Alors que des milliers d’auteurs en herbe tentent de s’arracher tous les ans les très rares contrats d’édition dans les grandes maisons, une nouvelle solution émerge : l’autoédition. En effet, une nouvelle génération d’auteurs, très présente au salon et ayant souvent essuyé plusieurs refus de la part des grandes maisons, évoque les plateformes d’autoédition comme une solution face à un secteur très verrouillé. Facile d’accès, laissant une grande liberté aux auteurs, les plateformes d’autoédition se multiplient : tour d’horizon des solutions existantes découvertes à Livre Paris.
Iggybook est une plateforme développée pour permettre aux auteurs de fabriquer de vendre, et de promouvoir leurs livres selon leurs envies en version numérique, en version papier ou les deux.
Chez Iggybook, la publication numérique s’organise par le biais d’un logiciel en ligne qui permet de fabriquer très facilement un livre à partir de fichiers Word ; logiciel qui ne connait pas encore d’équivalent sur le marché francophone. L’équipe d’Iggybook accompagne les auteurs en herbe lors d’ateliers d’écriture, dont certains organisés pendant le Salon du Livre sur toutes les étapes de la publication : de la fabrication d’un livre à sa promotion, mais aussi par mail et par téléphone de façon directe. La version numérique, chez Iggybook, comporte l’avantage incontestable d’une diffusion à grande échelle : en effet, les auteurs sont distribués chez la grande majorité des libraires numériques du marché (Google Play Store, Amazon, Fnac.com, iBookstore…).
Cette plateforme ne se limite pas au numérique : elle propose en effet les service nécessaires à la diffusion de l’œuvre au format imprimé (via l’impression à la demande) en mettant son équipe à la disposition de l’auteur pour tout ce qui concerne les aspects techniques : mise en page, choix du papier, etc. Une fois le livre papier terminé, c’est le réseau Hachette, l’un des leaders du livre en France, qui prend le relais de la distribution.
L’avantage de ces nouvelles prestations n’est pas seulement la visibilité, il est aussi économique. En effet, Iggybook se présente avant tout comme un prestataire de services : lorsque l’auteur commercialise lui-même son livre via son site personnel, ou celui de son éditeur, la plateforme ne touche pas de commission. Lorsque le livre est vendu sur Iggybook, la plateforme empoche 50% de la vente de chaque livre, laissant donc la moitié restante à l’auteur. Une bonne opération, lorsque l’on sait que la part de l’auteur dans un contrat d’édition classique se situe généralement entre 8% et 12%.
Librinova est également une plateforme d’autoédition qui existe depuis 2 ans, créée par Laure et Charlotte, deux anciennes éditrices frustrées d’avoir dû laisser passer tant de manuscrits… Le principe est globalement le même : un manuscrit, déposé en cinq minutes chrono sur la plateforme, est mis en forme par l’équipe de Librinova avant d’être mis à disposition chez tous les libraires et sur les sites de vente numérique.
Cependant, certaines différences sont à noter : tout d’abord, Librinova ne prend aucune commission sur les ventes de l’auteur. Celui-ci paye un forfait compris entre 50 et 75€ au départ, plus d’éventuels frais de services supplémentaires comme l’impression ou la promotion, mais la totalité des revenus générés lui reviennent.
De plus Librinova se présente surtout comme une passerelle vers l’édition dans les grandes maisons. En effet, dès 1000 exemplaires vendus sur la plateforme, l’équipe de Librinova revêt la casquette d’agent de l’auteur et va se charger de débusquer la maison d’édition la plus à même d’accepter de publier le livre, puis se charge de la négociation des contrats. Un partenariat qui profite tout autant à l’auteur, qui est accompagné du début à la fin par la plateforme, qu’à la maison d’édition qui s’assure ainsi de la qualité du manuscrit et de l’auteur qui lui sont présentés.
L’éventail d’auteurs sur Librinova est extrêmement large, de 18 ans environ jusqu’aux grands retraités. Les jeunes auteurs entre 18 et 25 ans publient majoritairement du « young adult » ou de la romance, deux genres qui cartonnent sur le site. Pour exemple, le roman écrit à quatre mains par Jeanne et Louise Corolle, deux jumelles de 20 ans, sous forme de textos : Trop bien pour moi, paru à la fin du mois de Février a déjà dépassé les 300 ventes sur le site.
Filiale d’Amazon pour l’autoédition : Kindle Direct Publishing
Amazon s’est imposé comme le leader incontestable de l’autoédition grâce à son format Kindle, qui permet de toucher des millions de lecteurs dans plus de 170 pays. La publication sur cette plateforme est totalement gratuite, contrairement aux autres plateformes.
C’est par le biais d’une application connexe, KDP select, que la marque Amazon rend son opération d’autoédition financièrement intéressante à la fois pour elle et pour l’auteur. En souscrivant à KDP select, l’auteur signe un contrat d’exclusivité avec Amazon, tandis que le lecteur qui y accède paye un abonnement qui lui permet ensuite d’accéder à la sélection. L’auteur est alors rémunéré au nombre de pages lues et a, par ailleurs, une avance sur droits garantie par KDP.
La particularité d’Amazon est donc son système d’accès au livre numérique, tant pour l’auteur qui publie gratuitement et de manière exclusive que pour le lecteur. Un contrat d’exclusivité qui pose cependant le problème de la diversité car si 4 livres numériques sur 10 sont publiés sur Amazon, ils ne représentent que 8% de la production papier.
Qu’en pensent les auteurs ? Le couple Jacques et Jacques-line, représentent tous les deux les pionniers du secteur de l’autoédition en France via la filiale d’Amazon, KDP select. Une solution qui permet, selon le couple, de limiter tout le travail annexe à la publication.
Jacques et Jacques-Line Vandroux, un couple amoureux de l’autoédition.
Jacques Vandroux a connu un succès très rapide sur Kindle après la publication de son premier roman en version numérique, Les pierres couchées , un thriller entre réalité et fantastique promenant son lecteur sur la côte bretonne et à Paris, en passant par la Martinique. Sa femme et lui se rappellent encore des difficultés posées par ce modèle d’édition, quand l’aventure a commencé pour eux il y a déjà quatre ans. Aujourd’hui, de nombreux blogs se développent pour expliquer aux jeunes auteurs les secrets et les écueils de l’auto-édition : Jacques-line Vandroux l’a bien compris et, riche de son expérience, a publié un livre qui connait un succès dans le milieu, Grimpez dans le top 100, pour bien débuter dans l’auto-édition numérique. Elle ne s’est d’ailleurs pas arrêtée là puisque Jacques-line tient également un blog très complet sur le travail d’écrivain de son mari mais également sur ses autres coups de cœur chez les auteurs auto-publiés.
Jacques a, quant à lui, commencé l’écriture lors de ses déplacements en train ou en avion, simplement animé par le besoin de coucher sur papier les histoires que ses enfants devenus grands n’avaient plus besoin d’écouter avant de s’endormir : « Un jour j’ai ouvert l’ordinateur et j’ai commencé quelques pages sans avoir aucune prétention… L’écriture, c’est du plaisir avant tout ! »
Comme pour beaucoup d’autres auteurs autopubliés, c’est avant tout l’aventure humaine qui est mise en avant. Ces plateformes placent, en effet, le lecteur et l’auteur au même niveau : « ce qui est extraordinaire, c’est qu’on est complètement face au lecteur » témoigne le couple. Une proximité qui peut cependant faire autant de bien que de mal : pour chaque commentaire positif, qui mettent du baume au cœur, on trouve un commentaire négatif, parfois blessant, qui suscite déception et incompréhension. Pour éviter cela, le couple n’a qu’un seul secret : une grande rigueur de travail pour réduire les erreurs de débutants. Un manuscrit sans faute de français, tout simplement !
L’autoédition constitue donc une nouvelle scène d’expression pour les auteurs en herbe, de tout âge et de tout genre pour faire connaitre leur passion et, de plus en plus, percer dans le monde littéraire. En effet, de plus en plus de grandes maisons d’édition font appel au service de plateforme d’autoédition pour connaître de nouveaux auteurs, se servant de ces plateformes comme un service très fiable de présélection. « Les éditeurs nous voient un peu comme un moyen de filtrer en amont » affirme François Gerbert (directeur général de Storylab et directeur des opérations chez Iggybook). Plutôt que de parler de concurrence, les acteurs du milieu préfèrent donc parler de complémentarité, même si d’après ces plateformes, on note une tendance des auteurs publiés dans les grandes maisons d’éditions à revenir au numérique.