. Dès lors, Il était clair pour eux que Saban aimait et connaissait vraiment la série. Suzuki a d’ailleurs précisé qu’”il était désormais clair pour la Toei que Saban savait vraiment ce qu’il voulait faire et j’ai personnellement ressenti sa réelle envie d’amener ses histoires aux enfants du monde entier”. 

A la suite de cette fructueuse rencontre, Saban revoit la Toeï et leur achète les droits des séries sentaï pour leur exploitation et leur adaptation en dehors de l’Asie. Comme Jetman a des intrigues plus matures que ce que souhaite Saban pour sa série, il est convenu que le deal commence avec la 16ème série, Zyuranger

Pour faire aboutir définitivement son projet auprès des chaînes américaines, Saban et son équipe vont fabriquer plusieurs versions, entre 8 et 12 minutes, basées sur la série Bioman. “Nous avons fait plusieurs versions”, raconte Joel Andryc, celui qui chez Saban Entertainment a aidé la compagnie à s’installer dans les programmes jeunesses. “On a tourné une version comédie, une version plus sérieuse, on a tout testé pour voir ce qui fonctionnerait le mieux auprès d’un public d’enfants américains”. Mais malgré tous ces efforts, personne ne se montre intéressé par le projet de Saban. Sauf une personne : Margaret Loesch, présidente de Fox Kids et grande productrice de programmes pour la jeunesse. Elle est venue voir Saban pour tenter de voir s’il aurait une série à lui proposer. En lui expliquant ce qu’elle voulait, Saban lui présente immédiatement son projet “Tout le monde dit que je suis fou mais regarde ça”. Et ça marche, Loesch adore ce qu’elle voit et va tout faire pour le vendre à la FOX. Beaucoup de gens ne comprennent pas son engouement pour ce projet mais elle est convaincue de détenir ce qui leur faut. Il faut dire que le mélange que propose Saban représente quelque chose de totalement nouveau dans le paysage télévisuel américain, ça n’a jamais été fait. En grande fan de Godzilla qu’elle a découverte étant petite, Loesch adore de ce genre de programmes où on devine les grosses ficelles derrière la production mais où le plaisir l’emporte. Elle est convaincu que ce projet sera la contre programmation idéale face aux autres programmes qui selon elle se ressemblent tous. Mais elle est loin de se douter combien l’avenir lui donnera raison…

Zyuranger qui a été choisi par les Américains pour la première saison, présente des héros qui tirent leur pouvoir des anciens dinosaures. C’est en utilisant une sorte de petit médaillon qu’ils se transforment et obtiennent leurs pouvoirs. Ces héros ont aussi pour les aider des robots en forme de dinosaure qui peuvent s’assembler les uns les autres en un énorme robot (comme le tigre aux dents de sabre pour “force jaune” ou le T.Rex pour “force rouge”).
Saban va incorporer les images de Zyuranger dans un pilote de 10 minutes qui présente la trame de l’épisode : la libération de Rita Repulsa de sa prison où elle avait été enfermée des milliers d’années plus tôt par Zoltar. Voyant la menace arriver, ce dernier téléporte dans sa base 5 jeunes gens pour les former au combat et leur donner leur pouvoir pour les changer en Power Rangers. Zoltar leur donne aussi leur robot, les droïds pour combattre les armées de Rita Repulsa. Ces droïds vont s’assembler pour former le mega dino droid. Ils parviennent à vaincre le monstre envoyé par Rita mais elle jure de se venger. Ainsi est né ce qui va devenir quelques mois plus tard les Power Rangers.

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Rédacteur en chef du pôle séries, animateur de La loi des séries et spécialiste de la fiction française
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