Les députés européens ont adopté le 16 juin en commission un projet de directive sur le « secret des affaires ». Ce texte vise à protéger les informations commerciales des entreprises pour favoriser la compétitivité.
Un texte qui revient au galop
On le pensait définitivement enterré, mais le texte fait son grand retour sur la scène européenne. Le secret des affaires figurait déjà dans le projet loi macron, porté par le ministre de l’Economie, Emmanuel Macron. Cependant, sous l’insurrection des journalistes, l’amendement avait été directement retiré. Désormais voté par les députés européens, le secret des affaires n’a pas fini de provoquer des remous parmi les journalistes. Une pétition a déjà été signée par plus de 300 000 personnes, sous l’impulsion d’Elise Lucet, présentatrice sur France 2. Une tribune a également été publiée dans le quotidien « Libération » pour dénoncer « ce projet de directive qui fait du droit à l’information une exception ». Elle rassemble des personnalités de tous bords, allant d’Eva Joly, députée européenne EELV à Christian Paul, député PS, en passant par Aurélie Filippetti, ancienne ministre de la Culture et la Communication.
Une mesure qui nuit profondément au travail journalistique
« C’est une nouvelle arme juridique de dissuasion contre la presse » s’insurge Fabrice Arfi, journaliste à Mediapart, sur France info. « Dès que le journaliste obtient un document confidentiel, l’entreprise peut porter plainte. Elle peut demander des dommages et intérêts de dizaines de milliers d’euros ». Le secret des affaires constitue en effet une menace pour les lanceurs d’alerte. Les entreprises pourront dès à présent les attaquer en justice sous prétexte que leurs révélations portent préjudice à l’activité de l’entreprise. L’heure est à la compétitivité et à la lutte contre l’espionnage industriel plus qu’à la liberté d’expression journalistique. Une série de sujets tels que les banques, entreprises ou laboratoires pharmaceutiques ne pourront plus faire l’objet d’enquête. Les affaires HSBC, Luxleaks, UBS sur l’évasion fiscale et d’autres sujets sensibles tels que le dossier Karachi, le dossier Tapie et le Crédit lyonnais n’auraient, par exemple, pas pu voir le jour avec cette mesure.