Que penser du féminisme aujourd’hui ? Après le succès de son album Places, Lou Doillon fait la promotion de son prochain album prévu pour le mois d’octobre. Dans une interview accordée au journal El Pais, la fille de Jane Birkin et Jacques Doillon reconsidère le féminisme tel qu’il est véhiculé aujourd’hui. Elle s’en prend, au passage, aux grandes stars comme Nicki Minaj, Beyoncé ou encore Kim Kardashian.
Les figures du féminisme étaient-elles vraies ?
La chanteuse Lou Doillon s’attache à donner sa vision du féminisme, fustigeant celles qui en ont été les icônes du mouvement, en passant par sa propre mère. « Quand on pense à Jane Birkin ou Françoise Hardy, on les considère comme des femmes libérées. En réalité, elles ne l’étaient pas, elles le faisaient seulement paraître. Hardy dit que sans Jacques Dutronc, elle n’aurait rien fait de sa vie et ma mère dit qu’elle doit tout à Serge Gainsbourg. » a-t-elle déclaré. Selon ses dires, l’émancipation de la femme est un fait propre à sa génération et non à celle de ses aînées. Elle se targue de pouvoir « foutre un mec dehors », car elle dispose de son propre salaire et d’une maison à son nom. Mais elle craint que cette évolution vers une plus grande liberté pour la femme ne soit bafouée par les attitudes de certaines vedettes qui se revendiquent, pourtant, comme étant des icônes du féminisme.
Vers une dérive du féminisme ?
Dans le viseur, se placent en première ligne les stars Nicki Minaj et Kim Kardashian : « Quand je vois Nicki Minaj et Kim Kardashian, je suis scandalisée. Je me dis que ma grand-mère a lutté pour autre chose que le droit de frimer en string. » Lou Doillon ne pèse pas ses mots pour faire part de son indignation, ajoutant : « Comme les hommes ne nous tapent plus sur le cul, nous le faisons nous même. Comme personne ne nous appelle plus chienne, nous nous appelons comme ça entre nous ». Beyoncé est vouée au même sort que les deux autres, Lou Doillon pointant le clip où la star américaine chante nue sous sa douche, suppliant son mari ivre de lui faire l’amour. Pour la Française, les musiques de « Queen B » ne sont que des morceaux servant à assouvir les fantasmes des hommes. « C’est dangereux de croire que c’est cool » souligne Lou Doillon. Le risque d’intériorisation de ces attitudes de séduction est d’autant plus fort pour les nombreuses fans, que la chanteuse américaine est plus que vénérée.
Beyoncé fait du féminisme sa marque de fabrique
Ce discours ravive la polémique autour du féminisme supposé de Beyoncé. Alors qu’elle se présente comme une ardente féministe, défendant corps et âme l’égalité entre hommes et femmes, la star américaine a été à de nombreuses reprises pointée du doigt par les milieux féministes. Beyoncé a multiplié les initiatives pour devenir la figure de proue du féminisme : Run the World (Girls) en 2011, qui la filmait en amazone moderne et soutenait que les femmes gouvernent le monde, Pretty Hurts qui dénonce les diktats esthétiques et Flawless qui reprend plusieurs passages du discours « Nous devrions tous être féministes » de l’écrivaine nigériane Chimamanda Ngozi Adichie. De quoi faire d’elle la féministe guerrière qui fait de son corps sa principale arme. Ce qui n’est pas du goût de tout le monde.
Cette sensualité exacerbée déplaît à de nombreuses féministes. Une chroniqueuse du Guardian avait écrit dans une tribune : « Beyoncé : te faire photographier en sous-vêtements n’aide pas le féminisme », en référence à sa photo en petite tenue en une de GQ en janvier 2013. D’autres blâment également une instrumentalisation du féminisme, qui sert à glorifier la chanteuse et qui ne relève pas d’un véritable acte de militantisme. Un coup de communication qui indigne les ferventes féministes qui voient leur cause détournée en un simple outil de marketing.
Clarisse Duppré