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« L’Antifascisme, pour moi, c’est viscéral »

Antifa. Un mot. Plusieurs combats. Aux lendemains de la mort de Clément Méric et de la manifestation contre le fascisme qui se déroulait dimanche dans Paris, un antifasciste témoigne de son militantisme.

Antifa anonyme

L’appeler. Première étape qui reflète les menaces pesant sur mon interlocuteur. J’apprends que Marc* change de téléphone à chaque appel. Il reçoit des intimidations régulières. Son blog ne sera pas nommé. Son pseudo Twitter non plus, car il craint d’être prochainement censuré par des militants extrémistes. Son nom, son âge, son visage resteront inconnus pour vous et moi,  il ne veut pas être pris de nouveau pour cible. Par l’extrême-droite, mais aussi par la police. « On est obligé de maintenir notre anonymat, car notre travail n’est pas légal. Le contenu est vrai, mais il nous arrive de regarder les boites mail des personnes qui nous intéressent ». Marc est donc fiché par les autorités et nous fait comprendre que son casier judiciaire est bien chargé. Pour éviter qu’on ne le trouve, il a quitté sa famille. Il ne leur rend visite que quelques fois. Il n’a ni adresse, ni compte en banque depuis quatre ans. Marc veut nous rassurer : « Je ne suis pas en fuite ».

Cet antifasciste anonyme a commencé les actions militantes à « 15 ou 16 ans ». Auprès de partis politiques d’abord. « A gauche, et non pas, comme les journalistes le disent, à l’extrême gauche. Je considère qu’il n’y a qu’une seule gauche » précise-t-il. Puis lorsque son parti, la Ligue Communiste Révolutionnaire, se joint au Nouveau Parti Anticapitaliste, il quitte les rangs et rejoint les antifascistes. « J’en avais ras le bol des questions internes, des réflexions sexistes, homophobes et putophobes au sein du parti». Marc ne croit plus en la voix électorale. « Le Front de gauche a pensé utiliser les urnes, c’est de la connerie. Les antifascistes sont des libertaires. On ne se bat pas pour être au pouvoir, on ne veut pas d’autorité ».

Un antifa anticapitaliste

Traquer les frontistes fascistes par tous les moyens possibles, c’est une des actions des antifascistes. Fouiller dans les boites mails, les comptes Facebook et Twitter, ainsi que les blogs, ce sont quelques-uns de leurs moyens. Je lui demande s’il est hacker. « Dans ma vie professionnelle, je travaille dans la sécurité informatique. Vous aurez compris ». Message reçu. Marc et ses camarades font très vite le lien entre Front National et fascisme. Il craint que le FN ne devienne en France ce qu’ Aube Dorée est en Grèce et le Jobbik en Hongrie. « Je ne suis pas non plus là pour crier au loup. Tous les frontistes ne sont pas des fascistes. Mais en cinq minutes, je peux vous en trouver un ».

Si le fascisme prend une place importante dans son action, Marc se dit aussi anticapitaliste. Les casses de la manifestation de dimanche ? Il les assume. « Nous ne sommes pas pacifistes car le capitalisme est violent. Le capitalisme n’est pas pacifiste quand il expulse un sans-papier. Encore moins quand l’Hôtel Rana Plaza du Bengladesh s’écroule sur les ouvriers du textile pour nous habiller nous, les occidentaux. Le capitalisme tue ».

Marc précise que l’essentiel des activités antifascistes n’est tout de même pas violent. Distribution de tracts, autocollants et affiches font aussi leur quotidien.

L’utopie en marche

Jusqu’à la mort de Clément Méric, les antifascistes ne recevaient pas de soutien particulier. Ni dons, ni mots d’encouragement. La mort du jeune homme a poussé certaines personnes à envoyer de l’argent. « C’est la première fois que des gens nous apportent de l’aide. Ce que nous voulons, c’est des personnes capables de lutter contre l’extrême droite, de venir coller des autocollants et participer aux manifestations. Au contraire de la Manif pour Tous, nous ne prenons pas l’argent des gens ».

Marc croit avec ferveur en son combat. Quitte à se mettre en danger. « C’est viscéral. Je ne peux pas rester de marbre quand quelque chose va à l’encontre de la justice sociale. Je suis soit déprimé, soit révolté ». L’antifascisme est son combat, la fin du fascisme son idéal. Une utopie ? Au bout de la ligne, on sent le sourire qui se dessine. « Je citerai Victor Hugo : « L’utopie c’est la vérité de demain » ».

 

* Le prénom a été inventé

 

 

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