Le maire d’Aix-en-Provence, Maryse Joissains, a soumis un arrêté au préfet de police, qui vise à fermer les bars de la ville à 00h30, contre 2h jusqu’à maintenant. Une mesure qui ne passe pas, surtout auprès des étudiants. Explications
La nuit est tombée depuis plusieurs heures, mais pourtant, l’humeur festive de la ville ne faiblit pas. Ici on s’amuse, que ce soit sur la place des Cardeurs ou dans la rue de la Verrerie. On boit un verre entre amis dans les bars, on oublie un peu les cours. La bonne ambiance est là, au rendez-vous, comme toujours. À Aix-en-Provence, c’est comme ça depuis 2009, date où le maire a autorisé les bars du centre-ville à fermer leurs portes à 2 heures du matin. Et c’est cette bonne ambiance festive qui fait aussi le charme de la ville provençale ! Mais cette atmosphère légère pourrait bien n’être très prochainement qu’un lointain souvenir…
Aix est une des seules villes du département où les bars ne ferment pas à 00h30, et elle pourrait bien ne plus l’être longtemps. A la suite de plaintes trop nombreuses faites par les riverains ,pour nuisances sonores, la mairie a en effet saisi la préfecture. Dès le 1er juillet, les bars fermeront à minuit et demi. Et le moins que l’on puisse dire c’est que cet arrêté qui prône le calme dans la ville, fait beaucoup de bruit.
« Une mesure d’une stupidité sans nom »
Pour les étudiants d’Aix-en-Provence, c’est clair, c’est un sujet très délicat qui suscite de nombreuses objections et critiques. Comme Thomas, un étudiant en Fac de Sociologie, qui trouve que « Cette mesure est d’une stupidité sans nom. »
Selon lui, « Même si on ferme les bars à minuit et demi, ce qui n’est pas un horaire très tardif, les jeunes se retrouveront quand même dans les rues d’Aix-en-Provence, pour festoyer comme il se doit.»
Et il est loin d’être le seul à penser ça. Du côté de la Fac de Lettres, Charef aussi fait partie de ces étudiants qui s’opposent à un tel projet. « Aix, c’est une ville étudiante, c’est une ville où on rencontre beaucoup de personnes, où on sort le soir. Si les bars ferment vers minuit, ça va vraiment gâcher une ambiance, sans forcément changer les choses au niveau des nuisances sonores. »
Il est important de savoir que ces témoignages ne sont pas deux cas isolés. En effet, en moins de deux jours, près de 6000 personnes se sont mobilisées sur les réseaux sociaux, afin de contester et d’espérer sauver leur « vie nocturne » qui fait partie des spécificités de la ville.
Gérants de bars et étudiants sur la même longueur d’onde
Mais cet arrêté n’est pas seulement controversé par les étudiants. Car si on les prive de leurs sorties qui sont chères à leurs yeux, il ne faut pas oublier que ce sont les établissements qui seront les plus touchés et pénalisés !
Le « Cutback » situé place des Cardeurs à Aix
Sur la place des Cardeurs, le Cutback, un bar d’Aix-en-Provence réputé pour ses Mojitos, et surtout pour sa bonne ambiance, sera lui aussi touché, comme l’explique son gérant, Julien. « Si le Préfet décide de fermer nos bars à minuit, il faut bien comprendre que les nuisances ne cesseront pas car elles sont causées par des jeunes étrangers à nos établissements et que les gens ne rentreront pas directement chez eux mais resteront quand même sur la place. De plus il ne faut pas négliger l’impact qu’une telle mesure pourrait avoir, notamment la suppression d’emploi de nos salariés. Il ne faut pas se leurrer, les jeunes n’iront pas se coucher à 00h30! »
C’est vrai que, pour ne parler que de la place des Cardeurs, on compte des centaines de jeunes qui s’y réunissent chaque samedi soir !
Et Julien poursuit: « Nous respecterons la décision du Préfet. Cependant, il faut savoir que les bars savent tenir leur clientèle. Les débordements et nuisances sur la place des Cardeurs ont lieu à l’extérieur des bars avec des jeunes qui apportent leur propre alcool et leur musique. Il ne faut pas tout confondre. »
Pour Romain, étudiant en fac de Physique, les résultats pourraient être encore pires qu’une simple montée des nuisances sonores « Les jeunes qui seront en état d’ébriété sur la voie publique laisseront surement leurs bouteilles par terre et pollueront la ville. Alors ce sera encore moins agréable pour les riverains… »
« Un moyen de réprimander les jeunes »
Et si ce genre de mesure –si elle est appliquée- risque fortement de ternir l’image d’Aix-en-Provence en tant qu’une des principales villes étudiantes de France, elle pourrait être perçue comme une atteinte directe aux libertés des jeunes.
C’est le constat d’Astrid, une étudiante en terminale à Aix-en-Provence « Je me rends régulièrement au centre-ville d’Aix le soir, surtout les week-ends pour prendre un verre entre amies sur la place des Cardeurs. Je suis bien consciente de l’agitation et du bruit occasionnés sur cette place. Cependant, je pense que cette réforme n’est pas une solution, au contraire elle risque de porter encore plus préjudice aux habitants. Cette réforme est aussi une fois de plus un moyen de réprimander la jeunesse et de lui donner mauvaise réputation. Nous avons de moins en moins de droits et d’espaces qui nous sont consacrés. »
L’arrêté du maire d’Aix-en-Provence, Maryse Joissains-Masini, a été transmis au préfet de police Laurent Nunez, et est actuellement en cours d’étude. S’il est acté, il entrerait en vigueur le 1er juillet.
Propos recueillis par Camille DENIS