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Croatie : L’Europe faisait pourtant rêver

Fait peu connu du grand public, la Croatie intègrera l’Union Européenne à partir du 1er Juillet prochain. Mais dans ce contexte particulièrement dur de crise économique et sociale, le peuple croate est réticent à l’idée d’intégrer l’entité européenne.

 Après plus de 10 ans de tractations, le plus développé des pays des Balkans voit aboutir son cheminement d’une adhésion à l’Union Européenne tardive mais méritée au vue des efforts fournis.

Car dans nombre de secteurs, le gouvernement Croate s’est démené pour répondre aux multiples exigences de l’UE. En ce qui concerne le droit des femmes ou dans le domaine de la justice, par exemple, Bruxelles s’est montré intraitable. Elle a ainsi obligé la Croatie à extrader certains de ses ressortissants vers le TPY, le tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie. Au niveau économique aussi, Zagreb a du agir, devant s’aligner sur l’Union Européenne en ce qui concerne la libre-concurrence. Et c’est là, surement, que le bas blesse. Car si la Croatie a voulu faire amende honorable au nom de sa future adhésion en privatisant les entreprises publiques du pays, elle a aussi contribué à saquer sa propre économie, comme en témoignent les vagues de licenciements et la hausse constante du chômage croate –qui se monte à 22% et ne cesse de croître- , dus notamment aux rachats, par des fonds privés, des chantiers navals du pays, véritables moteurs de la croissance et fleurons industriels numéro un de la Croatie.

L’Union Européenne, bien sûr, agit comme un véritable soutien aux pays membres accusant un retard économique vis-à-vis des plus riches de l’union, comme la Croatie. On estime ainsi que d’ici à 2020, Bruxelles devrait apporter à ce pays des Balkans plus de 13 milliards d’Euros sous formes d’aides diverses.

 

Un désamour progressif

Mais s’ils sont promis à être aidés par l’UE, les croates sont tout de même réticents à l’idée d’intégrer l’alliance du vieux continent. En dépit d’une volonté massive du peuple balkanique de rallier l’Union Européenne au début des années 2000, cette envie d’Europe s’est peu à peu émoussée, la faute sans doute à des exigences toujours plus nombreuses de Bruxelles qui ont fait des conditions exigées pour la Croatie les plus dures jamais imposées à un état candidat à l’Europe.

Ce manque d’ardeur en vue de l’entrée prochaine dans l’instance supranationale européenne de leur pays dont font preuve les citoyens croates grandit de jour en jour : s’ils étaient, fin Janvier 2012, plus de 66% à se prononcer en faveur de l’adhésion de la Croatie à l’Union Européenne, un sondage réalisé fin Mars 2013 indique qu’ils ne seraient plus que 45% à y être favorables.

A ces sondages qui en disent long, s’ajoutent les faits : malgré l’appel au vote de la classe politique croate pour les législatives européennes, seuls 20% des citoyens du pays ont fait le déplacement jusqu’aux urnes le 14 Avril dernier, alors qu’ils devaient élire leurs représentants au parlement européen.

Ce soudain désamour de l’Europe vient aussi de la situation économique au sein même du vieux continent : dans une union européenne en récession où les moteurs économiques comme la France voient leurs PIB décroître, la perspective de rejoindre un organisme supranational -et par extension, sa monnaie unique, l’euro- en déclin économique rebute la Croatie, elle-même en récession depuis quatre ans.

La vision idyllique de l’eldorado européen apparaît alors comme une réalité passée bien loin de la prospérité de la CECA et de l’Europe des 6.

 

Croatie disagree

Un  passé croate qui en dit long

Enfin, si le peuple croate rechigne tant à intégrer l’entité européenne, comment ne pas y voir une peur du fédéralisme, celui-là même qui marqua tant l’Europe balkanique, et particulièrement les populations yougoslaves ?

Car si elle sort peu à peu la tête de l’eau en rattrapant son retard économique et démocratique sur ses voisins européens, force est de constater que la Croatie est un jeune état, jadis marqué par les conflits nationaux et interethniques. Malgré sa volonté affichée, en 2003, d’adhérer à l’Union Européenne, le pays voit toujours planer l’ombre des guerres balkaniques et de la domination soviétiques d’après-guerre.

Toujours est-il qu’au 1er Juillet prochain, qu’elle le veuille ou non, la Croatie intégrera l’Union Européenne, forçant, en quelques sortes, son intégration.

Et si les retombées économiques, à moyen terme, sont assurées, les bénéfices proviendront certainement d’un autre aspect de l’Europe : La rancœur qui sévit au sein des Balkans, celle-là même qui conduisit les peuples de la région à s’entretuer dans le courant des années 90, pourrait bien s’amenuiser avec l’Union Européenne. Car si les traités arrivent au compte-goutte, si les tensions sont encore palpables entre peuples de l’ex-Yougoslavie, la pacification de la zone pourrait provenir, à terme, de la naissance d’un sentiment européen.

Avec les probables adhésions d’autres états balkaniques (la Serbie, le Kosovo et la Macédoine sont officiellement candidats), à l’Union Européenne, les échanges commerciaux et diplomatiques pourraient être facilités par des accords inhérents à la zone européenne et pourraient ainsi permettre à la région des Balkans de connaître une paix réelle qui lui fait tant défaut aujourd’hui.

Ajouté à ces perspectives d’apaisement, les avancées réelles qu’a connu, de manière plus ou moins forcée, la Croatie, notamment dans des domaines tels que la justice, l’économie ou la politique amènent à penser qu’avant même son adhésion prochaine à l’entité supranationale, le pays a d’ores et déjà jouit des bienfaits de l’Union Européenne.

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