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On a aimé : l’exposition « teamLab : Au-delà des limites »

Le collectif japonais propose une exposition virtuelle et interactive, dans laquelle le visiteur devient un rouage du mécanisme artistique. Lumineux.

« Le regardeur fait le tableau » disait Marcel Duchamp, soulignant l’omnipotence du spectateur dans l’édification du statut d’œuvre.  Mais depuis les années 1960 et l’avènement des technologies informatiques, le regardeur est devenu acteur, et sa présence s’est révélée indispensable afin d’alimenter le fonctionnement de nombreuses œuvres. Cette interactivité nouvelle ne s’oppose toutefois pas à la contemplation, mais en est au contraire le complément : elle maintient en effet notre état d’attention en sollicitant un plus grand nombre de sens.

C’est sur ce postulat que repose le travail du collectif japonais teamLab, fondé en 2001, et qui réunit près de 550 architectes, programmateurs, animateurs 3D et ingénieurs. Située au confluent de l’art et de la science, cette équipe d’« ultratechnologistes » cherche alors à créer de nouveaux mondes numériques, vecteurs d’un message animiste et écologiste.

Au-delà des limites

L’exposition porte particulièrement bien son nom et ne cesse de transcender les frontières qui composent notre monde. Technique d’abord, avec un budget qui se chiffre en millions, 116 vidéoprojecteurs et 230 ordinateurs de capteurs de mouvement en fonctionnement permanent. Visuelle ensuite, le spectateur étant baigné dans la pénombre dès son arrivée, perdu dans l’immensité de l’espace et apercevant au loin les premiers effets lumineux, prémices de son périple. Physique enfin, la technologie numérique permettant à l’art de s’affranchir de la contrainte du cadre, les projections s’étalant du sol au plafond et en trois dimensions.

En plaçant l’interactivité au cœur de l’expérience, teamLab cherche à établir un dialogue entre le virtuel et le réel. La première installation, Graffiti nature, offre ainsi la possibilité pour le visiteur de dessiner des animaux qui, une fois scannés, seront intégrés dans cet écosystème numérique : les plus petits seront mangés par les plus gros, matérialisation de l’implacable chaîne alimentaire. Plus loin, un mur inondé de poissons réagit à notre contact, ceux-ci évitant alors de nous heurter.

Si ces animations fascineront les plus jeunes, il ne faut toutefois pas se méprendre sur l’intention qui s’y cache : l’exposition est moins une prouesse technologique qu’un voyage introspectif. Les mouvements ne sont en effet pas détectés instantanément, si bien qu’il arrive parfois que l’on ne comprenne pas où se trouve l’interactivité. Dès lors, il convient de lâcher prise et d’embrasser une attitude plus contemplative, observant ces va-et-vient lumineux.

Une reconnexion à la nature

Car c’est tout là le paradoxe : teamLab veut reconnecter l’homme moderne à la nature, par le biais de la technologie. L’interactivité n’est qu’un prétexte, permettant de mieux instiller en creux son propos. Le chef d’œuvre de l’exposition que constitue l’immense cascade de 11 mètres de hauteur est ainsi révélateur : le visiteur, immobile, peut dévier le cours de l’eau, en la touchant ou en s’asseyant, tel un rocher. Mais il arrive parfois que celui-ci soit enseveli, devenant témoin privilégié d’une nature qui reprend ses droits.

Dans une autre salle, la nature ne tient plus compte de sa présence et le visiteur assiste à une danse tournoyante orchestrée par des corbeaux, accompagnés d’une multitude d’effets visuels qui reproduisent leur sillage ou des fleurs. En fond sonore, une musique apaisante réalisée par le compositeur Hideaki Takahashi est jouée en boucle, comme une métaphore du cycle de la vie. Immergé dans cet espace-temps, le visiteur se sent alors infiniment petit, émerveillé par cette simplicité majestueuse.

« Quand je vais voir La Joconde au Louvre, note Takashi Kudo, membre du collectif, je suis perdu dans la horde de touristes. Je ne peux pas partager un moment d’intimité avec elle. Nos installations offrent à chaque visiteur un moment singulier, unique, qu’il conservera pour l’éternité. » Le pari est réussi.

Exposition jusqu’au 9 septembre, du mardi au dimanche 10h-19h, vendredi et samedi 10h-22h, Grande Halle de la Villette, 211, avenue Jean-Jaurès, Paris 19e, 10,90-14,90 €.

A lire aussi : On a vu l’exposition « Encore un jour banane pour le poisson-rêve » au Palais de Tokyo

 

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Étudiant en science politique, explore l'Art et joue le dimanche à ses heures perdues.
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