Alors que le téléfilm de conclusion de la série Looking sera diffusé ce samedi 23 juillet sur HBO, retour sur les 2 saisons de cette œuvre atypique et attachante.
Looking c’est quoi ? Les amours, les joies et les peines de trois amis gays à San Francisco. Entre regrets, valses hésitations et autres impulsions du moment, Patrick, Agustin et Dom partagent leurs déceptions, leurs rêves, leurs désirs, la vie en somme.
Lorsqu’elle a débarqué sur HBO en début d’année 2014, on n’attendait pas grand-chose de Looking qu’on imaginait à tort comme un nouveau Queer as Folk ou un pendant masculin en moins bien de The L Word, qui n’apporterait rien de nouveau. Il faut se méfier des à priori et c’est encore plus vrai en matière de séries. Car si le premier épisode nous avait laissé dubitatif, nous confortant dans nos idées préconçues, le reste de la saison 1 nous aura renversé par sa sensibilité et sa délicatesse ainsi que par une écriture des plus subtiles, qui s’affranchit de la communauté qu’elle évoque pour parler à tout le monde. Les auteurs sont parvenus à trouver un juste équilibre en dépassant l’apparence de série de niche qu’elle arborait pour se parer d’une liberté de ton et d’une fraîcheur revigorantes. Car Looking est une série qui s’adresse à tout le monde, c’est une série à hauteur d’hommes et de femmes aux prises avec les vicissitudes de l’existence et l’orientation sexuelle de ses personnages n’empêche nullement d’évoquer des thématiques dans lesquelles chacun peut transférer ses propres interrogations. Que ce soit la réalité de la crise économique, la peur de s’engager, le délitement des sentiments, la recherche de stabilité professionnelle et affective, Michael Lannan offre aux téléspectateurs l’occasion de se projeter dans les situations qu’il fait vivre à ses personnages. Car Looking est une série de personnages, finement croqués et divinement interprétés. Que ce soit Jonathan Groff qui fait profiter Patrick d’une composition d’une extrême finesse, Murray Bartlett qui permet à Dom de bénéficier d’une réelle profondeur ou encore Frankie J. Alvarez qui confère toute son insouciance et son mal être à Agustin, le trio central de Looking est parfait. Autour d’eux, Raul Castillo, Russell Tovey, Lauren Weedman ou même le sémillant Scott Bakula (Code Quantum, NCIS New Orleans), tout le casting permet à la série de conserver une justesse admirable. Alors qu’elle aurait très vite pu sombrer dans la caricature, Looking ne nous prend pas en otage avec une quelconque surenchère émotionnelle puisque l’humour vient contrebalancer régulièrement l’émotion sans pour autant l’annihiler. En centrant son récit sur les problématiques émotionnelles que rencontre ce groupe d’amis, la série parle de vous, de nous en prenant le pouls de notre vie quotidienne.
Après cette première saison et cette réussite artistique qui ne rencontre pourtant qu’un faible écho, HBO commande malgré tout une saison 2, passant même de 8 à 10 épisodes. Reprenant l’évolution de ses personnages tout en tentant de les faire évoluer, les scénarios continuent de confronter Patrick à des choix cornéliens, notamment sentimentaux et sa difficulté à s’engager et accorder sa confiance sans réserves lui vaut de très beaux moments empreints d’une belle sensibilité et parfois aussi d’une mélancolie qui nous étreint. L’empathie que l’on ressent pour le personnage l’est tout autant grâce à sa caractérisation qu’à l’interprétation très nuancée de Jonathan Groff. L’évolution de Dom passe par ses changements professionnels ainsi que par les soubresauts que va connaitre sa relation avec Doris son amie et colocataire et Murray Bartlett continue de lui conférer une vraie émotion et un véritable background. C’est Agustin qui pâtit le plus dans cette seconde saison des nouvelles orientations du récit, son histoire amoureuse prenant totalement le pas sur son avenir professionnel. C’est dommage évidemment mais Frankie J. Alvarez n’en est pas moins bon. Cette saison 2 est dans la droite lignée de la première provoquant l’émotion et sachant faire passer les sentiments au premier plan, loin devant des facilités scénaristiques. Par ailleurs les scènes de sexe ne sont jamais gratuites et ne cèdent jamais à un côté graveleux ou provocateur. La série bénéficie en plus d’une bande son réellement emballante, passant d’un genre à l’autre avec une même réussite.
Et pourtant à l’issue de la saison 2 HBO annonce l’annulation de la série en raison de trop faibles audiences. Un crève cœur pour la communauté de fans que Looking a drainé durant ses deux années d’existence. En lot de consolation, la chaîne offre malgré tout un téléfilm de conclusion à la série qui devrait apporter des réponses à nos interrogations sur l’avenir des personnages. C’est peu, mais c’est déjà beaucoup, à une époque où nombre de séries sont annulées sans sommation. On saura donc dès ce samedi 23 juillet si ce téléfilm est un prolongement toujours aussi subtil aux atermoiements de l’époque et s’il perpétue le reflet fidèle d’une génération que 18 épisodes ont auparavant brillamment montré.
Crédit: HBO