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Les enfants en temps de guerre : une cible de choix

Enfants soldats, enfants martyrs, enfants otages… On le sait, les conflits armés touchent bien souvent des populations démunies, rendant celles-ci encore plus vulnérables qu’elles ne l’étaient auparavant. Et a fortiori les enfants.

Que ce soit au cœur du conflit israélo-palestinien, de la guerre civile qui fait actuellement rage en Syrie, en Irak, en Centrafrique ou en Ukraine, les civils, et plus particulièrement les enfants, sont en première ligne. Visés par des tirs de roquettes et de missiles, soumis à la faim, à la peur et en manque de tout, de soins comme d’éducation, ceux-ci voient leur avenir compromis par le chaos des affrontements. Eux qui, à seulement 12 ans, voire moins, ont déjà connu plusieurs guerres.

Les enfants en temps de guerre : une cible de choix

Chaque année, des milliers d’enfants meurent pour une guerre dont ils ne connaissent même pas les causes.

Les enfants, dommages collatéraux innocents

Comme disait le philosophe français Jean-Paul Sartre : « Quand les riches se font la guerre, ce sont les pauvres qui meurent ». Et le fait que les combats soient sortis du champ de bataille, se déroulant à présent au sein de la population civile, assure un peu plus la véracité de cette citation. D’ailleurs, exposés à des risques sanitaires, à l’exploitation sexuelle ou au trafic d’organes, les enfants sont les principales victimes de la barbarie humaine car plus fragiles. Sans ressources, n’ayant pas d’abri en dur où se réfugier, quand ils en trouvent ils sont la cible privilégiée des bombardements. En témoigne cette école de l’ONU dans la Bande de Gaza, touchée hier par un obus. 15 Palestiniens y auraient trouvé la mort, dont une grande majorité de femmes… et d’enfants. Car tuer la jeunesse a une symbolique forte que chacun des groupes armés, quel qu’il soit, a bien compris. Assassiner des enfants c’est exécuter l’avenir, frapper le pays ennemi dans sa pérennité. Sinon, pourquoi abattre des adolescents dans la fleur de l’âge –ce qui a déclenché un regain de tension au Proche-Orient ?

Hormis les attaques dont ils sont victimes, les enfants sont aussi les dommages collatéraux des conflits parce que souvent isolés de leur famille. Ainsi, en 2008, 18 millions d’enfants ont été forcés de fuir de chez eux, selon le  Comité International de la Croix-Rouge (CICR). Des chiffres qui font écho à l’alarmant rapport du Haut-Commisariat pour les Réfugiés publié le 20 juin dernier. Mais surtout des déplacements massifs qui engendrent un nombre de séparations affolant. Pour preuve, les dizaines de milliers d’enfants rwandais arrachés aux bras de leurs parents –si tant est qu’ils ne les ont pas vu mourir sous leurs yeux– dans les années 1990, ou la situation qu’a connue la République Du Congo ces dernières années. Des enfants qui, une fois seuls et livrés à eux-mêmes, deviennent adulte par la force des choses, alors qu’ils ont à peine atteint l’âge de raison. Ou qui sont embrigadés dans des milices, bouclant la boucle du massacre.

L’ONG Save The Children montre les ravages de la guerre au travers des yeux d’une fillette dans cette vidéo poignante. Ou comment la haine fait basculer une vie de bonheur dans un univers de chaos :

Enfants soldats : tuer ou être tués

Faire combattre des enfants : une pratique abjecte et archaïque qui remonte au Moyen-Âge. Selon l’Unicef, en 2007, plus de 250 000 enfants ont été utilisés comme soldats. En Ouganda, dans les contingents de l’Armée de Résistance du Seigneur (LRA), les enfants représentent même une proportion estimée à 80 %. En effet, ceux-ci sont des recrues extrêmement précieuses pour les groupes armés puisqu’ils sont plus dociles et faciles à manipuler que les adultes mais aussi, par leur âge, moins conscients du danger.

Bien souvent enrôlés de force, obligés de tuer pour ne pas être tués à leur tour, certains enfants rejoignent toutefois volontairement des groupes armés. Et les raisons de ce retournement de situation peut-être difficile à comprendre sont (malheureusement) très logiques : le bouleversement de la société dû à la guerre, la perte de repères, le manque d’accès à l’éducation rendant leurs esprits plus perméables à l’idéologie. Mais aussi est surtout la soif de vengeance ou la tentation du pouvoir et de la considération dont jouissent les porteurs d’armes. Dans un témoignage à la CICR, Akaash se souvient par exemple d’être entré dans un groupe armé au Népal à l’âge de 10 ans « parce qu’ils m’ont offert de l’argent, une arme et une occasion de prouver que j’étais quelqu’un ». Une envie de prendre sa part dans la bataille qui n’est pas propre aux garçons car de nombreuses filles viennent grossir les rangs des milices. Ainsi, en République Démocratique du Congo, 40% des enfants-soldats étaient de sexe féminin durant la guerre civile au début des années 2000. Quand elles ne servent pas simplement d’objets sexuels ou d’otages aux membres qui les détiennent, comme les 223 lycéennes enlevées au Nigéria le 14 avril 2014. Car les enfants sont une monnaie d’échange précieuse dont le kidnapping a des répercussions médiatiques planétaires, les ravisseurs le savent bien. Mais n’oublions pas que, comme le disait justement le poète Jacques Prévert, « ceux qui donnent des canons aux enfants sont ceux qui donnent des enfants aux canons ».

L'innocence devrait avoir l'avenir entre ses mains... pas un fusil.

L’innocence devrait avoir l’avenir entre ses mains… pas un fusil.

Une jeunesse en ruine

« Nos enfants meurent en bas âge parce que personne ne vient les vacciner ni les soigner. Nous n’avons pas d’enseignants, nos enfants ne savent ni lire ni écrire. […] Quand ils atteignent l’âge de 12 ans, nous devons les cacher pour que les guérilleros ne les recrutent pas », révèle un Colombien interrogé par le CICR. « Pourtant, même en temps de guerre [l’opposition entre les FARC notamment et le pouvoir politique en place met actuellement son pays à feu et à sang, ndlr] on continue d’avoir des enfants parce qu’ils sont ce qui demeure quand on a perdu tout le reste ». Malheureusement, quel avenir les attend ? Comment pourront-ils grandir correctement dans une situation socio-politique incertaine ? Pour répondre à ces questions, l’Unicef a mené son enquête et rendu, en mars dernier, un rapport portant sur l’évolution psychique des 5,5 millions d’enfants syriens. Les conclusions qui en émanent tirent la sonnette d’alarme. Premier constat : les chocs post-traumatiques sont nombreux et très graves. Entre le fait de voir des gens mourir autour d’eux, d’être eux-mêmes victimes de blessures ou d’être violés, les enfants risquent de développer des sentiments de paranoïa intenses ou une sociopathie violente. Le pédopsychiatre Stéphane Clerget le confirme d’ailleurs : « la guerre fabrique des criminels en puissance ». En effet, pour se protéger contre cet environnement meurtrier qu’est la guerre et y survivre, les enfants peuvent briser d’eux-mêmes tous liens affectifs. Et devenir, par la suite, incapables de la moindre empathie. Bref, aujourd’hui, tout se combine pour « dévaster une génération entière », déclare l’Unicef.

Et pas qu’une génération, semble-t-il : plusieurs. Car les conséquences de la guerre en Syrie toucheront jusqu’à la génération suivante, a annoncé l’Unicef. Analysant que « ceux qui n’arrivent pas à se départir du poids de la violence peuvent transmettre leur douleur à leurs propres enfants ». Espérons qu’au contraire, témoins de l’horreur humaine, ces pauvres enfants seront les futurs artisans de la paix.

Les enfants en temps de guerre : une cible de choix

Tous les enfants subissent la guerre, que ce soit en vrai ou de derrière un écran.

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