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L’état d’urgence s’intensifie en Ethiopie

L’état d’urgence est en place depuis moins d’une semaine en Ethiopie pour tenter de museler une contestation qui fomente depuis des années ; lorsque, dimanche 16 octobre, le gouvernement annonce de nouvelles mesures imposant des restrictions de déplacements à travers le pays ainsi que l’interdiction de consulter plusieurs médias d’opposition. Les diplomates étrangers ont reçu une interdiction générale de se déplacer hors de la capitale Addis-Abeba, à moins de détenir une autorisation spéciale.

Mais que se passe-t-il en Ethiopie ? Comment est-ce possible que ce pays, économiquement puissant, que son père fondateur Haile Selassie avait imaginé en nation forte, indépendante, affranchie, ait pu en arriver là ? Comment est-ce concevable que regarder Oromia Media Network et Ethiopian Satellite Television, des médias qui n’appartiennent pas à l’appareil d’Etat, soit illégal ? Les réseaux sociaux ont été interdits, le gouvernement les labellisant « moyens de communiquer avec des entités terroristes. » Croiser les bras au-dessus de sa tête est également interdit ! Le coureur olympique Feyisa Lilesa effectue ce geste lorsqu’il arrive en deuxième position de sa course à Rio. Pourquoi une telle schizophrénie d’interdictions à tout va ? Que se passe-t-il ?

Crédit: BBC

Crédit: BBC

Un scénario tristement familier 

Une fois n’est pas coutume, certains groupes, les Oromo et les Amhara, se sentent marginalisés par le Ethiopian People’s Revolutionary Democratic Front (EPRDF), constitué en majorité de membres du groupe Tigray. L’état d’urgence a été déclaré le 9 octobre après des manifestations violentes qui ont causé des dégâts matériels importants à travers le pays. Pas moins de 500 personnes sont mortes depuis le début de ces protestations qui ont débuté l’an dernier. Peu avant, le gouvernement avait annoncé un plan d’extension de la capitale qui aurait débordé sur le territoire Oromo.

La colère gronde, et le gouvernement l’entend. La semaine dernière, le Premier Ministre a annoncé des réformes concernant le processus électoral pour permettre une plus grande représentativité électorale des différents groupes qui constituent la population éthiopienne. L’opposition a déclaré « too little, too late. »

Lire aussi : Etat d’urgence déclaré en Ethiopie

Une lutte universelle

Un état d’urgence mène souvent à des abus de la part de ceux qui le déclarent. Nous avons pu le constater en France cette année avec des arrestations arbitraires, des détentions et des interdictions de nature politique, qui ont flirté avec la limite de nos libertés individuelles et citoyennes, et les ont parfois grossièrement piétinées.

Trop souvent, l’Occident observe l’Afrique avec une distance froide, un œil condescendant et une forme de supériorité assumée. Il y a une fâcheuse tendance collective à se détacher de ses failles démocratiques et de voir que les droits de l’homme ne sont pas respectés dans leur totalité. On aurait tendance à penser que cela est symptomatique à l’Afrique, un continent distant dont on a du mal à mesurer l’énorme potentiel. Mais le véritable enjeu est de réaliser quelque chose de fondamental – les droits de manifester, de réfléchir, de s’exprimer, d’être en désaccord, d’agir en tant que garde fous, de superviser les actions de nos dirigeants, ceux qui nous avons élu, ceux qui nous inondent de promesses électorales – tous ces droits ont été acquis certes, mais les préserver reste une bataille constante, quel que soit le pays d’origine ou de résidence.

Nous étions tous Charlie, nous devrions tous être l’Ethiopie, le Yémen, Haïti, la Syrie, et on en passe. La lutte contre l’oppression, la démagogie et les interdictions d’être, de dire, de faire, est universelle.

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