« Le monstre ». C’est le surnom donné à Patrick Henry, 62 ans, condamné en 1977 à la réclusion à perpétuité pour le meurtre d’un enfant. Ce jeudi 25 février, la justice examine sa demande de libération conditionnelle.
En janvier, Patrick Henry avait obtenu un parcours de probation de 16 mois par le tribunal d’application des peines de Melun. Ce dernier avait cependant été bloqué en appel par le parquet. Cette quatrième demande de libération conditionnelle a été déposée en juillet 2014, après le refus d’une grâce présidentielle de François Hollande. L’affaire Patrick Henry a marqué les années 1970, autant pour l’émoi qu’elle a provoqué à tous les Français, que pour sa symbolique dans la lutte contre la peine de mort.
« La France a peur »
Le 30 janvier 1976, le petit Philippe Bertrand, sept ans, est enlevé devant son école, à Troyes. Le ravisseur appelle sa mère, et lui demande une rançon d’un million de francs. Les policiers avertis tracent un deuxième appel le soir même, et localisent l’homme. C’est alors un jeu du chat et de la souris qui commence. Patrick Henry est arrêté le 11 février, mais nie tout en bloc et se déclare innocent. Selon lui, « le véritable criminel mérite la peine de mort pour s’en être pris à un enfant ». Faute de preuves, il est relâché. L’enquête mènera finalement à la découverte du corps de l’enfant, enroulé dans un tapis sous le lit d’une chambre d’hôtel, louée par Patrick Henry.
La question de la peine de mort
Le procès s’ouvre le 18 janvier 1977. C’est Robert Bocquillon, bâtonnier de l’ordre des avocats, qui se charge de défendre le meurtrier, soutenu par Robert Badinter. Ce dernier se lancera dans une longue plaidoirie, où il fait le procès de la peine de mort. Il évoque notamment l’exécution par la guillotine de Claude Buffet et Roger Bonnets — les deux derniers guillotinés à Paris — en 1972, et « le bruit que fait la lame qui coupe un homme vivant en deux ».
Il s’adresse également aux jurés, et leur dit : « Si vous décidez de tuer Patrick Henry, c’est chacun de vous que je verrai au petit matin, à l’aube. Et je me dirai que c’est vous, et vous seuls, qui avez décidé ». Reconnu coupable, Patrick Henry est condamné le 20 janvier à la réclusion criminelle à perpétuité, échappant de peu à la peine de mort. Seuls sept membres du jury ont voté pour cette dernière. Dans le système judiciaire de l’époque, il fallait huit voix sur douze.
« Que dit la loi ? Tu ne tueras pas ! Comment le dit-elle ? En tuant ! » — Victor Hugo
D’autres condamnations à la peine de mort ont été prononcées après le procès, mais le verdict de l’affaire Patrick Henry permit de lancer un vrai débat. Quatre ans plus tard, Robert Badinter est nommé ministre de la Justice. Il fait voter l’abolition de la peine de mort en France.
Une liberté conditionnelle révoquée en 2003
L’homme avait déjà obtenu sa mise en liberté conditionnelle en 2001, après 25 ans de prison. Avec son livre « Avez-vous à le regretter ? », dont la presse avait fait largement l’écho, il gagne environ 100.000 euros. Néanmoins, s’il apparaît comme le parfait modèle de la réinsertion, cette image se brise avec un vol à l’étalage en 2002. En octobre de la même année, il est arrêté en Espagne en possession de près de 10 kg de cannabis. Sa liberté conditionnelle est révoquée, le tribunal correctionnel de Caen le condamne à quatre ans d’emprisonnement et 20.000 euros d’amende.
Cela fait désormais près de 40 ans que Patrick Henry est en prison. Pour son avocate, Me Delaby-Faure, « Patrick Henry porte sur ses épaules le symbole de l’abolition de la peine de mort, c’est un symbole très lourd. Si Patrick Henry ne s’appelait pas comme ça, il serait déjà sorti depuis longtemps ».
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