Lancée en 1992, la saga Hélène et les garçons, devenue Les mystères de l’amour, va refermer un nouveau chapitre de son histoire. En attendant le prochain ?
Hélène. Elle s’appelle Hélène. Elle est une fille… comme les autres… ou presque. Car depuis 1992, elle est l’héroïne de plusieurs séries à succès, un succès public toujours aussi vivace, même avec près de 1000 épisodes de Les mystères de l’amour et même si l’audience s’est tassée avec les années. D’ailleurs, TF1 a décidé de mettre un terme à la série après 14 ans.
A la manière de ses grands soaps américains, les aventures de la « tribu d’Hélène » se sont déroulées sur nos écrans. Qu’importe que certains trouvent la série ringarde, qu’importe que la critique aime à se défouler sur elle, le public la soutient encore et toujours.
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En mai 2016, Les mystères de l’amour est devenue la série la plus longue de la franchise, et entre dans le club assez fermé des très longues séries hebdomadaires de la télévision française (au côtés de Sous le soleil), hors feuilletons quotidiens bien entendu.
Derrière cette grande saga, un homme, Jean-Luc Azoulay, qui a créé un gigantesque univers de séries dont les histoires se croisent et se recroisent. Tout comme les personnages.
Aux origines d’une série culte
En 1987, Dorothée débarque sur TF1 pour devenir animatrice du mythique Club Dorothée mais aussi responsable de l’unité jeunesse de la Une, nouvellement privatisée. Déjà chanteuse depuis quelques années, l’animatrice est accompagnée sur scène par une bande de musiciens, Les Musclés. C’est par eux que les fameuses sitcoms AB vont faire leurs débuts puisque Azoulay et Berda (A et B de AB) décident de leur confier une sitcom.

Si le genre est très connu aux Etats-Unis depuis les débuts de la télévision (I love Lucy date de 1952), il ne l’est que très peu chez nous. Il y a eu bien entendu le carton de Maguy sur Antenne 2, et dès 1988, TF1 produit déjà Vivement Lundi. Mais c’est véritablement avec les sitcoms AB que le genre va prendre son envol. Et avec Salut les musclés, J.L Azoulay va créer tout un univers de séries entrecroisées les unes les autres. Ainsi c’est dans Salut les musclés que va apparaître le personnage de Justine, future héroïne de la série Premiers Baisers, jeune collégienne dont la sœur va rentrer à la fac, une sœur qui s’appelle… Hélène et qui aura sa série, Hélène et les garçons.
Mais c’est aussi à partir de cette époque que la terminologie va devenir floue et que les termes de « sitcom » et de « soap » vont se confondre. Car à de rares exceptions et si on met de côté les rires enregistrés, les séries AB n’ont que très peu de rapport avec le genre sitcom. Hélène et les garçons est plus un soap pour les jeunes et Premiers Baisers une sorte de teen drama avant l’heure en format vidéo (il n’y a pas de drames dans les sitcoms, à la différence de beaucoup de séries AB).

Un succès durable
Ce qui a permis à ces séries de s’installer, c’est bien entendu l’énorme présence médiatique des émissions de Dorothée qui diffusent en boucle ces programmes. Comme il l’avait fait avec Dorothée aux débuts des années 80, JLA va faire chanter quasiment tous les comédiens de son écurie, renforçant ainsi leur présence dans toutes ces émissions, qui diffusent leurs clips en boucle et les invitent lors des grands directs du mercredi.
Mais on ne peut pas réduire leur succès à la surmédiatisation de ces programmes. Ce serait bien trop simple et ça ne suffirait pas à expliquer le phénomène de société que deviendra une série comme Hélène et les garçons qui réunissait au plus fort de sa carrière jusqu’à 6 millions de téléspectateurs. On peut reconnaître un talent à Azoulay : il sait faire du « tube » que ce soit en matière de musique comme en matière de séries. Il sait aussi comment créer un lien particulier entre le public et ses programmes grâce à ses animateurs comme ses comédiens qui forment tous une sorte de famille. Et puis les programmes de Azoulay correspondent à une certaine époque de la télévision, à une certaine idée que l’on s’en faisait et dont certains ont aujourd’hui la nostalgie.
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Les raisons du succès
Le miracle de l’amour. Les vacances de l’amour. Et aujourd’hui, Les mystères de l’amour. Chaque week-end, un ou deux épisodes inédits de la 3ème série dérivée de Hélène et les garçons sont diffusés sur TMC, offrant à la chaîne de très jolis scores d’audience. Même recette qu’à son lancement, mêmes intrigues ou presque, et toujours le même succès auprès du public. Il est indéniable qu’il y a un vrai attachement du public non seulement à cette série, mais surtout à ces comédiens. Il n’y avait qu’à être au Festival de la fiction TV de la Rochelle ou à Canneséries pour le constater.

La très longue file d’attente pour les dédicaces parle d’elle même. Et cette longue file d’attente n’était pas uniquement constituée de trentenaires ou quarantenaires nostalgiques. Une nouvelle génération de spectateurs s’est emparée de la série pour en faire la sienne. On parle d’attachement. Qu’il s’agisse d’un attachement nostalgique pour une bande qu’on a toujours connu, ou un vrai engouement récent pour ces aventures, le public aime Hélène, Nicolas, Cri-Cri, Fanny ou Laly ; il aime les retrouver chaque Week-end ; il aime découvrir les nouvelles chansons d’Hélène ou de Fanny incorporées à la série comme au bon vieux temps du Club Dorothée.

Le multivers de Jean-Luc Azoulay
L’autre grand force de Jean-Luc Azoulay est d’avoir transformé Les mystères de l’amour au fil des années en cocon douillet pour retrouver des visages qui avaient pour certains disparu des écrans depuis les années 90. Ainsi, il se plaît à convoquer dans sa série des personnages issus des autres séries AB (comme Philippe de La philo selon Philippe, Mme Pichardeau des Filles d’à côté, les Musclés bien entendu, ou encore Annette, Roger et Justine de Premiers Baisers), comme de la saga Hélène (le dernier en date est David Proux aka Etienne qui a fait son retour dans la série quelques 29 ans après l’avoir quitté). Cette technique rend l’univers très riche et instaure une connivence, une complicité avec le spectateur qui a tout suivi depuis le début. Il a aussi, du coup, l’impression d’appartenir à cette grande famille.


Il y a enfin un dernier aspect qui est, cette fois, à mettre au crédit des comédiens, c’est leur très grande sincérité et leur attachement non seulement au programme, mais aussi aux uns les autres. Au fil des années, ils sont devenus des amis qui prennent plaisir à travailler ensemble chaque jour. Reconnaissant pour leur public qui ne les a jamais lâché, y compris quand de l’autre côté, ils se faisaient « taper dessus », cette troupe d’acteurs est devenue aujourd’hui une famille d’acteurs dont l’authenticité et l’honnêteté transparaît à chacune de leur sortie publique. Ils savent ce qu’ils font, ne se bouchent jamais le nez eux et ça le public le reconnait et le récompense.
Une page se tourne ?
Mais toutes les bonnes choses ont visiblement une fin, TF1 a annoncé la fin de la série à l’approche de la barre symbolique des 1000 épisodes. Il n’y aurait plus de place dans la grille de TMC pour la diffuser. Ce ne sont pourtant pas les programmes « inédits » qui se bousculent dans la journée. Mais la série ne doit plus correspondre à l’image que la chaîne veut donner de ses fictions. Jean-Luc Azoulay proposera pour les fêtes ce qui ressemble à un final pour la série …tout en assurant aux fans que la série se poursuivra ailleurs, sur une autre chaîne en 2026. Le dernier épisode s’appellera d’ailleurs « Amis pour la vie » ce qui pourrait tout à la fois symboliser le point final de la série comme le titre de la prochaine itération. Même si à date, aucune information n’a filtré quant à une reprise de la série.

Tout en restant fidèle au programme, les fans de la série ont souvent critiqué le côté alambiqué des histoires (pourtant propre à ce type de série) et le manque de renouvellement. La série a sans doute avec le temps pâti des conséquences d’un tournage en région parisienne là où le tournage des Vacances de l’amour dans les îles faisait une partie non négligeable du travail en matière de décors. De plus, on avait parfois l’impression que les intrigues de la série ressemblaient plus aux « missions » que recevait le Club Dorothée à la grande époque pour ses émissions de vacances qu’à de vraies histoires de fiction (des sectes prônant la fin du monde, des robots qui se branchent pour se recharger – façon JaPatCor dans le Club Do pour ne citer qu’eux).
Enfin, si le noyau dur de la série a toujours assuré le job avec beaucoup de sincérité et de talent, certains personnages ont eu du mal à prendre même s’ils sont restés longtemps dans le programme. De la même manière, voir comment la bande accepte les visions de Laly ou ne se posent jamais de questions sur Ingrid depuis 14 ans est assez « fascinant ». Il reste une troupe d’amis qui ont su marquer leur époque et marquer le public durablement et sincèrement. Des amis que l’on espère continuer à voir pour la vie.