Deux semaines après le premier débat et quelques jours seulement après des révélations fracassantes aussi bien sur Hillary Clinton que sur Donald Trump, le débat d’hier était important. Malheureusement, comme lors de leur première rencontre voire même un peu plus, les deux candidats ont manqué le coche et ont préféré revenir sur leurs petites affaires que sur la politique et leur programme.
Une fois de plus hier, le monde avait les yeux rivés vers les États-Unis et plus particulièrement la ville de St Louis dans le Missouri. La Washington University accueillait le second débat présidentiel de la saison, modéré par Anderson Cooper de CNN et Martha Raddatz de ABC et dont le format était un peu différent du précédent. En effet, il était question ici d’un town hall où des électeurs encore indécis choisis par Gallup, un institut de sondage, posaient des questions aux candidats mais cela n’a pas suffit à offrir un moment digne de l’occasion.
Un contexte difficile pour les deux candidats
Il y a trois jours, un enregistrement d’un programme de la chaîne NBC (où Donald Trump a travaillé) faisait surface outre-atlantique. On pouvait y entendre le candidat républicain parler de façon assez crue d’une rencontre avec une femme qui n’était pas Melania avec notamment l’utilisation du terme «pussy» pour désigner son sexe. Très rapidement, tout le monde est monté au créneau : aussi bien du côté républicain que du côté démocrate, cet enregistrement ne faisant que confirmer les soupçons qui planent sur Donald Trump…
Dure fin de semaine également pour Hillary Clinton, la candidate démocrate a en effet vu plusieurs discours qu’elle avait donnés devant des grandes banques en 2014 être rendus publics. Derrière cette manœuvre, se trouve le site internet Wikileaks dirigé par Julian Assange qui avait promis de faire des révélations explosives qui pourraient handicaper la candidate. On peut lire dans ces discours des positions défendues par Hillary Clinton devant des banquiers qui vont à l’encontre des propos qu’elle tient depuis le début de la campagne notamment sur le contrôle des banques et le libéralisme.
Enfin, quelques heures avant le début du débat, Donald Trump a une nouvelle fois révolutionné le processus habituellement inhérent aux campagnes. En effet, il a tenu une conférence de presse où il se trouvait aux côtés de trois femmes qui prétendent avoir été violé par Bill Clinton, des faits qui remonteraient à la fin des années 70. Les trois femmes étaient par ailleurs présentes dans les gradins lors du débat où cette question a été soulevée par Donald Trump, une tentative comme une autre de déstabiliser son adversaire démocrate.
Les enjeux du débat
Certains espéraient que ce débat permettrait à Donald Trump de se montrer plus présidentiable après une première performance très moyenne et à Hillary Clinton de montrer sa connaissance pointue sur de nombreux dossiers. Mais une fois de plus, il n’en était rien, pendant une heure et demie, nous avons assistés à une « guéguerre » où coups bas et menaces se sont succédés avec beaucoup plus de véhémence que lors de leur première rencontre.
Si le travail des modérateurs semblait relativement exigeant, les questions abordées par les deux journalistes ont surtout tourné autour des problèmes personnels des candidats : les mails d’Hillary, les propos misogynes de Donald et les polémiques créées par tout cela. Il faudra attendre les questions des membres du panel présents sur scène pour voir arriver des sujets beaucoup plus précis pour le plus grand bonheur de tout le monde.
Des modèles à suivre?
Une femme demande ainsi aux candidats comment ces derniers peuvent-ils être des modèles pour les jeunes qui ont pu assister à des propos dégradants tout au long de la campagne. Hillary Clinton débute en lançant une pique à Donald Trump, affirmant que ce « pays est déjà formidable » et qu’il faut simplement se « réunir de nouveau » pour aller plus loin. Le milliardaire comme lors du premier débat explique être « totalement d’accord avec Hillary » mais dès lors commence à parler de son parcours et ses débuts récents en politique plutôt que de la jeunesse.
Coups sous la ceinture
Après cela, on assiste pendant près d’une demie heure à une succession d’attaque en dessous de la ceinture de la part de Donald Trump qui évoque les supposées agressions sexuelles dont Bill Clinton serait à l’origine. Hillary Clinton semble se contenir à ce moment et préfère relancer la conversation vers la défiance du parti républicain dont Trump est la cible et lâche un lapidaire : « J’ai souvent eu des désaccords avec les républicains mais jamais avant aujourd’hui je n’ai eu de doute sur leur capacité à occuper la fonction présidentielle ». Il est ensuite question de l’Obamacare que le candidat républicain promet de supprimer sans proposer de réelles alternatives précises alors qu’Hillary Clinton promet de rendre le système plus juste.
Futur chef des armées
Autre point majeur de la soirée, la question de la Syrie où enfin on semble assister à une discussion qui pourrait être pertinente. Ce sera le cas, la candidate démocrate évoque le travail nécessaire à faire avec les partenaires des États-Unis, revenir autour de la table des négociations mais évoque aussi les « crimes de guerre » dont la Russie et la Syrie se sont rendus coupables dans le conflit. Donald Trump dénonce la position d’Hillary Clinton mais ajoute que l’alliance que forment la Russie, l’Iran et la Syrie est dangereuse pour le pays. Interrogé sur la position de Mike Pence (son colistier et possible futur vice-président) sur la question syrienne, il explique qu’il n’a pas la même opinion et que préparer le terrain sera nécessaire sans pour autant évoquer de plans précis.
Le débat s’achève sur une question que beaucoup rêvaient de poser, à savoir ce que l’un et l’autre considèrent comme la plus grande qualité de l’autre. Hillary Clinton, vraisemblablement embarrassée répond qu’elle « respecte profondément ses enfants » et que ces derniers « en disent beaucoup sur la personne qu’est Donald Trump ». Le milliardaire semble pour une fois sincère lorsqu’il évoque la combativité de son adversaire : « elle n’abandonne pas, c’est une battante et il faut lui reconnaître cela ».
Seulement quelques heures après la fin du débat, plusieurs sondages sortaient et on pouvait par exemple lire sur deux d’entre eux qu’Hillary Clinton avait la faveur des spectateurs. Avec 54% qui considéraient qu’elle avait été meilleure contre seulement 37% dans l’autre sens d’après le sondage réalisé pour CNN. Cela montre une chose, Hillary Clinton a été meilleure mais la véritable question est de savoir si elle a gagné ou bien si une nouvelle fois Trump a perdu. Dans l’un des deux cas, cela serait mauvais signe pour le ou la future occupant(e) du bureau ovale et cela quel que soit l’issue du scrutin qui a lieu le 8 novembre prochain.
CP de Une : AFP