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L'e-sport, un domaine d'avenir

Manuel Valls s’est récemment dit favorable au développement de compétitions d’e-sport en France. Le député UDI des Alpes-Maritimes Rudy Salles et le sénateur PS de Saône-et-Loire Jérôme Durain lui présenteront leurs propositions d’ici juin prochain. L’intention : « sécuriser » la pratique de cette discipline en plein boom.

Noi, commentateur de League of Legends (LoL) avec son collègue Chips sur O’Gaming TV, a accepté de répondre à toutes nos questions sur l’e-sport. Il nous a parlé des problèmes de législation, de la perception  du jeu vidéo par la société, mais surtout d’une passion dont il a fait son métier.

Peux-tu te présenter et nous parler de ta passion ?

Noi : Je m’appelle Charles et j’ai 26 ans. Ma passion pour les jeux vidéo est née vers 5 ans, avec ma première console. J’ai toujours aimé ça et j’ai toujours traîné dans ce milieu, au grand énervement de mes parents. Du coup, j’ai l’équivalent d’un Bac +21 dans ce domaine !

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Comment a commencé l’aventure avec O’Gaming TV ?

Noi : Chips, je le connais depuis le collège. O’Gaming TV a été créé en 2010 et à l’époque LoL était encore un peu nouveau. Thud (Hadrien Nocicommentateur de Starcraft II avec Pomf, ndlr) arrive un jour et nous fait, à Chips et moi : « ça vous dirait de commenter ? » On a répondu pourquoi pas, et ça a commencé comme ça. Les débuts de LoL, c’était vers 2010. Aujourd’hui en 2016, on en est à la sixième saison. Jusqu’à la troisième année, on n’était vraiment que tous les deux, 70 heures par semaine, on commentait tout à deux ! L’un mangeait pendant que l’autre commentait, mais c’est vite devenu impossible. Il y a d’autres tâches en plus de commenter, du coup on a fini par recruter une vraie équipe de six-sept personnes avec trois ou quatre remplaçants. Par exemple, en février, il y en a trois à Lyon et deux en vacances… En gros, il faut être disponible de 9 h le matin à minuit, tous les jours, pour suivre toutes les compétitions.

On a vu des polémiques sur les jeux vidéo, par exemple au Grand Journal en 2014 avec le « Twitchgate ». Comment les gens perçoivent votre milieu en général ?

Noi : Il y a aussi eu la polémique créée par Nagui en 2014. C’est vrai que les jeux vidéo ont pendant longtemps été victimes de « bashing », avec le thème de l’addiction qui revenait régulièrement, on voyait des reportages sur « Jean-Robert, l’ado associal qui passe son temps devant les jeux vidéo« . Et à chaque attaque contre les jeux vidéo, mon coeur de gamer se brisait en mille morceaux (rires). C’est pour ça que la communauté réagit toujours au quart de tour et peut être parfois très violente.  Ce n’est pas une très bonne idée de s’en prendre à cette communauté car elle est très active sur Internet.

En fait, je crois qu’il y a surtout une très grande méconnaissance du milieu. On me demande souvent avec étonnement : « Ah bon, tu ne fais pas ça par passion ? » … Quand les gens m’interrogent sur mon métier, je leur explique que c’est la même chose qu’un commentateur de foot mais dans une autre discipline. Il faut leur rappeler que, maintenant, il y a des coachs, des entraîneurs, un mercato, des contrats d’un million… et que trois millions de personnes m’écoutent sur un week-end ! Une fois qu’on leur a dit ça, les gens répondent souvent : « Ah, je comprends maintenant« .

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Ailleurs dans le monde, est-ce différent ?

Noi : En Corée, c’est plus admis et accepté, c’est dans la culture. C’est un peu le temple de l’e-sport, ça s’est extrêmement développé là-bas. Mais pas autant qu’on le dit ! C’est  déformé et grossi dans l’esprit des gens. Aux Etats-Unis, l’e-sport se développe également beaucoup. Tous les gros joueurs européens sont rachetés en Corée, en Chine ou aux Etats-Unis.

Le Premier ministre a confié à deux parlementaires la mission de définir un cadre législatif et réglementaire pour encourager le développement en France des compétitions d’e-sport. Qu’en est-il de la législation actuellement et quels changements sont espérés ? 

Noi : Il y a encore du chemin à faire, on part de loin. On nous dit qu’on a le droit maintenant, mais ça fait quinze ans que ça existe ! On a encore beaucoup de problèmes, rien que pour remplir les cases sur les papiers administratifs, le métier « commentateur de jeux vidéo sur Internet » n’existe pas… Pour l’instant, on a encore un statut un peu « bâtard » puisqu’il n’y a pas de loi. Nous taxer, comme pour le poker, serait avantageux pour l’Etat. Mais il ne faudrait pas qu’il arrive avec ses gros sabots dans l’histoire. On est dans un milieu très concurrentiel, mais on peut se battre ensemble contre des ennemis communs. On ne sait pas encore si c’est un bien ou un mal que l’Etat s’intéresse à nous. On verra. Mais c’est sûr qu’il faudrait de la réglementation, parce qu’Internet est un milieu sauvage, il y a peu de règles, et comme la majorité des joueurs sont jeunes, ça manque parfois de professionnalisme.

Il y a aussi des problèmes avec les visas. Par exemple, récemment avec les visas de travail de Riou, un coréen, Diamond et Edward, des russes. C’est problématique parce qu’ils ne seront pas disponibles de toute la saison. Mais la politique des visas européens est un peu sensible en ce moment. Aux USA ça a mieux évolué, mais en Europe on n’est pas encore prêts apparemment. Obtenir un statut pour exercer son métier, ça permettrait que ce ne soit plus la croix et la bannière au niveau de l’organisation des compétitions.

Bientôt commentateur à la télé ? 

Noi : On sera à la télé d’ici deux ans, je pense, mais c’est impossible de comprendre un jeu vidéo comme LoL si ce n’est pas expliqué. Ce n’est pas comme pour le foot ou le rugby, c’est beaucoup moins grand public et plus difficile d’accès. Je pense donc qu’on sera plus sur des chaînes spécialisées.

Alors, le e-sport, un domaine d’avenir ?

Noi : Oui, c’est un domaine d’avenir, surtout pour des questions économiques. Ça engrange tellement d’argent, il y a plus de recettes que dans le cinéma ou la musique. LoL est le plus gros jeu au monde, il y a donc un intérêt pour les éditeurs et une demande forte de la part de l’audience. Les nouvelles plateformes comme Twitch attirent un public que la télé ne touche plus. Il y a 100 000 personnes sur Twitch par soir, et l’audience augmente en permanence.  Les grandes sociétés commencent enfin à se positionner sur ce terrain. Chez O’Gaming, nous sommes indépendants mais nos principaux concurrents sont rachetés par Webedia ou Allociné. Il y a de plus en plus de propositions de la part de ces grosses boîtes, c’est vraiment un milieu en pleine expansion.

Je crois que c’est un vrai phénomène de société maintenant. On est en train de créer un nouveau modèle économique : c’est du sport sans être du sport. Bien sûr, il y a des dérives comme dans tous les sports, on a vu des affaires de dopage aux amphétamines, par exemple. Le mercato, c’est la guerre, tout le monde s’arrache les joueurs. Il y a une espèce de starisation des joueurs, comme dans le sport « classique ». Tout cela est très nouveau et on ne sait pas trop où on va. Mais on s’invente, c’est une vraie aventure ! C’est aussi ce que j’aime dans ce métier.

Pour en savoir plus sur le e-sport : Génération e-sport

 Image à la une : Alt Tab Productions

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