Un exorciste pour réussir son bac? C’est la méthode à laquelle de nombreux parents d’élèves algériens ont recours.
650 000, c’est le nombre d’élèves qui s’apprêtent à passer leur baccalauréat en Algérie à partir du 1er juin prochain. Dans un pays où le taux d’échec était supérieur à 50% en 2013, tous les moyens semblent bons pour accroître les chances des candidats et l’un d’eux séduit particulièrement: la roqya (exorcisme).
Iman dans une mosquée de Blida (à 50km au sud-ouest d’Alger), Cheikh Mohamed Ziani a expliqué cette méthode à l’AFP. Le raqui (exorciste) lit le Coran en soufflant dans une bouteille d’eau ou dans un flacon d’huile que boit ensuite la personne sur laquelle est pratiqué l’exorcisme-elle peut également s’en enduire le corps. Le rituel a pour objectif de se préserver du mauvais oeil, de la magie et des maladies psychiques. L’iman remet également à l’élève une potion magique concoctée par ses soins à partir d’ouvrages de référence en matière d’islam. Un breuvage à base de miel, d’amandes, de grains d’anis, de pistaches et de raisins secs que l’élève doit accompagner de prières à réciter au début et à la fin de chaque épreuve. La même recette est préconisée « contre les troubles de l’érection » ironise un parent.
Ainsi, Cheikh Mohamed Ziani compte de nombreux fidèles qui s’en remettent à lui pour soigner leurs « âmes » dans une période de grand stress. Bien qu’il reconnaisse qu’il n’y a pas de « recette miracle » il affirme que « l’imam peut exorciser les démons de la peur et du stress« .
C’est donc tout naturellement que Karima s’est tournée vers un imam pour « calmer l’esprit de son fils » qui s’apprête à présenter les épreuves du baccalauréat scientifique dans l’espoir de suivre ensuite des études de médecine. « Je n’ai pas demandé à l’imam d’ordonner à un démon de souffler les réponses à mon fils pendant les épreuves, mais juste de prier pour lui afin qu’il retrouve un peu de sérénité: il est fatigué et souffre d’insomnies » explique cette enseignante à la faculté des Sciences Politiques d’Alger.
Idriss, étudiant en première année à l’université d’Alger se rappelle avec étonnement dans quelles conditions la meilleure élève de sa classe a échoué à cet examen de fin des études secondaires, l’année dernière: « Elle était tellement stressée qu’elle est sortie de la salle d’examen avant d’avoir terminé l’épreuve de mathématiques« . Une épreuve que lui-même a réussie et qui lui a permis d’obtenir son baccalauréat avec une moyenne de 10.7/20. Bien qu’il n’ait jamais eu recours à eux, il admet « comprendre le comportement des élèves qui vont chercher du réconfort auprès des exorcistes« .
Néanmoins cette méthode qui séduit n’est pas efficace sur tous. Le cheikh Ziani le confirme en admettant ne pas diagnostiquer le mal satanique chez certains de ses patients. Ces derniers, déçus, choisissent alors de se tourner vers des charlatants qui se font largement rétribuer pour des lectures des versets du coran. Après que certaines séances de roqya, très violentes, aient eu des fins dramatiques, l’ancien ministre des affaires religieuses, Bouabdallah Ghoulamallah, les avaient interdites dans les moquées et les écoles qui en dépendaient.