Pour sa seconde soirée de diffusion, Romance s’effondre dans les audiences, un très mauvais signal envoyé à une fiction française différente et de qualité.
On l’a dit et redit : Romance est un petit bijou, une série comme on en voit peu sur nos grandes chaînes de télévision. Et ça ne risque pas de s’arranger quand on regarde ses audiences. Si son démarrage n’était pas sous les meilleurs cieux, la seconde soirée vire au cauchemar : la série est 4ème des audiences derrière Arte avec 1.7 millions de téléspectateurs. Même avec un succès en replay (ce qui est le cas), ça ne suffira pas pour remonter la pente. Certes la série peut être clivante mais l’évolution entre les deux soirées n’est pas rassurante.
Dans d’autres pays, d’autres paysages audiovisuels, ça pourrait ne pas être handicapant. Mais on est en France …
Un mauvais signal pour la fiction
On pourrait se dire que finalement ce n’est pas grave. On est sur le service public et proposer des fictions différentes, audacieuses, fait partie de ses missions. On pourrait se dire aussi qu’il est normal de faire moins d’audience avec Romance qu’avec un polar grand public ou un feuilleton quotidien efficace et fidélisant. On pourrait oui. Mais dans les faits est-ce le cas ?
Même si la tendance est de penser et de dire le contraire, France Télévisions a pris des risques avec ces fictions depuis de nombreuses années. Elle a mi à l’antenne des œuvres différentes comme Un village français, Chefs, Philharmonia, Zone Blanche, La vie devant elles, Une belle histoire, Aux animaux la guerre, Romance et même joué avec les codes du polar pourtant hyper calibré avec Double Je ou Cherif. Mais même en voulant oser, même en voulant remplir sa mission de service public, on ne fait pas non plus de la télévision pour soi, mais pour un public qui vient la voir.
Certes on ne doit pas fabriquer des séries qu’en fonction de « codes » qui apporteraient un succès garanti, de l’audience (ce n’est pas le rôle de service public). Pour autant, si l’audace et la qualité des programmes ne sont pas en cause, tant que des enquêtes classiques fonctionneront mieux en première diffusion ou en rediffusion qu’une série qui « ose » bousculer le spectateur, alors il y a fort à parier que leur présence à la télévision continuera de se réduire. Et c’est vraiment dommage !
Pour que cela change, il faudrait que les chaînes acceptent de ne pas faire la même audience avec tous ses programmes (la mission de service public n’est pas que tous les publics se retrouvent dans toutes les séries mais qu’il y ait des séries pour tous les publics) ; il faudrait aussi que le public cesse d’être plus dur avec sa fiction nationale, qu’il ne l’est avec n’importe quelle fiction venant d’ailleurs et qu’il soit cohérent quand il réclame plus de projets différents mais qu’il ne vient pas les voir quand on lui offre. Mais peut-être, sans doute même, que ce public qui pourrait aimer une série comme Romance n’est plus devant la télé (preuve en est le succès en replay de la série) et que celui qui reste n’est pas aussi intéressé.
Heureusement, l’audace et le succès des fictions de France.TV et Slash font du bien, prouvent qu’on peut tenter des choses et on aimerait que cela se répande dans la fiction dite linéaire et pas justement à terme cantonné à une fiction digitale.
Reste que Romance existe et existera longtemps et on espère que dans une télévision qui connaît une crise sans précédent (à cause du Covid), on n’assistera pas à un repli encore plus prononcé sur des valeurs dites sûres et qu’une frilosité générale ne se répande pas. On ne l’espère pas.
Rendez-vous en septembre avec un projet comme La garçonne pour en avoir le cœur net.