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La colère paysanne

Des milliers d’agriculteurs ont répondu à l’appel de plusieurs syndicats agricoles mercredi 27 novembre en se réunissant dans quelques grandes villes françaises pour crier le mal-être de plus en plus grandissant dans le secteur agraire.

Une mobilisation organisée et spectaculaire

Mercredi, tôt dans la matinée, plus d’un millier d’agriculteurs sur leurs tracteurs ont roulé en direction de Paris. Ils venaient des Hauts-de-France, de Normandie, d’Île-de-France, du Grand-Est et de Bourgogne-Franche-Comté et étaient bien décidés à se faire entendre. Leur mobilisation fait suite à l’appel à manifester des syndicats agricoles FNSEA (Fédération Nationale des Syndicats d’Exploitants Agricoles) et JA (Jeunes Agriculteurs).

Plusieurs axes routiers ont été bloqués partout en France durant la journée. Les agriculteurs mobilisés autour de la capitale se sont répartis en deux groupes. Certains sont restés sur le périphérique parisien tandis que d’autres ont atteint les Champs-Elysées où il eut quelques tensions avec les CRS sur place. En effet , avant l’intervention des forces, quelques agriculteurs avaient déchargé un peu de paille sur l’avenue. À quelques centaines de mètres, environ 200 tracteurs sont restés bloqué sur le périphérique intérieur. Les villes de Lyon et Toulouse ont également connu une mobilisation importante des agriculteurs.

Luc Smessaert, vice-président de la FNSEA et éleveur-polyculteur dans l’Oise, explique que la date du mercredi 27 novembre n’est pas anodine. Elle a été choisie par les syndicats pour faire entendre les revendications des agriculteurs avant la grève nationale prévue jeudi 5 décembre. En effet, les agriculteurs souhaitent exprimer et faire comprendre leur colère et la fracture de plus en plus grandissante entre eux et les Français.

Un ras-le-bol du « agribashing »

Il y a, au sein du monde agricole, un mal-être croissant. Beaucoup d’agriculteurs ont l’impression de ne pas être compris par les Français. Les agriculteurs mobilisés mercredi ont exprimé leur mécontentement face au « agribashing », c’est-à-dire le dénigrement systématique et fréquent du monde agricole dans l’espace public et notamment dans les médias.

Ce terme peut s’expliquer par exemple avec les attaques de certaines associations « anti-viande » contre des élevages. Ces dernières sont d’ailleurs un des facteurs créant une distance et une incompréhension entre les éleveurs et une partie de la population française. Les agriculteurs ont l’impression de devenir un bouc émissaire auquel on reproche tous les maux de notre système de consommation. Les débats publics autour de la maltraitance animale ou des pesticides restent problématiques pour eux dans le sens où ils renvoient une image négative du monde agricole sans prendre en compte pour autant tout le contexte. Les agriculteurs ne se sentent pas écoutés et le fossé entre eux et le reste de la population se creuse.

Mais ce sentiment est du aussi à certaines mesures politiques ou accords de libre-échange. Le CETA, accord commercial entre l’Europe et le Canada, et l’accord UE-Mercosur sont vivement contestés du fait d’une concurrence déloyale entre les agriculteurs français et ceux d’autres pays. La Loi EGalim est également remise en cause car considérée comme incohérente.

Ainsi, les agriculteurs ont souhaité par cette mobilisation mettre en lumière le malaise qui s’accroit au sein de leur profession et amener la société à se questionner sur sa relation avec eux. Concernant les mesures politiques, les manifestants ont souhaité faire entendre aux députés comme au gouvernement leurs revendications.

Contre-attaque contre une politique estimée défavorable pour les agriculteurs

Évoquées déjà lors des actions syndicales des 8 et 22 octobre 2019, les récriminations adressées au gouvernement et aux élus en général concernent surtout les traités de libre échange, les ZNT (Zones de Non Traitement) et la loi EGalim.

Le CETA, impliquant des tonnes de viande bovine importées du Canada, est perçu par les éleveurs comme une concurrence déloyale. L’accord UE-Mercosur, qui renvoyait ce même sentiment, est critiqué du fait de la position du président. Emmanuel Macron avait menacé en septembre 2019 de s’en retirer mais sa position reste floue.

À lire aussi : Accord Mercosur-UE : Macron contre-attaque face à Bolsonaro https://vl-media.fr/accord-mercosur-ue-macron-contre-attaque-face-a-bolsonaro/

Les allers-retours concernant la taxation de l’huile de palme agacent également les agriculteurs qui demandent plus de clarification.

Il y a aussi le sujet polémique des pesticides et des ZNT. Les mesures prises à ce sujet sont l’objet de réelles tensions entre les pouvoirs publics, la FNSEA et les associations environnementales. L’arrêté concernant ce sujet devrait entrer en vigueur le 1er janvier 2020 mais il est toujours rejeté par un grand nombre d’agriculteurs.

Enfin, la loi EGalim et notamment l’article 44 sont contestés pour leur incohérence. En effet celui-ci interdit la vente de produits agricoles en France ne respectant pas les règles sanitaires européennes. Pourtant, le CETA autorise l’importation de viande provenant du Canada et ne respectant pas ces réglementations.

La mobilisation agricole a donc pour objectif de dénoncer des mesures politiques jugées injustes et de mettre en avant le mal-être de toute une profession.

Rencontre avec Edouard Philippe le 3 décembre prochain

La mobilisation s’est achevée dans la soirée après une rencontre entre le ministre de l’Agriculture et les syndicats agricoles. La présidente de la FNSEA, Christine Lambert, a demandé la fin de l’action et a annoncé une rencontre avec le Premier ministre, les JA et la FNSEA le 3 décembre pour faire un point sur la situation.

Crédits photo : Valery HACHE /AFP

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Maëva, 20 ans Journaliste VL Média Bordeaux
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