Ce mercredi, à l’occasion d’une conférence animée à l’Institut d’Etudes Politiques d’Aix-en-Provence, la présidente du Front Nationale a persisté dans son entreprise de « dédiabolisation » du parti.
C’était dans les tuyaux depuis quelques jours. Marine Le Pen allait-elle vraiment oser se confronter aux apprentis politistes aixois ? La rumeur enflait, l’effervescence était palpable. Beaucoup sentaient en leur fort intérieur la naissance d’un dilemme déchirant : voulait-on la voir pousser les portes de l’établissement de Sciences Po ? Elle faisait peur, mais elle fascinait aussi. Car cette femme est un véritable monstre politique. Une oratrice née, des qualités de tribun qui la rendent capable de soulever et de faire vibrer les foules. C’est également pour cette raison qu’elle fait si peur, parce qu’elle est dangereuse. Ces capacités naturelles lui permettent de mobiliser l’électorat qui oscille entre droite modéré et droite dure. Et surtout, parce qu’elle ratisse bien plus large que son père.
Sur le parvis de l’institut, ça gronde. Deux-cents cinquante étudiants brandissent banderoles et pancartes et pestent contre la venue de l’ex-candidate à la présidentielle. Marine Le Pen, elle, rentre par la porte de derrière et s’adonne aussitôt à la traditionnelle conférence de presse. 18 h 00 pétantes, il est maintenant temps de pénétrer dans l’enceinte de l’amphithéâtre Bruno Etienne, où l’attendent près de deux-cents étudiants, le couteau entre les dents.
« L’Euro est mort »
Première incompréhension dans l’assistance, Marine Le Pen ne vient pas discuter de l’histoire du Front National comme cela avait été annoncé. En réalité, elle viendra débattre de questions d’actualité. Premier thème abordé, le budget et la finance. « L’Euro est mort, affirme la fille de Jean-Marie. Le coût du sauvetage de la Zone Euro est de 1100 Milliards d’Euros, ce qui met en danger le budget de notre pays ». Pour affirmer ensuite, avec une assurance déconcertante que « l’Euro disparaîtra car les peuples d’Europe se révolteront contre la politique d’austérité imposée par l’Allemagne ». Première stupeur dans l’assemblée : elle avait donc réussi à passer la sécurité avec sa boule de cristal.
Moins prévisible, Marine Le Pen s’érige ensuite en grand défenseur des femmes voilées. Selon elle, il est primordial d’interdire le port des signes à caractères religieux pour garantir leur protection. A la question « Que pouvez-vous nous dire à propos de l’interdiction du voile et de la kippa dans les lieux publics ? », elle répondra : « Et vous, que pouvez-vous me dire à propos de ceux qui les arrachent , dans la rue ou à l’école ? ».
« François Hollande est très imprudent »
Attention, scoop retentissant ! « Le Front National n’est pas un parti d’extrême droite » explique la patronne du FN. Marine Le Pen a mis le « foutoir » sur l’échiquier politique. Aucune question sur sa politique migratoire ne sera posée. Interprétons-le comme on veut. Là, c’est le moment où le Président de la République va en prendre pour son grade : « Monsieur Hollande a affirmé que la sortie de la crise en Europe était proche. Mais c’est au moins la 28ème fois que j’entends ça ! Il est très imprudent. ».
Ensuite, rien de vraiment nouveau, elle est contre le mariage homosexuel, contre l’adoption pour les parents homosexuels, contre une Europe Fédérale, contre, contre, contre…
Pas facile de bouger un tel animal politique. Les étudiants avaient beau se montrer provocants, francs-tireurs et je-rentre-dans-le-lard, elle ne semblait pas déstabilisée d’un cheveu. Au final, Marine Le Pen n’avait pas dit grand chose, et l’assistance n’avait pas appris grand chose non plus. Conclusion ? Une page Wikipédia aurait sans doute fait aussi bien.